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De nombreux aspects de la qualité finale des vins comme la stabilité de la couleur, l’équilibre en bouche ou le potentiel de vieillissement, sont directement liés à la gestion des polyphénols lors de l’élaboration des vins. Pourtant, le suivi de l’évolution des polyphénols pendant la maturation des raisins et au cours de la vinification reste peu employé en cave, car l’analyse des polyphénols telle qu’habituellement pratiquée en laboratoire reste difficile à mettre en place et peu rapide.
Le travail mené par Nomacorc sur l’application de méthodes d’analyse électrochimique en œnologie a permis de rendre accessible, directement au chai, l’analyse des composés phénoliques sur raisins, sur moûts et sur vin avec le lancement du PolyScan B200. Le vinificateur dispose ainsi d’un nouvel outil permettant d’adapter les choix techniques et de gérer plus efficacement les pratiques d’élaboration choisies en fonction du contenu phénolique. Différents test réalisés durant plusieurs millésimes ont permis notamment de montrer l’utilité de cet appareil dans la caractérisation du contenu phénolique des raisins ainsi que dans la gestion et le suivi d’étapes pré-fermentaires comme par exemple le pressurage ou encore l’application d’un apport d’oxygène sur moût.
[Crédit photo : Nomacorc]
Connaître le profil phénolique des raisins
La composition phénolique des raisins diffère selon le cépage, le lieu géographique, les pratiques viticoles, le millésime ou encore le degré de maturité, ce qui rend chaque lot de raisins spécifique. L’électrochimie est une méthode employée en laboratoire pour analyser les polyphénols des raisins, mais dont l’application au chai reste difficile car les instruments de mesure doivent être re-calibrés à chaque mesure. L’utilisation d’électrodes jetables pré-calibrées avec l’appareil PolyScan B200 permet d’éliminer ce problème et rend ainsi cette analyse praticable directement en cave. Cet analyseur permet de caractériser le profil phénolique des raisins à travers la mesure des polyphénols facilement oxydables (indice EasyOx), et des polyphénols totaux (indice PhenOx). Plusieurs tests réalisés avec l’appareil ont permis d’observer les différences de profil phénolique des raisins dans diverses situations. Par exemple, des mesures réalisées sur différents cépages provenant tous d’une même parcelle ont montré que les raisins de Riesling et de Grenache blanc présentaient des niveaux d’EasyOx élevés par rapport à d’autres cépages de cette parcelle comme le Viognier ou encore la Marsanne. D’autres mesures, réalisées sur plusieurs parcelles de Chardonnay à maturité technologique, ont montré que la charge en polyphénols facilement oxydables peut varier largement selon l’origine des raisins. Ainsi, la spécificité du profil phénolique des raisins, liée au millésime, au cépage ou à l’origine des raisins, peut désormais être mesurée en routine lors des contrôles de maturité habituels par exemple.
Adapter le choix de l'itinéraire technique
En analysant le profil phénolique de leurs raisins, les caves peuvent mieux adapter les opérations de vinification et cibler le protocole en fonction des spécificités du raisin en question. Par exemple, selon la richesse en composés facilement oxydables, la protection du moût vis-à-vis de l’oxygène sera différente, de même que le choix et les modalités d’application de traitements visant à éliminer ces composés oxydables. Des moûts de raisin contenant des niveaux plus élevés d’EasyOx peuvent certainement bénéficier de traitements visant à éliminer une partie de ces composés facilement oxydables, comme le collage ou l’oxydation ménagée par exemple. En revanche, pour des jus ayant des teneurs en EasyOx relativement faibles d’après la mesure, des doses de colles moins élevées peuvent être utilisées, ce qui peut permettre de réaliser des économies non négligeables.
Optimiser le pressurage
Une autre caractéristique de cet appareil de mesure est de permettre d’effectuer l’analyse du profil phénolique d’un échantillon à tout moment de la vinification. Il est donc possible d’évaluer rapidement le contenu phénolique du moût et de suivre les changements de composition qui se déroulent au cours d’un procédé, ce qui peut permettre de prendre des décisions plus efficaces. Des analyses réalisées sur un moût de Grenache noir et de Cinsault lors de cycles de pressurage pour l’élaboration de vins rosés ont permis d’observer, grâce au suivi des indices EasyOx et PhenOx, l’évolution du profil phénolique de ces deux moûts en fonction de la pression appliquée et du stade de pressurage. Dans le cas du Grenache noir, les niveaux d’EasyOx et de Phenox étaient relativement similaires jusqu’à 1,2 bars. Au-delà de cette pression, l’analyse montrait une nette augmentation des deux indices et donc une composition phénolique significativement différente pour cette fraction de presse. Dans le cas du moût de Cinsault, ce changement significatif de profil phénolique, également caractérisé par une nette augmentation des indices EasyOx et Phenox, a été observé à partir de 2 bars de pression. Ces résultats montrent qu’il est certainement possible de valoriser davantage de fraction de presse pour ce moût de Cinsault, par rapport à ce moût de Grenache, en donnant également des indications utiles pour adapter l’itinéraire de vinification selon le profil analysé.
Gérer l'oxygénation des moûts
L'application de fortes doses d'oxygène (généralement plusieurs saturations) sur moût est une technique qui permet de supprimer les composés phénoliques facilement oxydables dans les moûts de raisins blancs, afin d'éviter que ces composés participent à des réactions oxydatives dans le moût fini. Toutefois, une même dose d’oxygène apportée à deux moûts différents n’a pas le même effet sur l’élimination des composés facilement oxydables. Par exemple, des essais d’hyperoxygénation réalisés sur deux moûts blancs différents, ont montré que pour atteindre des valeurs suffisamment faibles d’EasyOx, trois saturations d’oxygène se sont avérées nécessaires sur le moût de Riesling, tandis que deux saturations étaient suffisantes sur le moût de Chardonnay. Cette différence de réponse met l'accent sur la nécessité d’adapter les doses employées en fonction des caractéristiques du moût et de leur réactivité. La capacité d'évaluer rapidement le degré effectif d'élimination phénolique durant le processus permet aussi d'éviter les traitements excessifs ou insuffisants. Ainsi, en évaluant l’impact réel d’une pratique sur le profil phénolique, le vinificateur peut optimiser ses choix et accéder finalement à une plus grande précision dans l’élaboration de ses vins.
