Pourquoi l'Etat Français a-t-il attendu aussi longtemps (novembre 2001) pour retirer du marché l'arsénite de sodium, alors que dès 1973 le ministre de l'Agriculture l'avait interdit pour toutes les cultures, sauf la vigne ? C'est un scandale sanitaire dont les responsables doivent maintenant être inquiétés » s'indigne Valérie Murat, qui va déposer plainte contre X ce 27 avril au pôle de santé publique (Paris IX). Membre de l'association Phyto-Victimes, cette militante anti-phyto part en quête des coupables de l'empoisonnement de son père, James Bernard Murat. Vigneron dans l'Entre-deux-Mers, il a succombé fin 2012 à un cancer pulmonaire, des suites d'expositions chroniques à l'arsénite de sodium (la maladie professionnelle a été reconnue par la MSA en février 2011).
Se préparant à une procédure pénale aussi longue qu'éprouvante, Valérie Murat attend de l'enquête la détermination de la responsabilité des fabricants de phytosanitaires et des services de l’Etat. Et n'allez pas lui dire que les bidons précisent la dangerosité du produit. Sinon elle vous rétorquera que « concernant l'arsénite de sodium, la recommandation du Centre International de Recherche sur le Cancer est "cancérogène avéré" (étiquetage R45), mais les firmes phytopharmaceutiques ont répercuté la mention "cancérogène suspecté" (R40). Une erreur reprise par les services de l'Etat. » Tout l'argumentaire, au cœur de sa démarche judiciaire (également portée par sa mère), est ainsi le décalage entre la connaissance des risques liés à l'arsénite de sodium et l'interdiction effective de ces traitements dans le vignoble. L'argumentaire estime que ce retard est la cause « de la mort de professionnels par des maladies agressives dont ils ne connaissent pas la raison » affirme Valérie Murat.
Première plainte contre X dans le cadre d'une exposition viticole aux phytos, le dossier est porté par l'avocat parisien François Lafforgue. Il défend notamment la famille Bibeyran pour la reconnaissance post-mortem comme maladie professionnelle du cancer hépatique de Denis Bibeyran (le délibéré de l'affaire vient d'être reporté, en attente d'expertise médicale). Fin 2014, la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions a été saisie pour mise en danger de la vie d'autrui avec la mise en marché de produits phytopharmaceutiques cancérigènes (cliquer ici pour en savoir plus sur cette procédure civile).
[Photo : Valérie Murat ce 5 mars devant la Cour d'Appel de Bordeaux ; Alexandre Abellan/Vitisphere]