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Florence Cathiard : « la vente au chai n'est pas de l'œnotourisme, il faut proposer un circuit complet »
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Florence Cathiard : « la vente au chai n'est pas de l'œnotourisme, il faut proposer un circuit complet »

Par Alexandre Abellan Le 07 octobre 2014
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Florence Cathiard : « la vente au chai n'est pas de l'œnotourisme, il faut proposer un circuit complet »
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 Chaque petit domaine de vignerons est une goutte de civilisation dans un monde violent » estime Florence Cathiard, esthète depuis 24 ans du château Smith Haut Lafitte (grand cru classé de Graves, accueillant les Sources de Caudalie) et nouvelle pasionaria de la cause Å“notouristique hexagonale (étant depuis juin la présidente du Conseil Supérieur de l’Œnotourisme, le CSO). Continuant de se « lever tous les matins pour faire le meilleur vin au monde, dans les deux couleurs », elle se mobilise désormais pour le développement du tourisme vigneron, prêchant la bonne parole dans les vignes et chais comme au quai d'Orsay (le CSO dépendant du ministère des Affaires Etrangères). Dans cet entretien elle détaille notamment les 6 demandes qu'elle répète inlassablement à Laurent Fabius pour que la France soit à la pointe du tourisme viti-vinicole. Taclant au passage la loi Evin («  un contre-sens fabuleux »), elle milite avant tout pour la mise en place d'une plate-forme web Å“notouristique. Une vitrine nationale qu'elle rêve aussi exhaustive qu'ergonomique, précisant qu'« il ne s'agit pas d'imposer un leadership, mais de donner des possibilités d'intégration et de renfort. Il faut faire en sorte que les touristes sachent où aller. »

 

 

* : les principales réalisations de cette association, créée en 2009, sont à ce jour le Prix National de l’Œnotourisme et le label Vignobles & Découvertes. Lié à Atout France, le CSO participera d'ailleurs du 14 au 16 octobre aux journées « destinations vignobles » qui se tiendront à Lyon.

Pour ceux qui ne sont pas à l'aise avec ce néologisme, comment définiriez-vous l'œnotourisme en tant qu'activité vigneronne ?

Florence Cathiard : D'abord je n'aime pas trop ce mot... Il est un peu abstrait, surtout pour les étrangers. J'espère que pour le portail web que le ministre a promis de nous construire on trouvera mieux. Pour moi l'Å“notourisme est la partie la plus noble du tourisme. C'est un échange actif, de l'oreille à la bouche. C'est un dialogue et une dégustation, un éveil des cinq sens. Les touristes cherchent de l'interactivité. Et une expérience qui les mobilise. L'Å“notourisme va dans le sens de l'histoire, les touristes ne veulent plus bronzer stupidement : cinquante minutes face, cinquante minutes pile !

La simple dégustation dans les caves, parfois agrémentée d'une visite du domaine, rentre-t-elle dans votre définition de l'œnotourisme ?

Non, la vente au chai n'est pas de l'Å“notourisme ! Il faut un produit adapté, une boucle sous la forme d'un circuit comme le propose le label Vignoble et Découverte. Il faut proposer un circuit complet, soit seul soit en association, comme à Monbazillac où le vigneron Alain Sergenton propose avec une dizaine de vignerons un circuit de 30 kilomètres à vélo, cheval, voiture... C'est une activité épuisante pour un vigneron, qui doit se lever à l'aube pour préparer le breakfast puis partir aux vignes, ensuite faire les chambres, l'accueil... Mais il y a la rencontrer et l'échange ! Le tourisme viti-vinicole est à peine en train de s'organiser, on doit être le plus beau pays sur ce secteur. Il y a des initiatives formidables, comme à Sauternes où le syndicat envoie chaque matin des SMS à ses vignerons pour savoir qui ouvrira ses portes à la dégustation et les affiche sur son site.

En guise d'initiatives, les Sources de Caudalie ont-elles valeur d'exemple ?

On peut dire que notre famille a été pionnière dans le domaine de l'Å“notourisme. Il y a 15 ans maintenant, ma fille aînée Mathilde a rencontré le professeur Joseph Vercauteren et a déposé un brevet sur la stabilisation des polyphénols. Ce qui a abouti au lancement de la crème Caudalie. La vigne est un trésor absolu, des sarments aux pépins on y trouve des flavonoïdes, du resvératrol... Qui font du bien à l'intérieur et à l'extérieur ! On s'est rapidement dit qu'il fallait construire un écrin pour cette petite marque qui commençait à bien fonctionner. A l'époque personne ne savait en France ce qu'était un spa. Et tous pensaient que l'on allait se ruiner. Nous aussi d'ailleurs ! Autour du spa nous avons fait un hôtel, un restaurant... Au final c'est un complexe qui s'est construit. A partir de là c'est devenu une vraie activité, pour ma fille Anaïs et son mari, Jérôme Tourbier (qui vont ouvrir en 2016 un resort/spa/hôtel en Champagne et ont le projet d'en ouvrir en Alsace et ailleurs...). C'est devenu un vrai palace des vignes, avec six villas, quinze suites, trois restaurants (dont un étoilé), deux piscines, un spa... Et le château annexe du Thil ! C'est le volet élitiste de ce qu'il est convenu d'appeler l'Å“notourisme. Il faut décliner l'Å“notourisme à la mesure de ses moyens, avec constance. Et il faut un public adapté à ses ambitions !

