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"Il faut remettre un repère de prix dans la tête et les comptes des vignerons"
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"Un repère partagé avec le négoce"
"Il faut remettre un repère de prix dans la tête et les comptes des vignerons"

Face à la dévalorisation des vins d'appellation, l’interprofession des vins du Rhône veut dès ce millésime 2025 communiquer des prix d’orientation pour les vins bio ou HVE grâce à l’outil d’accord durable porté par les Vignerons Coopérateurs auprès de Bruxelles. Le point avec Philippe Pellaton, le président de l’Interprofession (Inter Rhône).
Par Alexandre Abellan Le 16 avril 2025
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HVE ou bio ? « Je ne vois pas de déconversion de l’un ou de l’autre. Mais je ne vois pas non plus de tendance à la conversion, on semble être sur un plateau » analyse Philippe Pellaton. - crédit photo : ©Inter Rhone/Clement Puig
Q

uelles sont actuellement les tendances du marché pour les vins du Rhône en général et le vrac des Côtes-du-Rhône en particulier ?

Philippe Pellaton : En volume, les tendances de marché pour les transaction sont à la baisse pour le millésime courant (400 000 hl échangés en Côtes-du-Rhône 2024 contre 430 000 hl l’an passé, soit -9 %), mais sont plutôt dynamiques sur les anciens millésimes. Ce n’est pas illogique, le but est toujours de mettre sur le marché et solder les stocks. En valeur, le millésime 2024 est en moyenne au-dessus de 120 €/hl. Nous sommes plutôt dans une situation stable, qui ne s’est pas dégradée, sans être hyperactive ou explosive. Les marchés se signent particulièrement en Côtes-du-Rhône sur des valeurs raffermies par rapport à l’année dernière. Il y a une forme de prudence, le négoce est tributaire de différents marchés internationaux.

 

Du 1er août 2024 au 31 mars 2025, les mercuriales d’Inter Rhône sur l’AOP Côtes-du-Rhône permettent de chiffrer la bonification du bio par rapport au conventionnel (incluant HVE et Terra Vitis) à +20 €/hl en rouge et +40 €/hl en blanc. Est-ce une survalorisation suffisante par au rapport au surcoût réel ?

Les prix sont meilleurs en bio, mais ils ne sont certainement pas suffisants. Par rapport au bio, le marché est aujourd’hui compliqué et il n’y a certainement pas 100 % des volumes produits en bio qui sont vendus en bio. On a 25 % des Côtes-du-Rhône produits en bio, mais on ne retrouve pas ce poids dans les transactions en volume (pour le vrac, il n’y pas la visibilité sur les sorties embouteillées à la propriété). Tous les producteurs de vins bio ne peuvent pas prétendre à accéder au marché bio. On sent aujourd’hui un delta volumétrique entre ce qui est produit et ce qui est commercialisé. La dynamique de marché n’est pas optimale pour le bio.

 

Une solution, incitant également à rester certifié, serait de mettre en place des accords de durabilité validés par la Commission européenne pour fixer collectivement des prix d’orientation, au maximum ceux des coûts de production + 20 %, pour les vins certifiés Agriculture Biologique (AB) ou Haute Valeur Environnementale (HVE). Avez-vous bien saisi la proposition des Vignerons Coopérateurs ?

Cette ouverture de la Commission européenne permet un débat tout à fait intéressant dans la filière sur les prix d’orientation. Prix d’orientation ne veut pas dire prix d’obligation. Derrière l’orientation, on n’est pas du tout sur les mêmes sujets qu’Egalim qui se voudrait un outil pour définir réglementairement les prix d’un manière quasi absolue. Ce sont deux outils différents, l’un a force de loi, l’autre ouvre une capacité à communiquer. Par le passé, de 2010 à 2016, nous avons pratiqué ce genre de communication, de prix d’orientation. On sait que cela a des vertus. Cela fait aussi partie de notre métier, qu’il soit syndical ou interprofessionnel, d’envoyer des messages. Envoyer un message ne veut pas dire que l’on s’organise ou que l’on met en place des choses non-conformes. Mais envoyer un message d’orientation, appuyer sur un coût de production ou sur des valeurs de prix de marché qui peuvent exister, ça me semble tellement évident que nous sommes toujours très surpris de ne pas pouvoir le faire et d’avoir été condamnés pour ce type de pratiques. Je trouve l’ouverture très intéressante, même si elle n’est pas totale, ne concernant que le bio et HVE sur une période de maximum 2 ans. C’est une petite fenêtre qui s’ouvre, mais il faut l’essayer. En viticulture, ça n’a jamais été testé. C’est ce qui nous amené à un accord interprofessionnel dessus. Que la production et le négoce puissent débattre de ce type de mécanique, parce que la logique ce n’est pas la confrontation, mais bien de partager à un moment donné des tendance sur ce que pourrait être ou devrait être un positionnements.

 

Où en est-on actuellement pour Inter Rhône ?

