En 2014, la récolte languedocienne s’élèverait à 12,6 millions d'hectolitres de vins (-7,4 % par...

Hernán Ojeda : « depuis 2000, le vignoble languedocien est en sécheresse, 2014 reste dans cette lignée »

ans le vignoble du Languedoc-Roussillon cet été, « la sécheresse n'est pas plus importante que les précédentes années, elle se situe dans la normale de la décennie » tranche d'emblée le docteur Hernán Ojeda, directeur de l'unité expérimentale de Pech Rouge (Institut National de la Recherche Agronomique). Alors que les pépiniéristes ont récemment tiré la sonnette d'alarme face à une situation exceptionnelle en Hérault (« jamais vue depuis 1953 »), Hernán Ojeda nuance le tableau : « au début de la saison, on a bien pensé que la sécheresse serait extrême (il avait très peu plu durant l'hiver). Mais la situation ne s'est pas aggravée et s'est peu à peu atténuée, devenant moins contraignante avec les conditions climatiques de juin. » Remettant les phénoménes climatiques en perspective, il précise que « depuis l'an 2000, nous avons connu une situation de sécheresse continue, avec des pics importants en 2001, 2003, 2006 et 2009. 2014 reste dans cette lignée, typique d'une sécheresse précoce. Je ne crois pas qu'il faille être particulièrement alarmiste avec ce millésime*. » Un avis confirmé par les premières prévisions de récolte de la DRAAF (au 23 juillet), qui estime la récolte languedocienne à 12,6 millions d'hectolitres de vins (-7,4 % par rapport à 2013) en et divise la région en « deux zones bien distinctes : le centre de la région, vaste secteur viticole entre Béziers et Narbonne en fort déficit hydrique et les autres zones, avec des niveaux de précipitations hivernales corrects ».

Spécialiste de la gestion de la contrainte hydrique, le chercheur argentin se souvient qu'au début de ses recherches (dans les années 1990), « certains disaient que l'on dépensait l'argent public pour rien. A partir de l'an 2000, quelque chose a changé, on le constate sans pouvoir dire s'il s'agit d'une conséquence durable du réchauffement climatique. » Les mentalités vis-à-vis de l'irrigation ont également changé alors que le stress hydrique devenait la norme. « Au-delà d'un certain seuil n'y a pas d'autre solution que l'irrigation » estime Hernán Ojeda, « les autres outils (enherbement, choix des cépages et porte-greffes...) ne permettent que de compenser une partie des effets de la sécheresse ». En bon défenseur du juste milieu, prônant une irrigation raisonnée, il se méfie finalement autant des anti-irrigations que des pro-irrigations quand ils ont des conceptions aussi traditionnelles qu'extrêmes : « ceux qui sont opposés par principe (et souvent sans arguments techniques) et ceux qui irriguent toujours de la même façon (100 mm au plus) ne répondent pas à l'équation économique posée par la contrainte hydrique, entre rendement et qualité des raisins. »

 

 

* : L'expert du stress hydrique de la vigne précise cependant parler de valeurs moyennes d'évapotranspiration, soulignant la grande hétérogénéité que l'on peut constater entre parcelles, même voisines : « on ne peut généraliser un état hydrique à toute une région ».

 

[Photo : DR]