Revue de presse : Le vin est un roman

’était à Montpellier la semaine du vin bio. Qu’est-ce que l’Américain Eric Azimov et le Britannique Matt Walls attendent du vin ? Robert Parker qui avait fait des « prédictions » pour l’année 2025 avait-il raison ? Que buvait Churchill ? 

Que vive le vin bio

« Montpellier, le carton du vin bio », titre le site 20 minutes.fr. « Millésime bio : succès confirmé pour la 22ème édition du salon », entonne Terre de Vins qui fait le décompte : « Une fréquentation en hausse de +12,94% par rapport à l’édition 2014, qui vient confirmer le pouvoir d’attraction des vins bio du monde entier auprès des professionnels du vin (acheteurs, importateurs, négociants, cavistes, journalistes…) et entérine le « leadership » de Millésime Bio en tant que plateforme mondiale d’échanges dans le secteur de la viticulture biologique ». La 22ème édition de Millesime bio qui a fermé ses portes à Montpellier mercredi dernier est l’occasion de mesurer la croissance de ce qui s’affirme comme un segment du marché du vin et plus strictement un engagement environnemental. « Le vin bio séduit de plus en plus de Français », observe la RVF. La RVF cite Patrick Guiraud, président de Sudvinbio, l'organisateur de Millésime bio : « Le vin bio, 11% des ventes de produits alimentaires bio, est la famille biologique qui a connu le taux de croissance le plus élevé en France ». Vitisphere consacre un dossier au sujet et un long entretien avec Richard Doughty, vigneron à Bergerac qui préside France Vin Bio (fédération interprofessionnelle créée en 2013), la commission viticole de l'Institut Technique de l'Agriculture Biologique (ITAB). Voici ce qu’il dit : « Vingt ans en arrière, j'aurais eu du mal à imaginer que le bio représenterait 8 % du vignoble français (…) D'après les chiffres de l'Agence Bio, le marché qui progresse le plus pour les vins bio français, c'est la France ! Voilà un signe très positif, même exceptionnellement positif ! Depuis que je fais du vin, on voit que les achats diminuent, que les consommateurs vieillissent... Et on se demande si l'on ne fait pas un métier du passé. Avec cette tendance, on peut se projeter dans l'avenir. Et il faut rentrer cette mentalité dans le vignoble. Je pense, je suis même convaincu, que les pertes françaises de parts de marchés sont dues à une attitude décliniste. Il faut remplacer le défaitisme par la confiance et la prise de risque pour investir dans l'avenir ». L’avenir est, dans l’immédiat, européen. « Dans la liste des plus grandes surfaces de vignes cultivées en bio, l'Espagne mène historiquement. Le pays a dépassé, en 2012, la barre des 80 000 ha, suivie par la France (64 000 hectares), l'Italie (57 000 hectares) et les Etats-Unis (11 448 hectares) », rapporte Vitisphere. Et du côté de la consommation, « la France est le premier marché en valeur (chiffre d'affaires hors restauration : 413 millions d’euros pour 2012 (+15% vs2011 et +28% vs2010) ». Il est peu question d’éthique pourtant à l’origine de la démarche des vignerons.

