ratiquant au jour le jour la loi Evin depuis plus de quinze ans, l'avocat Olivier Poulet n'en a toujours épuisé le potentiel d'ambiguïtés et d'approximations. Avec son expérience, il peut désormais résumer la loi 91-32 du 10 janvier 1991 à un « texte rédigé de telle manière qu'il laisse la place à l'interprétation, en ne définissant pas avec précision des termes (publicité, affichage...), ou en abordant des thèmes très généraux (mode de consommation). Au final, la marge de manœuvre est laissée au juge. » Les attaques a priori aléatoires des gardiens hygiénistes de la loi Evin (l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie semble actuellement sensible à la question des parrainages et des mécénats) achèvent de dessiner un environnement juridique incertain pour la communication des vins et spiritueux. Depuis son cabinet de Rennes, Olivier Poulet (photo) estime qu'il n'est tout simplement pas possible de certifier « la conformité d'une campagne publicitaire pour des boissons alcoolisées avant son lancement, tant les incertitudes d'interprétation de l'ANPAA et des Juges sont grandes ».
Pour clarifier cette équation aux inconnues multiples, l'ancien directeur juridique de Pernod vient de lancer le site Alcool&Droit (accessible sur abonnement), avec l'objectif ambitieux de centraliser l'ensemble des éléments permettant de cerner la mise en application de la loi Evin : des travaux parlementaires de 1991 aux décisions de justice, en passant par la loi même et les recommandations déontologiques de l'Autorité de Régulation de la Publicité Professionnelle (l'ANPAA ayant demandé le jugement de publicités en conformité à ce code). L'autre originalité de ce site-ressource est de proposer des fiches pratiques permettant de répondre aux diverses questions que sont amenés à se poser les opérateurs de la filière des vins et spiritueux : « quelles sont les mentions légales sur un site internet ? », « peut-on offrir des tee shirts au nom d’une marque d’alcool ? », etc.
Fonctionnant sur le modèle d'une liste positive, la Loi Evin interdit de facto tout ce qui n'est pas autorisé par le texte. Ce qui la rend « inadaptée à notre époque » juge Olivier Poulet, « depuis 2009 la loi autorise internet comme support de communication, mais de manière très large et imprécise ». Si les prochains textes de santé publique auraient pu permettre de clarifier le texte, « le débat est monopolisé par l'ANPAA et la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie, qui vont dans le sens du durcissement des règles, plus que vers leur simplification ou a minima leur clarification. »
[Photo : cabinet Olivier Poulet]