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De moins en moins d'herbicides disponibles pour désherber les vignes
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Désherbage
De moins en moins d'herbicides disponibles pour désherber les vignes

Le désherbage chimique continue de perdre du terrain face au travail du sol. La liste des produits autorisés se réduit. Et l’usage du glyphosate est désormais plafonné à 450 g/ha/an.
Par Marion Coisne Le 11 février 2022
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 De moins en moins d'herbicides disponibles pour désherber les vignes
La liste des herbicides autorisés pour désherber les vignes sous le rang s'est considérablement réduite. - crédit photo : Christian Watier
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ù se cantonne le désherbage chimique ?

En général, uniquement sous le rang, en association ou non avec du travail du sol. Aujourd'hui, rares sont les parcelles encore désherbées en plein.

Quels herbicides restent autorisés en 2022 ?

Une douzaine en pré et post-levée, y compris le glyphosate, avec toutefois de nouvelles restrictions pour ce dernier. En prélevée, le propyzamide (Kerb Flo), la flumioxazine (Pledge), le flazasulfuron (Katana), Elysium (diflufénicanil et métribuzine), la napropamide (Devrinol F), l'isoxaben (Cent 7), sont encore utilisables. En revanche, l'oryzalin (Elan/Foen, Sélectrum) est retiré du marché. Corteva a choisi de ne pas soutenir la molécule. « Un choix économique face au marché herbicide qui s'érode », explique la firme. Outre le glyphosate, en post-levée, les viticulteurs peuvent recourir au pyraflufen-éthyl (Sorcier), à la cycloxydime (Stratos Ultra), au fluazifop-P (Fusilade Max), au propaquizafop (Agil/Ambition) et à l'acide pélargonique (Beloukha), le seul herbicide de biocontrôle autorisé aujourd'hui.

A quelles conditions peut-on utiliser le glyphosate ?

En se limitant à 450 g/ha/an, sauf dans les parcelles où le désherbage mécanique est impossible : en forte pente ou en terrasses, caillouteuses et dans les vignes-mères de porte-greffe. Dans toutes ces situations, le glyphosate reste autorisé en plein à la dose maximum de 2 160 g/ha. Ailleurs, il n'est applicable que sous le rang dans la limite de 450 g/ha par an. L'Anses a revu les autorisations de mise en marché de tous les produits à base de glyphosate dans ce sens. S'il en restait encore qui échappaient à ces restrictions en 2021, ce n'est plus le cas en 2022.

À noter qu'au printemps 2021 l'Anses a levé la restriction limitant l'utilisation de l'herbicide à 20 % de la surface des parcelles. Mais la matière active est en sursis. Son autorisation européenne expirera le 15 décembre 2022. Sera-t-elle renouvelée ? L'avenir le dira.

Peut-on encore imaginer du 100 % chimique sous le rang ?

Oui, même si les conseillers pointent le risque d'une efficacité limitée. L'emploi de glyphosate étant plafonné à 450 g/ha/an, on ne peut plus faire qu'un seul passage : soit en sortie d'hiver, soit en juillet pour détruire les vivaces. Les viticulteurs qui veulent faire du 100 % chimique doivent donc compléter leur programme par des herbicides de prélevée et/ou d'autres post-levées.

Pour Johan Kouzmina, conseiller viticole à la chambre d'agriculture de la Marne, « cela devient difficile d'avoir une réussite satisfaisante avec un programme tout chimique vu les solutions actuelles. » Sans compter le risque d'une montée des résistances des adventices au glyphosate, avec la dose à 450 g. « Mais les producteurs qui ne sont pas encore équipés pour le travail du sol, ne vont pas avoir le choix, vu les délais d'attente pour les outils. »

Avec quel programme ?

En associant herbicides de prélevée et glyphosate. En Champagne, Johan Kouzmina, évoque un Pledge (flumioxazine) fin février, puis un glyphosate « le plus tard possible », courant avril. « Si la parcelle est propre, avec un historique d'utilisation d'herbicides, cela passe », explique-t-il. Si la parcelle est envahie d'adventices en sortie d'hiver, il préconise d'associer Pledge à un glyphosate (la flumioxazine étant désormais mélangeable), ou de positionner un Katana (flazasulfuron) seul, ce produit ayant une action de pré- et post-levée. « Mais, avec ce produit, il y a des échecs car il a un défaut d'efficacité sur un panel de plantes comme la morelle noire, l'euphorbe, la fumeterre, le rumex, le plantain, le géranium ou encore le laiteron », explique-t-il. Ce conseiller ajoute qu'avec ce type de programme il faut bien protéger les complants pour éviter toute phytotoxicité. En avril, les graminées peuvent aussi être détruites avec Stratos Ultra. « Ainsi, on peut garder le glyphosate en application estivale pour gérer les vivaces, par exemple », précise-t-il.