Comment en êtes-vous venue à prendre la présidence du CSO ?

Pierre Dubrul m'a demandé de prendre sa suite. Mais il a un peu exagéré en me disant « qu'il n'y avait pas grand chose à faire »... C'est très prenant d'avoir une telle cause à défendre. Au départ, j'ai été très agréablement étonnée de voir que toutes les forces vives de la viticulture française siègent au conseil d'administration du CSO (INAO, INRA, VIF...). Je me suis également aperçue que le ministre s'est rendu compte que le tourisme en France (et l'Å“notourisme en particulier) faisait jeu égal avec l'aéronautique, en terme d'emploi et de chiffre d'affaires dérivés.

Je ne suis pas d'accord avec les pessimistes qui prédisent que la France va devenir le terrain de jeu des émirs et chinois : de même qu'il y a eu une révolution industrielle, le monde devient une planète proche et il faut s'en servir. Dans le monde, il y aurait 2 milliards de touristes en 2020 : c'est énorme ! En 2013, nous avons reçu plus de 10 millions de touristes dans le vignoble hexagonal, chacun dépensant en moyenne 200 euros (achats à la cave et restauration inclus, hébergement exclus), ce n'est pas anodin alors que tout reste à construire !

Quels sont les objectifs de votre mandat ?

Le ministre aime du concret, avec moi il est servi ! Je lui demande de s'engager sur six points. D'abord d'honorer de sa présence les événements du CSO (il est ainsi venu à la remise des derniers labels Vignobles & Découverte à Monbazillac). Je lui demande de nous aider à créer un portail sur l'Å“notourisme en France, un site multilingue à l'accès simple et immédiatement compréhensible. Pour l'instant il faut aller sur le site « rendez-vous en France » et cliquer sur la section « Å“notourisme »... Le seul problème c'est que tous les ministères sont fauchés ! Ma troisième demande est de privilégier la France des régions dans la communication touristique institutionnelle. La province reste la grande oubliée ! J'attends également son aide afin que nous ne soyons pas bloqués par le lobby obscurantiste qui souhaite nous empêcher de boire de bons vins... Ma cinquième demande est que, durant ses voyages ministériels américains et asiatiques, Laurent Fabius soit accompagné non seulement d'une sélection des meilleurs chefs français, mais aussi de vignerons représentant les grands crus. Le dernier point est plus politique, il s'agit de simplifier les charges réglementaires qui pèsent sur nos activités : les normes et la pléthore de papiers à remplir...

Si ces objectifs sont remplis au bout de mes trois ans de mandat, je serai contente quand je transmettrai le flambeau !

L'intégration du CSO à la démarche Atout France est-elle l'assurance d'une écoute ministérielle ? En tant que conseiller du commerce extérieur lors des enquêtes chinoises anti-dumping et anti-subventions, vous vous étiez heurtée à un mur...

Cette expérience a été dramatique. Mais le ministre nous écoute, il aime les chiffres et s'est rendu compte de la force des vins. Il voyage énormément et s'est également rendu compte que dès qu'il arrive quelque part on lui parle de gastronomie et de bons vins, accessoirement de la beauté des paysages... Bien sûr qu'il va pousser le peu d'industrie qu'il nous reste lors de ses visites, mais Laurent Fabius n'est pas bête, il a fait du tourisme une arme de la diplomatie française. Mon job c'est d'appuyer sur la touche œno du tourisme.

Si les vins ont un poid économique et culturel indéniable, la loi Evin continue d'empêcher une communication claire sur le vin. Un paradoxe français ?

C'est un contre-sens fabuleux. On devrait prendre modèle sur les campagnes Educ'Alcool du Québec ou de ce qui se fait en Belgique. La meilleure façon de prévenir l'alcoolisme, c'est d'apprendre à un jeune à tourner un verre à pied et à déguster. Mon mot d'ordre au CSO, ce sont les trois M : « Moins Mais Mieux » ! La loi Evin a tout faux, il faut nous sortir de la nasse des alcools forts. Pour l'instant il faut espérer que le carcan actuel ne s'aggrave pas.

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