Début avril, nous avons eu un vote formel du conseil d’administration pour que ce soit l’interprofession qui porte le dossier. Les Vignerons Coopérateurs sont la cheville ouvrière et nous avons fait passer notre acte de candidature à la Commission. Le débat sur le positionnement tarifaire ou le prix orientation interviendra dans un deuxième temps. Là, on lève le doigt pour être éligible et ensuite rentrer dans le débat. J’ai beaucoup poussé pour que ce soit l’interprofession qui porte le dossier avec les deux familles. Le Syndicat Général des Vignerons s’était exprimé pour porte ce type de dossier, le négoce a souhaité participer.

 

S’il y a une validation par Bruxelles dans les prochains mois, quelles seront les modalités pratiques de l’outil ?

Nous proposons comme appellations éligibles les Côtes-du-Rhône rouges et Côtes-du-Rhône villages rouges. Ce sont les AOP les plus avancées (ayant des études sur les coûts de production HVE et bio sur une centaine d’opérateurs) et ayant des volumes permettant d’assurer la confidentialité (avec un périmètre et un nombre d’opérateurs important). Les Côtes-du-Rhône vont servir de laboratoire.

 

Votre objectif est-il de proposer dès 2025 des prix d’orientation ?

Clairement, c’est la voie sur laquelle nous avançons. Avec 3 à 4 mois d’instruction, cela nous amène à la rentrée de septembre pour pouvoir avoir un débat serein et constructif afin d’envoyer un message d’orientation sur le millésime 2025.

 

Donner un prix d’orientation pourrait rimer avec simple communication, mais votre expérience témoigne que cela rime avec valorisation. Est-ce que cela peut avoir un effet alors que les marchés sont alourdis par les stocks, malgré les petites récoltes, et que la demande est très incertaine, des effets directs des taxes Trump aux risques de crise économique mondiale… ?

L’expérience nous a montré que lors d’une période de gros doute, les incertitudes sont multipliées par le nombre d’opérateurs. On peut avoir une perte de repères comme on l’a vécu en 2010. Aujourd’hui, la valeur des choses peut être abimée. Il faut remettre un repère de prix dans la tête et les comptes des vignerons. Un repère partagé avec le négoce. Il faut que les deux familles s’accordent sur les coûts de production pour trouver un bon positionnement. Cette orientation a une notion pédagogique. L’écart type se resserre quand le marché est stable. Dès que l’on est en dans une période de trouble, on a un décrochage des extrêmes : les prix peuvent aller très haut alors que le milieu de gamme peut aller très bas. Et finalement on en perd nos repères. Cette mécanique a pour but de remettre la valeur sur l’AOP embarquant une démarche environnementale. Ce n’est pas obligatoire, mais c’est un positionnement.

 

Cela permettrait de donner un autre indicateur que la mercuriale qui décrit le passé, mais peut s’imposer comme prix indépassable... 

L’unicité du prix de mercuriale peut perturber le positionnement du marché. Aujourd’hui, on a les données, mais on ne peut pas les sortir. C’est frustrant et assez incompréhensible que des organismes qui gèrent de l’économie comme les interprofessions, ne puissent pas livrer ces informations. Ce n’est pas parce que l’on donne ces chiffres que l’on met en place un système mafieux. Ce serait une erreur de ne pas se saisir de cet outil pour voir comment remettre de la rentabilité dans le vignoble.

Un prix d’orientation pourrait-il raboter la plus-value des lots plus haut de gamme ?

Je ne pense pas. Nous n’avons pas constaté d’écrasement par le haut dans les années 2010 quand nous communiquions des prix. La relation commerciale intime entre un producteur et un négociant est indexée sur le marché, mais elle est déconnectée de sa sensibilité. Si on donne un cadre de travail sur le coût de production pour les vins HVE et bio, c’est un outil intéressant. Je ne suis pas inquiet pour le haut de gamme.

 

Sur l’autre dossier de revalorisation du prix des vins, où en est la révision d’Egalim et son intégration des spécificités de la filière vin ?

Le dossier reste porté par le Comité National des Interprofessions des Vins à appellation d'origine et à indication géographique (CNIV). La filière a déposé ses propositions, dont la clé de voûte est la subsidiarité : seul celui qui veut y aller, y va. Aujourd’hui, la balle n’est pas tout à fait dans notre camp. Je n’ai pas de visibilité sur le calendrier parlementaire. La profession demande d’avoir quelque chose d’abouti pour la récolte 2025.

 

Quid des Organisations de Producteurs (OP), qui génèrent de la tension entre Vignerons Indépendants et Vignerons Coopérateurs ?

C’est en dehors du champ interprofessionnel, le dossier est étudié par le Syndicat Général des Vignerons comme cela concerne la branche des producteurs. Le débat a été posé à Bordeaux et ruisselle chez nous, mais nous n’avons jamais eu de tensions sur ce sujet.

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Olivier Metzinger Le 22 avril 2025 à 18:12:13
Ce ne sont pas les vignerons qui ont besoin d'un repère de prix, ils savent ce qu'il en coute de produire avec des cahiers des charges sérés. Et c'est bien plus que ce que les acheteurs veulent bien payer.
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