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Sula Vineyards : Un modèle de commerce équitable, mais aussi de performance économique
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Inde
Sula Vineyards : Un modèle de commerce équitable, mais aussi de performance économique

S’il est une personne qui incarne le ’self-made vigneron’, c’est bien Rajeev Samant, fondateur et PDG de Sula Vineyards. Parti de quelques hectares de terre seulement au nord-est de Mumbai en Inde en 1999, il est aujourd’hui à la tête d’un empire viticole dans un pays où la culture de la vigne peut paraître pour le moins incongrue. Avec une production de 11 millions de bouteilles, Sula Vineyards détient plus de 60% du marché domestique, mais s’est aussi positionné comme un centre oenotouristique hors pair. Un statut que vient de lui reconnaître le magazine britannique The Drinks Business, en lui décernant un prix pour sa contribution à l’oenotourisme, une première, toutes catégories confondues, pour une entreprise indienne.
Par Sharon Nagel Le 02 septembre 2016
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Sula Vineyards : Un modèle de commerce équitable, mais aussi de performance économique
Rajeev Samant, fondateur et PDG de Sula Vineyards - crédit photo : Sula Vineyards
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’un des sites oenotouristiques les plus visités au monde

Pour l’ex-étudiant de la prestigieuse université américaine de Stanford, ce prix est tout à fait logique. Non pas que l’ancien ingénieur chez Oracle dans la Silicon Valley soit à ce point imbu de sa personne, bien au contraire. « Nous faisons partie des wineries les plus visitées au monde avec 220,000 visiteurs en 2015, dont 95% d’Indiens », explique-t-il, fier plutôt de ce qu’il a accompli en seulement quinze ans. « Sur un seul weekend, pendant la SulaFest, nous recevons 15 000 convives. Notre offre est multiple : outre la salle de dégustation et un grand caveau, nous disposons d’un amphithéâtre, de deux restaurants, l’un indien l’autre italien, d’un hôtel et d’une boutique où nous proposons des objets permettant de valoriser le vin et sa consommation ».  Mais présenter Sula Vineyards comme une sorte de « Disneyland » du vin serait passer à côté des fondamentaux qui assurent l’évolution de l’entreprise et son rang de premier producteur indien de vins.

Aider les populations défavorisées

Des fondamentaux qui sont enracinés, sinon dans le terroir local – la jeunesse du secteur vitivinicole ne l’y autorise pas encore – du moins dans le tissu agricole de cette région plutôt défavorisée, qualifiée de « caste classée ».  Achetant ses raisins auprès de petits producteurs sur une superficie totale de quelque 1 300 hectares, Rajeev Samant n’est pas uniquement fier des performances économiques de son entreprise. « Les préoccupations sociales et environnementales sont capitales chez Sula. Une part majoritaire de nos salariés vient des « castes défavorisées ». Nos deux wineries se situent dans des zones particulièrement pauvres. Dans le village à côté de notre première cave, aucun villageois n’occupait d’emploi officiel avant notre arrivée. Désormais, au moins un membre de chaque famille travaille chez nous et la population possède des vélos, des voitures et des réfrigérateurs ».

Protéger un écosystème fragile

Du point de vue environnemental, Sula Vineyards n’a rien à envier à d’autres caves. « Le maître-mot chez nous est la durabilité. Nous mettons beaucoup l’accent sur les énergies renouvelables – nous avons beaucoup de panneaux photovoltaïques en toiture – nous récupérons l’eau de pluie, nous recyclons chaque goutte d’eau qui entre dans la cave de même que tous les déchets alimentaires issus de nos installations touristiques et du vignoble, qui sont transformés en compost ». Les préoccupations environnementales ne sont pas le seul apanage des économies avancées. Elles revêtent une importance peut-être encore plus marquée dans des pays où la démographie fragilise certaines ressources naturelles.

Le rôle moteur des jeunes femmes

Ces accomplissements n’empêchent en rien de belles performances économiques. Avec ses 60% de parts du marché local, ses vins – dont plus de 50% de rouges – sont distribués à travers le pays, notamment dans les métropoles que sont Mumbai, Delhi, Bangalore et Chennai. Rajeev Samant décrit le profil de consommateur typique de ses vins comme étant « urbain, plutôt bien éduqué, ayant même suivi un parcours éducatif occidental et issu d’un milieu aisé. Nous voyons aussi beaucoup de professionnels des secteurs bancaires ou technologiques, par exemple, rejoindre les rangs des consommateurs de vins ». Il est un autre segment démographique particulièrement influent et porteur pour le secteur du vin en Inde, celui des femmes. « Les jeunes femmes représentent l’un des principaux moteurs de la croissance de la consommation de vin. Traditionnellement, les femmes ne consommaient pas d’alcool en Inde. Aujourd’hui, de jeunes femmes travaillent dans les grandes villes, gagnent un salaire plutôt élevé, disposent d’un revenu disponible important et se sentent à l’aise dans les bars après le travail, où elles consomment du vin en compagnie d’amis ou de la famille. Il y a ne serait-ce que 15 ans, ce n’était pas le cas ».

