onséquence de la crise viticole, les greffages s’effondrent. « C’est la première variable d’ajustement. Cette année, nous n’avons greffé que 12 millions de plants contre 14 millions les années fastes. Nous avons divisé par deux les greffages à destination de Bordeaux et de 80 % ceux pour Cognac », indique Sébastien Velletaz, gérant des pépinières Velletaz Groupe dont le siège se situe en Savoie.
Dans le Vaucluse, Giovanni Varelli, des pépinières éponymes, est passé de 700 000 à 450 000 plants. « Nous n’avons greffé que sur commande et beaucoup de petits lots », justifie-t-il. De leur côté, les Pépinières du Comtat basées à Sarrians ont greffé environ 10 millions de plants, soit 15 à 20 % de moins que l’an passé. En Ardèche, Pierre-Denis Tourette a greffé à peine 2,5 millions de plants alors qu’il vient de s’agrandir en rachetant la pépinière d’un confrère qui partait à la retraite.
Plus au nord, les Pépinières Guillaume à Charcenne, en Haute-Saône, ont également réduit leurs greffages de 15 % et produit 1 million de plants en moins. À Vix, en Vendée, les Pépinières Mercier annoncent la même réduction de voilure.
Mais c’est à Cognac que le coup d’arrêt est le plus brutal. « D’après les premières remontées, seuls 2 à 3 millions de plants d’ugni blanc auraient été greffés contre plus de 30 millions il y a deux ou trois ans », déplore Mickaël Lys, le président du syndicat local.
Face à cette situation, des pépiniéristes se diversifient dans le maraîchage ou les petits fruits. D’autres se lancent dans la prestation de services ou tentent de décrocher de nouveaux clients. « Des marchés s’ouvrent en Normandie, en Bretagne et dans les Hauts de France. Mais ça ne compense pas les pertes dans les bassins historiques », observe Sébastien Velletaz. Ce dernier voit aussi des opportunités à l’export, notamment au Mexique et au Canada, qui se détournent des États-Unis après les sanctions prises par Donald Trump.
Autre piste : l’innovation variétale. « Nos greffages de cépages Resdur augmentent de 30 % par an, mais nous partions de très bas », explique Miguel Mercier. Ce pépiniériste développe également ses propres sélections de cépages résistants, notamment le nathy-sauvignac. « Nous en avons greffé plus de 100 000 plants cette année. » Bientôt, il commercialisera le calardis, un autre cépage blanc résistant dédié aux effervescents qui vient tout juste d’être inscrit au catalogue. Il teste en outre des porte-greffes résistants aux nématodes obtenus aux États-Unis.
Aux Pépinières Velletaz, « dès qu’une nouvelle variété ou un nouveau clone arrive, on plante des vignes-mères pour pouvoir les proposer aux vignerons. Récemment, nous avons planté onze variétés, notamment des cépages grecs (assyrtiko, agiorgitiko…) et deux Resdur 2 », indique Sébastien Velletaz.
D’autres pépiniéristes développent les sélections de domaine et les sélections polyclonales. « La demande pour ce type de matériel augmente de 5 % par an car il est plus résilient face au changement climatique », soutient Pierre-Marie Guillaume. Les Pépinières Viaud, dans le Val de Loire, se sont même spécialisées dans ce créneau. « On fait du sur-mesure, ce qui nous permet d’avoir de la visibilité car les vignerons doivent commander ces plants à l’avance », indique Guillaume Careil, le président. Tout n’est pas sombre dans les pépinières.
Début juillet, la FFPV a lancé un plan de durabilité de la filière pépinière. « L’objectif est de voir comment la pépinière peut s’adapter pour poursuivre ses actions et être présente quand le vignoble repartira », indique Christophe Raucaz, le président de la FFPV. Ce plan se veut pragmatique. Il sera présenté lors du prochain congrès de la fédération qui aura lieu dans le Vaucluse du 21 au 23 octobre.