n cours de vendanges (le cabernet commence à remplacer le merlot dans les conquets bordelais), le millésime 2015 jouit déjà des comparaisons les plus flatteuses : des maturités qui n’auraient plus été vues depuis 2010 pour l’oenologue-conseil Michel Rolland (laboratoire Rolland), voire des traits rappelant 2009 pour Pascal Hénot (Enosens). Confirmant le bon niveau qualitatif du millésime, le consultant viticole David Pernet (laboratoire Sovivins) tempère les ardeurs. « C’est un très bon millésime, qui n'est pas inférieur à 1995 et 1985, qui ont contribué à la bonne image des millésimes en 5. Mais on ne peut pas dire qu’il soit exceptionnel à l’échelle de l’ensemble de Bordeaux » précise-t-il.
Plus que la météo homogènement chaude et sèche en juillet, ce sont les pluies disparates d’août et septembre qui ont marqué le millésime pour Sovivins. Avec des régimes hydriques variant « du simple au quintuple entre la véraison et le 15 septembre », les terroirs girondins n’ont pas tous été logés à la même enseigne explique David Pernet. Il repère ainsi des parcours hydriques idéaux à Saint-Émilion, au Nord de Pessac-Léognan et dans le Sud du Médoc (avec des fins de maturation et début de sénescence végétative synchrones). Quant aux grappes de cabernet sauvignon actuellement récoltées, il souligne que la météo des dernières semaines leur aura permis de « rattraper du terrain du point de vue de leur potentiel qualitatif ».
Dans son rapport du millésime (cliquer ici pour y accéder), Sovivins souligne également que pour être exceptionnel, un millésime bordelais doit reposer sur de solides bases en termes d’acidité, de degrés alcooliques, de trame tannique et de complexité aromatique. Des caractères qui ne sont pas toujours réunis pour les Bordeaux 2015. Désormais validés par la récolte, les contrôles de maturité ont dressé précocement le profil d’un millésime peu acide, sans pour autant présenter des concentrations en sucre excessives. Sur les terroirs arrosés, la charge tannique est peu importante, pour ne pas dire diluée. « Les vins seront assez faciles dans leur jeunesse, et appréciés pour leurs faibles acidités des tannins globalement fins. Mais on n’aura pas l’exubérance de la palette aromatique et la tension d’un 2010 » avance David Pernet.
Si le mythe des millésimes en 5 en sort écorné, 2015 ne manque cependant pas de caractéristiques remarquables. A commencer par la maturité des pépins : « très bonne ! Cela contribue à la charge tannique peu importante, mais cela permettra surtout des macérations importantes, sans craindre de dureté » détaille David Pernet. Et la floraison 2015 devrait marquer les esprits, rappelant au consultant celle de 2005.
Basé à Martillac, le laboratoire Sovivins suit 1 000 hectares de vigne, pour une soixantaine de propriétés bordelaises (dont la moitié en suivi annuel).
[Photo de David Pernet : Sovivins]