En Gironde, la stratégie est plutôt de conserver le glyphosate pour les applications estivales. David Perrier, conseiller viticole à la chambre d'agriculture de Gironde sur le secteur de l'Entre-deux-Mers, recommande de démarrer avec Kerb Flo (propyzamide) en hiver, si la parcelle n'est pas trop sale. « L'objectif est de passer entre mi-novembre et mi-janvier pour nettoyer la parcelle. Kerb Flo est un herbicide de prélevée qui a aussi une efficacité sur les plantules, notamment les graminées. C'est un produit que nous utilisons sur des problématiques raygrass », explique-t-il. Ensuite, en sortie d'hiver, le viticulteur peut réaliser un passage avec d'autres prélevées. « Katana et Pledge à dose réduite et en mélange, car ensemble ils ont un bon spectre », indique le conseiller qui préconise 250 g/ha sous le rang de Pledge et de 30 à 35 g/ha de Katana. À noter que Pledge doit être appliqué impérativement avant le débourrement pour éviter tout risque de phytotoxicité sur la vigne par splashing. « Il faut essayer d'intervenir sur des sols propres, ajoute David Perrier. Certaines années peu pluvieuses, un tel programme peut suffire et il n'y aura pas besoin de repasser l'été. Dans le cas contraire, on peut mettre un glyphosate. » Pour optimiser l'efficacité du glyphosate, David Perrier recommande de l'utiliser avec un adjuvant.

Dans le Vaucluse, Rémi Vandamme, conseiller à la chambre d'agriculture, n'est pas un adepte de Pledge, « à cause de son classement » (H361d : susceptible de nuire au fœtus) et de sa ZNT aquatique de 50 mètres. En sortie d'hiver, il penche plutôt pour d'autres prélevées, comme Katana ou Elysium (métribuzine + diflufénicanil), suivi d'un glyphosate en saison. Toutefois, « Pledge peut quand même être utile pour alterner les matières actives d'une année à l'autre et éviter les inversions de flores ». Pour le rattrapage avec le glyphosate, il insiste sur la nécessité de passer en préventif, sur plantules, pour que l'application soit efficace.

Dans le Maine-et-Loire, l'ATV 49 propose un programme sous le rang à base d'herbicides exempts de classement CMR. Avec deux options. Si le sol est nu ou avec un couvert très irrégulier, les conseillers proposent d'intervenir en prélevée dès que possible, soit avec Devrinol F (napropamide) à pleine dose si la parcelle est à historique graminées, soit avec Katana (flazasulfuron) à pleine dose si la flore est constituée d'amarante, chénopode, érigéron, géranium et qu'il n'y a pas de morelle. Dans ces situations, l'ajout d'un post-levée est inutile. En revanche, si le couvert végétal est développé et continu sur la parcelle, l'ATV 49 recommande d'intervenir en post-levée dès février-mars avec Katana à 40 g/ha associé à 450 g/ha de glyphosate ou, si la parcelle est éloignée des cours d'eau, avec Elysium (métribuzine + diflufénicanil) à 1 l/ha associé à 450 g/ha de glyphosate.

Peut-on faire du désherbage chimique sans glyphosate ?

Oui, en associant chimique et mécanique. « Avec un système hybride, on limite le nombre de passage d'interceps et l'IFT herbicides », plaide David Perrier. Par exemple, une parcelle « sale » en sortie d'hiver peut être nettoyée avec un passage de brosses de type Herbanet, suivi d'un prélevée. Un autre passage d'Herbanet en mai pour épamprer permettra d'éliminer simultanément les éventuelles repousses de mauvaises herbes. « Et en saison on peut utiliser un glyphosate ou des postlevées comme le Stratos ou le Spotlight. Il est un peu plus compliqué d'utiliser les brosses mécaniques l'été, notamment quand les grappes pendent, car elles soulèvent beaucoup de poussières dans les sols très secs. Par contre il est possible de recourir à des satellites de tonte pour éliminer des érigerons ou les séneçons, qui posent de plus en plus de problèmes en fin de saison », ajoute David Perrier, qui insiste sur l'importance d'adjuvanter, surtout avec les antigraminées.

Pour Rémi Vandamme, le désherbage mixte est également intéressant, avec trois options possibles. Si le sol est propre en sortie d'hiver, il préconise d'appliquer un prélevée suivi d'un travail du sol dès que les adventices germent. Dans le cas contraire, il conseille de commencer par un travail du sol pour nettoyer, suivi dans les 10 jours, d'un prélevée pour éviter les repousses.

