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Stéphane Derononcourt, consultant de la contre-viticulture
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Stéphane Derononcourt, consultant de la contre-viticulture

Par Alexandre Abellan Le 14 octobre 2015
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Stéphane Derononcourt, consultant de la contre-viticulture
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téphane Derenoncourt n'en fait pas mystère, c'est pour que rien ne lui échappe qu'il s'est impliqué, durant 18 mois, dans la rédaction du livre retraçant son ascension (d'ouvrier viticole chti à référence du conseil viti-vinicole). S'il a été séduit par une approche décalée et mis un point d'honneur à souligner le travail quotidien de ses collaborateurs, il a surtout veillé à maîtriser, ou plutôt retenir, ce qui était dévoilé dans cette biographie. Ne mâchant pas ses mots quand il est question d'idéal oenologique, il est d'une pudeur toute mesurée dès lors qu'il s'agit de lui-même.

Sous la plume de Claire Brosse et les objectifs de Christophe Goussard, deux de ses proches, il se dévoile donc à pas comptés dans le livre Wine on Tour. Mais pas sans panache, ce livre alliant biographie et photographies autorisées dans une approche on ne peut plus rock'n roll. Adoptant un format de 33 tours, l'ouvrage file en effet le parallèle entre équipes de consultants viti-vinicoles en tournée mondiale et groupes de rock en représentation internationale.

Une figure imposée qui atteste paradoxalement de l'anti-conformisme de Stéphane Derononcourt. Se définissant spontanément comme un marginal, l'autodidacte septentrional se retrouve aussi bien dans la contre-culture musicale que dans la remise en question de l'ordre bordelais établi. Avec le timbre de Tom Waits et l'ironie de Keith Richards, Stéphane Derenoncourt retrace son parcours et ses convictions. Ici sur une bande-son millésimée que l'intéressé n'approuverait probablement pas.

 

Sortant en librairie ce 22 octobre, le livre Wine on Tour est publié aux éditions La Fabrique de l’Epure (pour un prix de vente de 32 euros).

1963, Walk right in (The Rooftop Singers)

Né sur les premiers albums des Beatles, Stéphane Derononcourt n'a pas trempé dans le yéyé gentillet, mais s'est forgé avec un rock encore transgressif. « Le rock, c'est une contre-culture, en dehors des cases et des choses établies. C'est une façon de s'identifier et de revendiquer des valeurs nouvelles » explique celui qui se fait encore guitariste à l'occasion. Si sa jeunesse bercée par le hard-rock et le punk soutient cet anticonformisme du rock, Stéphane Derononcourt constate que cet esprit originel a cédé à une mode de consommation standardisée. Un désenchantement qui ne l'empêche pas d'être ravi de voir son ouvrage  préfacé par Iggy Pop (avec un dessin tenant plus de l'amicale dédicace). Malgré ses compromissions commerciales, l'iguane reste le symbole vivant de la force brute du rock. Et comme Iggy Pop n'a gardé de ses nombreuses addictions passées que le plaisir de la dégustationdu  vin, Wine on Tour ne pouvait être mieux parrainé.

Avec ses déplacements incessants, et leur succession fractionnée de rendez-vous, la musique joue toujours un rôle central dans la vie de Stéphane Derenoncourt. Si ses goûts sont devenus éclectiques, il reconnaît être resté fidèle à ses goûts adolescents et s'être peu ouvert aux musiques contemporaines. Il clôt le débat en jugeant que les arrangements électroniques ne sont tout simplement pas musicaux. C'est avec la même intégrité qu'il « n'adhére pas du tout aux vins natures. Pour moi, un vin reste un produit de la civilisation, très esthétique. Qu'on utilise des idées pour défendre un vin me va, mais que l'on utilise un vin pour défendre des idées... »

1982, Chacun fait ce qui lui plaît (Chagrin d'Amour)

Si Wine on Tour est un jour adapté pour le cinéma, nul doute que l'arrivée de Stéphane Derononcourt dans le vignoble bordelais se fera sur l'air des Corons de Pierre Bachelet ou de l'Aventurier d'Indochine. Se défendant d'avoir jamais eu ces goûts musicaux*, le principal intéressé préférerait surement Just Another Sucker on the Vine de Tom Waits.

