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Le pourri du cru
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Le pourri du cru

Par Alexandre Abellan Le 26 août 2022
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Le pourri du cru
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erroirs propices à la croissance des raisins, les vignobles sont des crus où la magie des vendanges et alchimie des vinifications transforment un fruit en vin. Un phénomène tenant autant d’un naturel spontané que d’une maîtrise culturelle. Permettant de revenir à ces concepts fondamentaux, le défunt ethnologue Claude Lévi-Strauss soulignait dans ses écrits tout le jeu d’équilibriste aboutissant à la production d’une boisson alcoolisée. Dans son premier tome des Mythologiques, le Cru et le cuit (publié en 1964 aux éditions Plan), il rapporte un mythe des indiens tukuna où il est question d’un breuvage d’immortalité peu râgoutant : « une boisson dont la préparation se situe à mi-chemin entre la fermentation et la putréfaction, ou plus exactement, dont il semble qu’en raison de la technique indigène, les deux vont inévitablement de pair » analyse l’ethnologue, rapportant d’autres histoires d’alcool où le pourri n’est jamais loin*.

Dans le triangle culinaire qu’il a défini en 1965 (dans un article éponyme paru dans l’Arc), Claude Lévi-Strauss indique que la cuisine, « activité humaine véritablement universelle », se définit par trois « sommets correspondant respectivement aux catégories du cru, du cuit et du pourri ». Où « le cru constitue le pôle non marqué », tandis que « le cuit est une transformation culturelle du cru » et que « le pourri en est une transformation naturelle ». Partant du cru pour aller vers le pourri par la fermentation, le vin tient aussi du (viti)culturel par la production soignée du raisin et sa transformation codifiée de solide en liquide. Une position d’interface que l’on retrouve dans la diversité des caractéristiques organoleptiques du vin : arômes fruités et fermentaires, odeurs animales et végétales… Pas facile de distinguer le pourri du cru dans le vin, qui tient des deux (et parfois du cuit, entre coups de soleil à la vigne et coup de chaud dans les thermovinifications).

Si la cuisine du vin est désormais œnologique, cette boisson n’en conserve pas moins sa dimension spirituelle. Dans le troisième tome des Mythologiques, L'origine des manières de table (1968), Claude Lévi-Strauss note que si l’aliment « sert d'abord à nourrir, [le vin sert] à honorer ».

 

* : Comme un mythe tukuna sur la vie longue qui fait état de « jarres pleines de bière et celle-ci étaient grouillantes de vers » et « un petit mythe taulipang raconte comment le chien, premier possesseur du hamac et des graines de coton, les céda aux hommes en échanges de leurs excréments qu’il appela sakura, c’est-à-dire purée de manioc mastiquée et fermentée, servant à la préparation de la bière » relate le Cru et el cuit.

 

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Tous les commentaires (2)
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Lear Le 27 août 2022 à 02:14:43
Voilà de l'édito! Merci d'avoir carrément relevé le niveau.... Gardez-le comme une AOP!
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Vigneron Le 26 août 2022 à 14:34:12
Nature et Culture sont étroitement liées. Le cuit serait une transformation culturelle mais peut aussi être une transformation naturelle: l'effet du soleil sur les raisins voulu ou non. Le pourri, certes une transformation naturelle, mais la boisson des indiens tukuna semble l'utiliser, donc n'est ce pas aussi culturel ? Par contre, le vin ne part pas du cru pour aller vers le pourri par la fermentation, je crois que ce célèbre ethnologue manque de connaissances oenologique ou bien qu'il cherche à défendre ses idées malgré la réalité physique. Car c'est le sucre qui permet avec les levures saccharomyces cerevisae de transformer le raisin en alcool et non le pourri du raisin qui donne de l'acidité volatile (vinaigre). Tout les vins ont en une partie très faible, heureusement ce n'est pas la composante principale. Il ne faut pas oublier l'hygiène en cave, l'alcool qui tue les microbes, le souffre qui est un antiseptique, antioxydant et antibactérien, et les filtrations stériles qui éliminent tout microbe/bactéries. Donc tout ce processus culturel fait pour éliminer le pourri naturel qui n'est pas un produit recherché dans le vin.
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