Depuis peu, il existe une nouvelle possibilité : appliquer un prélevée et travailler le sol en même temps. Trois matériels le permettent : le Grifherbi, l'Herbiduo et l'Ecocombi. Le Grifherbi est un concept développé par Corteva et Renaud Cavalier, conseiller machinisme à la chambre du Gard. Il s'agit d'un kit de pulvérisation commercialisé par Buisard que l'on monte sur un châssis d'intercep afin d'appliquer un herbicide de prélevée comme le Cent 7 (isoxaben), en même temps que l'on travaille le sol. « Nous avons réalisé des essais en 2021 avec une communauté de viticulteurs, relate Auréliane Bekkal, chef marché chez Corteva. Nous avons montré qu'avec le Grifherbi, on peut économiser au moins un passage mécanique, et sans utiliser d'herbicides foliaires ».

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Le Grifherbi (photo Corteva)

L'Herbiduo, développé par le groupe coopératif CAPL, à Avignon, et le constructeur Hervé & Mauricio, repose sur le même principe. Cet outil est commercialisé par la société Natur'Agri. 

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L'Herbiduo (Photo Vincent Gobert)

Dernier né : l'Ecocombi, un appareil similaire présenté par Chabas lors du Sitevi, basé sur un châssis Spedo.

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L'Ecocombi (Photo Vincent Gobert)

Autre solution, moins en vogue : « C'est possible de rester sur du 100 % chimique, même si ce n'est pas l'idéal », juge David Perrier en Gironde. En sortie d'hiver, dans les parcelles qui ne sont pas trop sales, il propose un passage d'antigerminatifs comme Katana et Pledge lorsque les adventices sont au stade plantule, et en saison un Spotlight pour gérer les dicotylédones, couplé à un antigraminées, comme Ambition ou Stratos. Dans les parcelles avec un couvert important en sortie d'hiver, David Perrier juge qu'il vaut mieux commencer avec une association Spotlight/Stratos pour nettoyer, avant d'appliquer un antigerminatif.

Dans le Vaucluse, Rémi Vandamme, estime qu'un programme 100 % chimique est toujours possible avec, par exemple, un prélevée en sortie d'hiver, et en rattrapage un à deux Beloukha ou un Spotlight. « Quand on n'a pas le choix, on peut faire cela. Mais l'efficacité n'est pas terrible, et le prix important. » Il juge notamment que le Beloukha est très peu utilisé car cher, pas forcément efficace, avec des conditions d'application difficiles à réunir (pas de pluies après traitement?).

Reste que les viticulteurs doivent se préparer à se passer des désherbants. Dans le Vaucluse, Rémi Vandamme indique ainsi travailler « sur la sortie des herbicides tout court ». De même, en Champagne, « les communications sont sur le zéro herbicide »

L’épamprage chimiquepeu pratiqué

Les vignes peuvent être épamprées chimiquement à condition qu’elles aient plus de quatre ans et que l’opération se fasse avant la floraison. Trois matières actives restent autorisées pour cet usage : le pyraflufen-éthyl (Sorcier, Guerrier), la carfentrazone (Spotlight Plus, Shark) et l’acide pélargonique (Beloukha). Philagro recommande d’utiliser Guerrier sur des pampres de 10 à 20 cm. Spotlight Plus de FMC s’utilise sur des pampres non lignifiés, de 20 cm au maximum. Quant à Beloukha, il doit être utilisé sur des pampres de moins de 15 cm. « Dans l’Entre-deux-Mers, le pack Gozaï Max (Sorcier et Beloukha) marche bien sur des pampres de moins de 20 cm, observe David Perrier. Et il est bien classé niveau écotoxicologique ». Dans le Vaucluse, Rémi Vandamme indique que l’épamprage chimique ne se pratique quasiment plus. Et, en Champagne, « c’est zéro », observe Johan Kouzmina, car le risque de dérive est trop important. Épamprer les vignes, que ce soit chimiquement, manuellement ou mécaniquement réduit le risque de contaminations primaires par le mildiou, élimine des rameaux non fructifères, réduit la vigueur et le risque de phytotoxicité des herbicides sous le rang et facilite le passage des engins mécaniques.

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Tous les commentaires (2)
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gz33 Le 28 février 2022 à 14:12:59
et oui...vive la france ! qui sait tout mieux que les autres (surtout quand il faut faire du déficit budgétaire et de la dette!) la chose positive dans tout ça (j'espère), c'est que entreprises se mettent pour de bon à chercher des alternatives aux herbicides chimiques (autres que le travail du sol, irreél pour bon nombre d'exploitations) : et quand on cherche on trouve! ( encore faut il ne pas mettre de battons dans les roues des chercheurs,...là, je pense plus aux lobbies des grosses boites de chimie)...
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VignerondeRions Le 15 février 2022 à 13:46:34
C'est assez étonnant de voir la bêtise humaine à l'oeuvre, on est prêt à brûler 60 à 100 l de GNR à l'hectare pour éviter d'utiliser 1 ou 2 l de glyphosate /Ha. Je ne sais pas ou est le VRAI bilan positif pour la nature. Mais il semble que les intégristes obscurantistes aient déjà gagné la partie. Le symbole même de la France YAKA FAUQUON.
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