a présence du géant chinois Changyu à Vinexpo Bordeaux pour la première fois cette année n’est pas passée inaperçue. Et pour cause. La société avait la ferme intention de montrer au monde du vin qu’elle compte conquérir le marché international.
Un désir d'échangeSi Vinexpo est une vitrine pour le monde du vin, le groupe chinois Changyu comptait bien s’en servir comme telle. Exposant pour la première fois à Bordeaux, le groupe souhaitait mettre en exergue sa stratégie export et faire valoir son réseau de distribution déjà étendu à travers le monde. En Europe, la société commercialise des produits tels que le vin rouge sec Changyu Jiebaina, le Château Changyu Moser XV Ningxia et le Vidal Icewine du Château Changyu Golden Ice Wine Valley à Liaoning. Des produits qui n’ont rien à envier à ceux d’autres pays producteurs et qui ont séduit bon nombre de distributeurs et non des moindres : Berry Bros & Rudd, Waitrose et Selfridges au Royaume-Uni, Galleria en Allemagne et Alko en Finlande, pour ne citer qu’eux. « Nous voulons sensibiliser les professionnels à notre entreprise, aux vins chinois et à la Chine », précisait Tan Shaoyun, directrice export. « Nous voulons échanger, communiquer et co-opérer avec d’autres entreprises vinicoles dans le monde. Nous pensons que le marché chinois doit proposer des vins du monde entier et vice versa ».
L'acquisition d'un château bordelais en septembre ?Pour impulser son développement international, Changyu ne lésine pas sur les moyens et affiche un plan d’acquisition ambitieux. La société est déjà propriétaire de Changyu Kely en Nouvelle-Zélande et Changyu Roullet-Fransac à Cognac. Selon des articles de presse, repris sur son site internet, elle devrait annoncer l’acquisition d’un château dans le Bordelais au mois de septembre prochain et va « continuer à chercher d’autres possibilités de rachat sur ses marchés cible ». Il s’agirait notamment de la France, l’Italie, l’Espagne, l’Australie et l’Amérique où sont situées des entreprises d’importation fondées par Changyu. Celui-ci viserait ainsi à détenir, « dix châteaux à domicile et dix châteaux à l’étranger ». Six châteaux sont désormais terminés en Chine : Yantai Château Changyu-Castel, Château Changyu Golden Ice Wine Valley à Liaoning, Beijing Changyu AFIP Global, Château Changyu Moser XV Ningxia, Château Changyu Baron Balboa Xinjiang et Château Changyu Rena Shaanxi. Par ailleurs, Tinlot Wine Château et Koyac Brandy Château, actuellement en phase de finalisation, devraient entrer en production au cours de l’année à venir.
Plus grand centre oenotouristique au mondeCes deux derniers font partie d’un projet pharaonique mis en œuvre par Changyu : la cité internationale du vin à Yantai. Ce complexe gigantesque s’articule autour de sept zones thématiques : un centre de vinification, un institut de recherche sur la vigne et le vin, Château Tinlot (vin), Château Koyac (eaux-de-vie de vin), une plate-forme commerciale Pioneer International Wine Trading Centre, un village entier dédié au vin – Haina – avec hôtels 5 étoiles, bars, théâtre et spa, et enfin un vignoble pédagogique. Nécessitant un investissement total de 6 milliards de yuan (soit environ 860 millions d’euros), le site couvre 400 hectares, dont 250 hectares de vignes, et est appelé à devenir le plus grand centre oenotouristique du monde avec 1 million de visiteurs attendus par an.
Et le plus grand centre de vinificationAu-delà de son aspect touristique à la Disneyland, où l’inspiration française est particulièrement visible à travers des châteaux sortis tout droit de la Loire, un village au caractère bourguignon et même un arc de triomphe, la cité internationale du vin est destinée à jouer un rôle important dans l’élaboration du vin en Chine. Vitrine du savoir-faire rapidement acquis par les Chinois – à la fois à l’attention de la population locale et des étrangers – ce pôle doit contribuer aux efforts de recherche et développement dédiés au secteur vitivinicole chinois. Un vignoble expérimental comportant plus de 200 cépages devra permettre aux professionnels chinois de cerner les variétés qui s’adaptent le mieux aux différents climats en Chine. A cela s’ajoute un centre de recherche logé dans un immeuble de 19 étages en forme de barrique et de flûtes à Champagne qui abrite, entre autres, un musée œnologique et un espace de dégustation. Un centre de vinification sur 220 000 m2 – également en forme de barriques géantes – conjugué à des chais d’élevage qui s’étendent sur 27 000 m2 et à 15 chaînes d’embouteillage dont la plus rapide aura une capacité de 25 000 bouteilles/heure, symbolisent les ambitions de Changyu, et de la Chine, en matière de production de vins. « Le centre de vinification servira dans un premier temps – dès la fin de cette année - à finir et à mettre en bouteille des vins pour ensuite assurer l’ensemble du processus d’élaboration dans un deuxième temps », a souligné le Dr Li Jiming, chef de cave, lors de Vinexpo. Avant d’ajouter : « A terme, la cité deviendra le plus grand centre de vinification au monde ».
Une quête de notoriété, mais aussi d'échanges commerciauxA travers sa cité internationale du vin, qui doit ouvrir ses portes officiellement en 2016, Changyu cherche à asseoir sa réputation de producteur de vin, et celle de la Chine toute entière. Mais si ce projet symbolise pleinement sa quête de notoriété internationale, il répond également à des objectifs plus pragmatiques, ceux de promouvoir des échanges à double sens entre la Chine et ses partenaires commerciaux et de doter le pays d’un secteur vitivinicole de pointe. « Le secteur vitivinicole chinois a un bel avenir devant lui », prédit le Dr Li Jiming. « Mais la Chine offre également de formidables opportunités pour les vins étrangers. C’est cette dualité et cette réciprocité que nous voulons mettre en avant ».