our fêter ses 70 ans ce 14 juin à la Cité du Vin, l’académie du vin de Bordeaux s’était choisie pour thème « vin et immortalité ». Un sujet décliné pour le concours d’essai proposé aux étudiants bordelais des formations liées au vin : « longévité, pérennité et postérité : le vin rend-il immortel ? ». Parmi les élèves ayant planché sur cette dissertation, deux se sont distingués : Mayeul Dumas-Gineste, de l’INSEEC BS Bordeaux, et Mathias Guibert, de Sciences Po Bordeaux. Tous deux ont remporté un « prix qui se boit et se lit » : des bouteilles et des livres.
Membre de l’académie du vin bordelais, Aurélie Labruyère (copropriétaire du château Rouget à Pomerol) chapeautait le concours, de l’examen à l’étude des copies. Lors de la présentation du sujet aux candidats, elle a lancé l’idée d’y répondre en alexandrin : un défi relevé par Mayeul Dumas-Gineste.
Son texte est le suivant :
« Se munissant de son âme et de son envie,
Il attrape sa proie pour en ôter la tête,
Il est loin de vouloir lui enlever la vie,
Ne cherchant seulement qu’à brûler la fête.
Mais l’ouvrir est une chose, il faut aussi, sait-on,
En saisir tous le sens en apprécier l’odeur,
La goutte qui se dépose le long du flacon,
Nous laisse le temps d’en admirer la couleur.
Comme tout ce que l’on aime, les pratiques évoluent,
Il ne faut pour autant jeter son dévolu,
Souhaitant ainsi, l’on vit à notre acceptation,
que l’immortalité vit dans la transmission.
Tout au long du voyage dont il a fait sa vie,
Le vin nous a confié sa merveilleuse histoire,
Il avance dans le temps et progresse et grandit,
Et partage la culture et embrasse les savoirs.
C’est pour toutes ces valeurs, toutes ces traditions,
Que nous devons faire preuve d’imagination,
En donnant à ce vin le statut de vivant,
Immortel élixir, un messager du temps.
Répondant à l’épreuve en prose, Mathias Guibert n’est pas moins brillant dans son introduction : « communément qualifié de lait des vieillards au lendemain de la seconde guerre mondiale, le vin est vanté depuis des millénaires et à travers les cultures indo-européennes pour ses vertus de jouvence éternelle. Or, l’homme a de tout temps chercher à conquérir l’immortalité, ou à s’en rapprocher. Vivre plus, vivre mieux et continuer à exister après la mort charnelle sont autant d’espoirs qui ont été cristallisé dans la symbolique vinique. Quand le bon vin, paradoxalement, peut être vu comme éphémère. » Et dans sa conclusion : « c’est donc, me semble-t-il, dans sa propre mortalité, sa finitude, que l’homme puise sa fascination pour un nectar qui symbolise et cristallise depuis des siècles à travers ses représentations, l’immortalité. C’est à travers cette immortalité du vin que l’homme se rassure quant à sa propre postérité et qu’ainsi il continue de rêver. »