Développement mesuré de la gamme des produits importés

Sula ne distribue pas uniquement ses propres vins sur le marché indien. Il propose un portefeuille de marques, parmi les plus grandes, de vins et spiritueux sous le nom de Sula Selections. « Nous importons entre 40 et 50 000 caisses par an, mais les volumes progressent très vite. L’année dernière ils ont fait un bond de 50% ». D’où sa volonté d’étendre son portefeuille de marques, mais de façon mesurée. « Les ventes totales de vins représentent peut-être 200 000 caisses en Inde. Un importateur ne peut donc pas se permettre de proposer plusieurs vins issus d’une même région. Nous cherchons à référencer un bon producteur dans chaque grande région viticole ». Il reste encore fort à faire car la société vient seulement de référencer son premier vin bourguignon, et ne propose pas encore de Bordeaux, ni de vin espagnol ou portugais. Cette année, un vin du Languedoc et un Prosecco sont venus étoffer sa gamme. « Nous restons prudents et nous sommes fixés un objectif de quatre ou cinq nouvelles références par an », précise Rajeev Samant.

Plusieurs obstacles à l’évolution positive du marché

Il faut dire que le marché indien réserve son lot de difficultés à surmonter pour que le développement du marché du vin s’en trouve facilité. « En réalité, l’Inde n’est pas un pays mais un continent. Y transporter du vin s’apparente à passer d’un pays à un autre, avec toutes les restrictions qu’on connaît au niveau douanier. La règlementation est extrêmement lourde, pour ne pas dire ridicule. Chaque Etat impose des règles qui n’ont rien à voir avec celles de son voisin ». Les infrastructures sont également problématiques. « Le manque d’une chaîne du froid est très handicapant. Il est difficile de vendre des boissons alcooliques dans des magasins non climatisés alors que les températures extérieures dépassent facilement les 35°C ». Sans parler du manque de connaissances des Indiens en matière de vins. « Les Indiens sont très peu sensibilisés au vin et il faudra attendre longtemps avant que cette situation n’évolue ».

Les autorités séduites par les implications pour l’emploi et le développement rural

D’où le rôle primordial joué par des structures comme Sula, d’une part pour faire évoluer la réglementation contraignante qui entrave le développement de la consommation, et d’autre part pour faciliter l’intégration du vin dans les habitudes de consommation, encore très orientées vers les spiritueux et la bière. « Lorsque nous avons déposé notre demande pour créer une cave, le processus a pris deux ans et demi. J’ai dû expliquer en long et en large aux pouvoirs publics, les implications de ce type de structure au niveau de l’emploi et du développement économique rural. Dès lors que Sula avait réussi à franchir toutes ces barrières, 25 caves ont vu le jour dans l’Etat de Maharashtra au cours des trois années suivantes. Les droits d’accise étaient très élevés, maintenant tout vin élaboré et commercialisé à l’intérieur de l’Etat n’y est pas soumis ».  L’intégration du vin dans la société indienne passe par la progression du niveau de vie et d’éducation, une meilleure distribution et une plus grande proximité avec le produit.

Dupliquer un modèle performant

Hormis les dégustations « très simples » mises en place à travers le pays – « nous visons à en organiser environ 2,000 par an, sans compter celles que nous réalisons à Sula Vineyards, soit 10 000 au total » - Rajeev Samant mise beaucoup sur son pôle oenotouristique à Sula. Les grands médias internationaux – Time, Newsweek, CNN, la BBC et Bloomberg pour ne citer qu’eux –  lui attribuent le rôle d’initiateur de la consommation de vin en Inde. C’est en grande partie grâce à ses efforts oenotouristiques. « Aujourd’hui, si vous voulez créer un modèle performant en matière de production de vin, vous ne pouvez pas négliger l’oenotourisme. La plupart des producteurs les plus prospères, notamment ceux du Nouveau Monde, y ont beaucoup mis l’accent ». S’inspirant de la Californie, où il a travaillé, Rajeev Samant compte drainer, entre autres, une partie de la population, relativement proche, de Mumbai pour favoriser son développement oenotouristique. « C’est le moyen idéal pour initier les gens aux vins. Dans un cadre idyllique, ils savourent leur premier verre de vin et ne l’oublient jamais ». Il compte dupliquer ce modèle dans les vignobles proches de Bangalore. « Nous ne possédons pas d’installations vinicoles à Karnataka. Etant donné le succès que nous avons connu à Nashik, il serait tout à fait logique que nous nous implantions dans une autre région viticole. Ce sera sans doute notre plus grand projet au cours des trois années à venir ».

Un potentiel incommensurable

A Nashik, le berceau de l’entreprise, Rajeev Samant compte calquer l’augmentation de sa production sur celle de la consommation, qui tourne autour de 15 à 20% par an. « Ce sera un véritable défi car nous voulons évidemment maintenir le même niveau qualitatif et continuer de faire évoluer notre structure touristique ». Tout en élaborant sa propre eau de vie, primée lors de l’International Spirits Challenge à Londres cette année et fruit d’une collaboration, aujourd’hui terminée, avec Rémy Martin. « Il n’y a pas de limite », se réjouit l’homme d’affaires avisé. « Le vin représente tout au plus 1% de la consommation d’alcool en Inde. L’évolution démographique du pays est très favorable et nous n’aurons aucun mal à recruter de nouveaux consommateurs ». Sans parler du potentiel des vins indiens à l’export. On a vite fait de partager l’enthousiasme contagieux de Rajeev Samant… 

Tags : Inde
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