Quittant Dunkerque pour changer de vie, il se trouve dans les vignes au mois de septembre, pile à l'heure des vendanges. Tombé dans un domaine en biodynamie, il rentre presque par hasard dans le monde des viticultures alternatives. « Sans même avoir été dégouté de la chimie » s'amuse-t-il. Désormais installé « sans préméditations » dans le vignoble girondin, il y revendique « une carrière menée sans réseau. J'ai à mon actif un certain bilan qui peut imposer plus ou moins de respect. »

Gravissant progressivement les échelons de la production, il s'est bien gardé de trop se mêler au monde bordelais. « Mes clients ne me demandent pas d'être mondain, mais de leur faire de bons vins. D'ailleurs, si l'on m'envoyait des invitations à mes débuts, je n'en reçois plus aujourd'hui » lâche-t-il dans un sourire des plus satisfaits.

1999, Tomber la chemise (Zebda)

Nouvelle rupture de rythme à la veille du millénaire dans le parcours de Stéphane Derononcourt : « j'ai démissionné de mon poste, j'ai lancé ma société de conseil, j'ai acheté un domaine et je me suis marié... Le tout en trois mois ! » En prenant à la fois le pari de la carrière solo (le domaine de l'A en Côtes de Castillon) et du groupe  (société Vignerons Consultants, depuis rebaptisée Derenoncourt Consultants), il sort de sa zone de confort pour se fixer une épée de Damoclès : aucun droit à l'erreur pour l'autodidacte. N'étant pas muni du Diplôme National d'OEnologue, il s'est longtemps tourmenté en se voyant comme un imposteur.

N'y voyant pas un complexe d'infériorité, il souligne que ce manque de légitimité a consolidé sa méthode, basée sur l'observation. Ayant réalisé des actions et métiers intervenant le long de la production des vins, il a pu juger en pratique de l'importance des étapes intermédiaires les moins nobles et les plus pénibles. Pour lui, « tout est lié, on ne peut rien disséquer. C'est un non-sens que d'avoir dans un domaine un directeur technique pour la vigne et un autre pour le vin. Avec le consulting, nous apportons un lien qui est nécessaire. »

Semblant moins rock et plus jazz, il adopte finalement un rôle d'interprète face à la partition géoclimatique qu'est un millésime dans un terroir. « Ma méthode met en avant l'expression du lieu. Pour moi le vin est identitaire, il n'imprime pas le style du vinificateur. Du moins, on ne m'a encore jamais fait ce reproche » s'exclame-t-il, touchant immédiatement du bois pour que cela dure.

2015, Collaborations don't work (FFS)

Roulant désormais sa bosse dans 17 pays et bien plus de vignobles qui le plébiscitent, le consultant-vigneron retrouve une vie casanière dès lors qu'il est de retour à Bordeaux. Ce qui ne l'empêche pas de conserver sa démarche de marginal. Et un esprit rock'n roll jusque dans la gestion de son entreprise. Derenoncourt Consultants réunit aujourd'hui 15 employés, ou plutôt des associés, chacun recevant chaque année des parts sociales. « L'idée est simple, je souhaite une entreprise familiale, avec beaucoup de proximité. Pour que cela fonctionne, il faut une philosophie de production établie. Avec cette ligne de conduite, les gens ne travaillent pas pour eux, mais pour l'idée de l'entreprise » explique-t-il avec des accents d'ancien baba-cool.

S'il pouvait se prendre pour le grand frère de ses collaborateurs en 1999, Stéphane Derenoncourt se sent désormais une étoffe plus que paternelle avec l'arrivée d'une troisième génération de consultants. Pour eux comme pour leurs prédécesseurs, il leur propose de peaufiner leur formation, leur imposant pendant au moins un cycle (de la taille à la mise en bouteilles d'un millésime) de ne faire qu'écouter et pratiques, sans donner de conseils et en expérimentant sur le domaine de l'A.

Se plaçant en ancien de sa société de conseil, il prépare la transmission de l'outil de travail qu'il a bâti avec trois associés fondateurs (Simon Blanchard, Julien Lavenu et Frédéric Massie). « Ce qui va m'inquiéter dans la façon de faire le métier, c'est la condition physique qui est nécessaire. Avec les podomètres, on s'aperçoit maintenant que l'on parcourt 15 à 25 km par jour pour déguster des raisins en saison » constate-t-il, se trouvant déjà moins sauvage et plus orienté vers la communication. Car son espoir assumé est que la marque Derononcourt devienne un signe de qualité durable et reconnu par les consommateurs. Ce qui fait finalement plus ressembler sa société à un label indépendant qu'à un groupe de rock alternatif.

 

 

 

[Photo de Stéphane Derenoncourt : Christophe Goussard (Derononcourt Consultants) ; Illustrations : Fontana, Barclay, Universal Music et Domino Records]

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