Le vin selon Eric Asimov et Matt Walls

L’un est Américain et tient de haute main la rubrique vin du New York Times. L’autre est britannique et s’exprime sur le site de Tim Atkin. Eric Azimov et Matt Walls sont de ceux que le vin fait penser. Ils produisent l’un et l’autre cette semaine une chronique personnelle sur leur relation au vin, peut-être annonciatrice d’un mouvement de fond. « En matière de vin, je suis un romantique. Et je le revendique haut et fort », commence Eric Azimov (http://www.nytimes.com/2015/01/28/dining/the-romance-of-wine.html?ref=dining&_r=1). Il poursuit : « D’aucuns m’opposeront un manque de rigueur qui me ferait tomber dans le panneau des habillages marketing. Je leur réponds : foutaise ! Un grand vin est par nature mystérieux, imprévisible et peut-être même insondable. (…) J’aime ceux qui me font abandonner mes illusions d’expert omniscient (…) et me font vivre les nuances de l’environnement et du millésime. (…) Je le vis comme un concert. Et qu’allez-vous chercher dans un concert ? Une reproduction note à note d’un enregistrement ou bien l’inspiration du moment, pour le meilleur et pour le pire ? ». Eric Azimov veut bien le pire pour connaître le meilleur. Prenant lui aussi les théories marketing à rebrousse-poil, Matt Walls (http://www.timatkin.com/articles?1492) exprime en d’autres termes à peu près la même idée : « Tout n’obéit pas au goût du consommateur. Le distributeur Naked Wines encourage ses producteurs à s’engager directement avec leurs clients et à tenir compter de leurs commentaires pour faire le vin. Cela ne me dit rien qui vaille. Des observateurs comme Sir John Hegarty (ndlr, publicitaire génial également propriétaire d’un domaine en Languedoc), suggèrent également aux vignerons de se mettre dans la peau des consommateurs au moment d’élaborer leurs vins. J’espère bien qu’ils n’en feront rien. Les vins que j’aime aujourd’hui ne sont pas ceux que j’aimais il y a 15 ans. Si l’on m’avait demandé ce que je pensais d’un chablis, j’aurais répondu trop acide. Aujourd’hui j’aime leur tension (…) Je ne veux pas de vin qui sonde mon goût. Les vins que je respecte le plus sont ceux dont il me faut du temps pour les comprendre. Ce n’est pas à eux de s’adapter à moi. C’est à moi de m’adapter à eux. Le fait qu’ils n’obéissent pas aux sirènes du marché leur donne de l’authenticité et de la rémanence ». 

Dix ans après, Robert Parker avait-il raison ?

Le site Idealwine (http://www.idealwine.net/2015/01/21/robert-parker-dix-ans-apres-ses-predictions-pour-2015-avaient-elles-du-nez/) se livre cette semaine à un exercice rétrospectif intéressant : « Rober Parker : dix ans après, ses prédictions pour 2015 avaient-elles du nez ? ». Le pape californien s’était alors exprimé sur un peu tout : les bouchons, le bois, la spéculation sur les grands vins, l’influence d’Internet. Il prédisait la « France dans la tourmente » et voyait l’Espagne comme « un pays phare ». Idealwine reprend chacun de ses points et y répond par « vrai » ou « faux ». On se réjouira que le cataclysme des vins français annoncé par le Californien n’est pas. « Sans vouloir être chauvin, les vins français restent au sommet de la qualité, même si de nombreux vins d’autres pays se situent au même niveau comme cela a presque toujours été le cas et, s’il est vrai que les prix atteints par les bouteilles issues des plus grands domaines donnent le vertige, de nombreux vignerons dans les différentes régions de l’Hexagone proposent des vins excellents à des prix très compétitifs », commente Idealwine. L’année 2015 commence bien. 

Les alcools de Churchill

Les Anglais fêtent avec ferveur le 50ème anniversaire de Winston Churchill dont paraît par ailleurs en France une biographie passionnante. Hyperactif, cyclothymique, Winston Churchill en plus de diriger le Royaume Uni et le débarquement, était peintre, écrivain, fumeur de cigares, buveur de whisky, eet de vin. The Independant publie cette semaine une petite revue de ceux qu’il aimait. « Churchill était aussi réputé pour ses excès de consommation d’alcool et ne s’en cachait pas », écrit Warrent Dockter. « Il n’appréciait pas les cocktails sucrés américains, mais était connu pour boire au petit déjeuner un vin blanc allemand qu’il appelait Hock ». Il avait coutume de dire que les quatre choses essentielles dans la vie étaient «les bains chauds, le champagne frappé, les pois frais et le vieux cognac ».