Chili : concha y Toro veut se positionner comme une référence mondiale en recherche appliquée

l aura fallu près de quinze ans de réflexions, un investissement initial de 5 millions USD et des incitations fiscales importantes, pour que le nouveau centre de recherche et d’innovation de Concha y Toro puisse voir le jour fin décembre dans la vallée du Maule. Désormais, le quatrième groupe vinicole mondial entend s’appuyer sur le centre pour accroître la compétitivité, non seulement de l’entreprise elle-même, mais aussi de l’ensemble de la filière chilienne.

 

 

 

Photo : Le nouveau centre de recherche et d'innovation de Concha y Toro

Crédit photo : Concha y Toro 

1500 m2 dédiés à la recherche et à la connaissance

Sur 1 500m2, le centre abrite un laboratoire équipé d’un matériel d’analyses de pointe, un chai de vinification expérimental et des salles de dégustation et de conférence. Le laboratoire comporte, entre autres, des unités dédiées à la biologie moléculaire, l’analyse foliaire, l’étude des sols, l’analyse sensorielle et la multiplication des plants in vitro. Avec une capacité de production de 200 tonnes de raisins, le chai de vinification sera destiné notamment à réaliser des micro-vinifications grâce à 72 cuves en inox thermo-régulées. A celles-ci s’ajoutent 140 cuves d’élevage d’une capacité allant de 50 à 100 litres. Enfin, des ateliers et séminaires seront organisés dans un espace dédié afin de promouvoir les échanges entre professionnels, et entre scientifiques et professionnels. Une bibliothèque et des salles de réunion seront également mises à la disposition des acteurs de la filière.

Miser sur les partenariats privés et universitaires

« Concha y Toro a toujours été impliqué dans la recherche », rappelle Blanca Bustamente, responsable communication de l’entreprise et membre du conseil d’administration du Centre (le conseil est présidé par Rafael Guilisasti, vice-président de Concha y Toro, et dirigé par Gérard Casaubon). « Jusqu’à présent, les études ont été menées séparément dans les différentes branches de l’entreprise. Désormais, une seule structure fera le lien entre elles ». Le groupe chilien collabore avec la pépinière française Mercier depuis 2001. Le processus de réflexion autour du nouveau centre s’est d’ailleurs concrétisé avec une visite de ses installations en France. En 2013, Concha y Toro a mis en place un partenariat avec l’Université de Californie à Davis et souhaite multiplier les collaborations avec universités et entreprises à travers le monde. C’est en faisant appel aux compétences extérieures qu’il entend maîtriser les coûts de la recherche – dont le montant annuel prévisionnel n’a pas été dévoilé par l’entreprise - mais aussi accélérer l’évolution de la filière chilienne grâce aux échanges technologiques internationaux.  

La recherche dictée par l'intégration verticale

Concha y Toro possède 10 700 hectares de vignes au Chili, en Argentine et en Californie, le hissant au deuxième rang mondial pour la superficie de son vignoble en propre. Avec des ventes annuelles de 3 millions d’hectolitres, le groupe va planter en 2014-2015 environ 280 hectares de vignes, principalement du chardonnay, du cabernet-sauvignon, du merlot et du sauvignon blanc, pour faire face à sa croissance et mieux maîtriser ses approvisionnements. Sa stratégie d’intégration verticale l’amène à focaliser une grande partie de ses recherches sur l’amont. Il détient d’ailleurs sa propre pépinière depuis 2000. Ainsi, deux projets de recherche ont déjà été lancés sous l’égide du nouveau centre : l’évaluation de différents clones de cabernet-sauvignon, notamment en rapport avec la zone de Cauquenes dans la Vallée du Maule, et les stratégies d’effeuillage et techniques de protection contre l’exposition solaire. « Au total, cinq grands domaines de recherche seront explorés : l’étude du matériel génétique ; la viticulture (plants, sols, ressources hydriques…) dont des recherches sur les maladies du bois ; le processus de vinification jusqu’à la mise en bouteille ; la conception des produits et le lancement de nouveautés ; et les études de marché, initiative inédite chez nous mais imposée par le dynamisme du marché mondial », précise Blanca Bustamente.  

Photo : Blanca Bustamente, membre du conseil d'administration du nouveau centre Crédit photo : Concha y Toro

Orienter l'ensemble de la filière

Principal exportateur sud-américain de vins, Concha y Toro souhaite positionner son nouveau centre d’innovation et de recherche – qualifié dans la presse locale de pionnier en Amérique latine – comme une plate-forme accessible à l’ensemble de la filière. Un vœu pieu ? « Certes, il s’agit d’une initiative privée individuelle, mais en tant qu’acteur majeur du secteur vitivinicole chilien, nous connaissons précisément les besoins de celui-ci et menons une approche de terrain. Les défis auxquels nous sommes confrontés et donc nos priorités de recherche sont partagés par tous les professionnels chiliens », se défend la responsable communication. « Les recherches universitaires peuvent s’avérer trop théoriques et difficiles à mettre en œuvre. Pour notre part, nous allons mener des recherches appliquées, générant des retombées rapides. Certains résultats resteront bien sûr confidentiels et à l’usage exclusif de Concha y Toro – il en est de même dans tout centre de recherche – mais nous nous évertuerons à divulguer le plus largement possible les résultats de nos travaux ». Les quelque 830 viticulteurs indépendants qui apportent leurs raisins à Concha y Toro seront les premiers à bénéficier des recherches de cette « petite université au sein de l’entreprise ». Néanmoins, Blanca Bustamente est catégorique : « Si nous parvenons à obtenir des résultats sur la meilleure adéquation cépage-terroir et des innovations variétales et produits, nous pourrons orienter l’ensemble des producteurs dans la bonne direction et améliorer la compétitivité de la filière nationale dans un souci d’excellence ».