e microbiome (ensemble des micro-organismes) du sol joue un rôle dans le dépérissement du vignoble. C’est ce qu’a expliqué Virginie Lauvergeat, maître de conférences à l’université de Bordeaux, le 6 novembre lors des 9ème rencontres InnoVINseo, organisées par les clusters Innovin et Vinséo et qui portaient sur les « Sols vivants : piliers invisibles de la viticulture durable ». Dans le cadre de ses travaux, elle a prélevé du sol dans des parcelles viticoles dépérissantes (faible vigueur et faible rendement) et dans des parcelles non dépérissantes puis elle a analysé leur composition en micro-organismes. Verdict : la quantité de bactéries est plus faible dans les zones dépérissantes. Et à l’inverse la quantité de champignons y est plus importante. De même l’activité enzymatique est plus faible dans les zones dépérissantes. Le séquençage de l’ADN montre également une dysbiose (déséquilibre de la biodiversité) dans les zones dépérissantes.
La diversité des micro-organismes y est beaucoup plus faible avec une prédominance de champignons potentiellement pathogènes et un plus grand nombre de bactéries bénéfiques et de mycorhizes. « Un mauvais développement des plants est souvent associé à une dysbiose. En situation de stress la plante attire des micro-organismes bénéfiques mais cela ne suffit pas toujours à la rétablir. Et on ne sait pas si la dysbiose est une cause ou une conséquence d’un mauvais développement », a expliqué Virginie Lauvergeat. Forts de ces constats, les chercheurs se demandent si, en cas de dysbiose, l’ajout de micro-organismes ciblés permettrait de corriger les choses. L’équipe de Virginie Lauvergeat a ainsi isolé deux bactéries ayant une activité bénéfique. Les expérimentateurs les ont multipliées puis appliquées sur des plants de vigne cultivés sous serre sur un sol en dysbiose. Dans une modalité ils ont appliqué les bactéries seules, dans une autre ils les ont ajoutées à des champignons mycorhiziens. Ils ont également étudié une modalité avec des champignons mycorhiziens seuls et un témoin sans ajout de bactéries, ni de mycorhizes. « Quatre mois et demi plus tard, on a noté une amélioration de la croissance racinaire mais uniquement dans la modalité bactéries + mycorhizes. On a aussi observé une modification des communautés microbiennes », rapporte Virginie Lauvergeat. Les travaux se poursuivent.
Régénérer les fonctions des sols grâce à des biosolutions de nouvelle génération, basées sur les bactéries, c’est justement ce que vise à développer la jeune start-up bordelaise Starfish Bioscience qui commercialise aussi un service de diagnostic biologique fonctionnel des sols. C’est ce qu’a expliqué Sandrine Claus, sa présidente fondatrice. « Les bactéries sont la plus grande source de biodiversité dans le sol. Mais elles sont mal connues. Seulement 1 % d’entre elles le sont. Il y a besoin de développer les connaissances sur le rôle qu’elles jouent dans les écosystèmes sols ». Pour cela l’entreprise réalise des cartographies des bactéries présentes dans les vignobles grâce à une technologie basée sur le séquençage de l’ADN à haute résolution. Dans un domaine bordelais, elle a ainsi analysé les populations bactériennes présentes dans des vignes de l’Entre deux Mers et dans des vignes de Saint-Emilion. Et elle les a comparées à celles retrouvées dans des sols non cultivés situés à proximité. Résultat : la biomasse microbienne est plus faible dans les vignes. Et dans celles-ci les archées oxydatrices d’azote sont deux fois plus nombreuses. « Leur présence est favorisée par les taux de cuivre élevés », a détaillé Sandrine Claus.
Les travaux de la start-up se poursuivent afin de mieux connaître le microbiote des sols viticoles et d’isoler les bactéries clés qui permettraient de restaurer les fonctions essentielles des sols et les régénérer.




