as d’omelette sans casser d’œuf. « La première année où nous avons vinifié notre côtes-du-rhône rouge sans sulfites ajoutés, nous avons eu de l’éthanal et des goûts de souris, annonce Thierry Walet, œnologue à l’Union des Vignerons des Côtes-du-Rhône — Cellier des Dauphins, à Suze-la-Rousse, dans la Drôme. Tout ceci est derrière nous : nous avons appris à maîtriser le process. »
Tout d’abord, la cave a renforcé l’hygiène et revu son assemblage, en y incorporant « plus de syrah, cépage réducteur, que de grenache », précise Thierry Walet. C’est ensuite au chai que toute une série d’adaptations ont eu lieu. « Dès l’arrivée des raisins à la cave, nous ensemençons avec des levures non-Saccharomyces afin de coloniser le milieu pendant la phase préfermentaire, indique l’œnologue. Puis nous ensemençons en Saccharomyces et en bactéries lactiques. Dès que les fermentations sont achevées, les vins sont soutirés et mis au propre par le biais d’une filtration tangentielle. Nous effectuons tous les transferts sous azote, et nous mesurons à chaque fois la teneur en oxygène dissous pour nous assurer qu’il n’y a pas de risque d’oxydation. À la mise, qui a lieu en mars, nous réalisons une filtration finale sur membrane à 0,65 micron. »
Fabien Gaïde, propriétaire du domaine Julien de l’Embisque, 45 ha à Bollène, dans le Vaucluse, a lui aussi dû rectifier le tir. Ce vigneron vinifie en 2018 son premier côtes-du-rhône rouge sans soufres ajoutés, un assemblage à 70 % de syrah et 30 % de grenache. Tout se passe sans encombre. L’année suivante, il inverse la proportion entre ces deux cépages afin d’obtenir un vin moins structuré. « Des goûts de souris sont apparus immédiatement après la fermentation, confie-t-il. Ils ont disparu par la suite et j’ai pu mettre le vin en bouteille. Mais je suis revenu à l’assemblage initial, en sélectionnant mes syrahs les plus tanniques, et en poussant les extractions car les tanins protègent les vins de l’oxydation. » Fabien Gaïde filtre aussi ses vins une première fois dès la fin de la malo, et les met en bouteille dès mi-décembre.
À Lézan, dans le Gard, Patrick Repellin garde un très mauvais souvenir du millésime 2009, le troisième qu’il a vinifié sans soufre. « L’acidité volatile a explosé dans une cuve à cause des bactéries lactiques, la bête noire des vignerons qui travaillent sans sulfites, relate-t-il. En l’espace de quelques jours, elle a atteint 0,9 g/l. J’ai réussi à stopper cette envolée grâce à une flash-pasteurisation, mais le vin est resté non marchand. » Depuis, il a trouvé la parade : il met ses vins au propre dès la fin de la malo. « Je soutire et je colle au blanc d’œuf, puis je réalise un second soutirage dans les quinze jours qui suivent », détaille-t-il, précisant qu’il pratique en cave une hygiène draconienne. Et il analyse tous les mois l’acidité volatile. « Depuis, nous n’avons plus de souci », se félicite-t-il.