Bergerac va ferrailler pour les VCI et fusionner avec Duras : c'est un pic, c'est un cap !

 Nous, Bergerac, en Sud-Ouest, à proximité de Bordeaux, et avec Duras ». Ne cherchez pas cette tirade dans le Cyrano d'Edmond Rostand, elle n'est pas tirée du siège d'Arras, mais de la dernière Assemblée Générale de l'interprofession des vins de Bergerac. C'est ainsi que Paul-André Barriat résumait sa vision de l'interprofession des vins de Bergerac, avec une identité tout en panache, mais bien repositionnée sur la carte. Notamment par rapport à ses voisins. Evoqué depuis des années, le projet de rapprochement de Bergerac et de Duras pourrait se concrétiser dans l'année. Regroupant le Conseil Interprofessionnel des Vins de la Région de Bergerac (CIVRB) et le Conseil Interprofessionnel des Vins de Duras (CID), le Conseil Interprofessionnel des Vins de Bergerac et de Duras verrait ses statuts déposés en février au ministère de l'Agriculture. Une fois validés, ils devront encore être acceptés par le vote de chacune des deux interprofessions. Mais Paul-André Barriat (désormais enthousiaste pour le projet) estime que « le délai qui paraît raisonnable pour que cette nouvelle interprofession soit effective est le premier août prochain ».

Aux portes du Sud-Ouest et de Bordeaux

Soutenant la fusion des interprofessions, les Organismes de Défense et de Gestion des AOC Bergerac et Duras pourraient en faire de même. Réunie en assemblée générale le matin même, c'est en tout cas ce que souhaite la Fédération des Vins de Bergerac (la FVB, ayant rôle d'ODG pour Bergerac). Cette volonté de rapprochement a été saluée par Alain Tingaud, le président de l'interprofession de Duras, venu en voisin à l'assemblée générale du CIVRB. Si Bergerac verrait bien à terme les appellations de Marmande et de Buzet se joindre à son étendard interprofessionnel, « l'autre grand vignoble d'Aquitaine » assume plus généralement son ancrage dans le Sud-Ouest. Le CIVRB vient en ce sens de signer une convention avec l'Interprofession des Vins du Sud-Ouest (IVSO). Le salon Vinisud sera première manifestation publique de ce partenariat, avec un stand commun pour les vins du Sud-Ouest, de Bergerac et du Lot et Garonne.

Pour achever cette triangulation géographique, le CIVRB n'hésite plus à se tourner vers son voisin encombrant : Bordeaux. Si Bergerac ne veut plus se diluer dans Bordeaux (évoquant le projet de faire du bordeaux à Bergerac, Alain Tingaud se rappelle « le refus catégorique et sans appel » venu de Bordeaux qui « était justifié. Il faut le dire »), il y voit toujours une source inspiration et d'envie. L'expérimentation girondine du Volume Complémentaire Individuel sur les AOC rouges le démontre. La FVB vient ainsi d'adopter une motion demandant la mise en place dès la récolte 2014 d'un VCI pour Bergerac. Ce dispositif permettrait à chaque vigneron de mettre en réserve jusqu'à 15 hectolitres par hectare de vin AOC en cas de millésime généreux, puis de les utiliser en cas de déficit. Soutenue à l'unanimité par le CIVRB, cette motion doit désormais être présentée au comité régional de l'Institut National de l'Origine et de la Qualité (INAO). Pour Paul-André Barriat, « il faut désormais demander à Bordeaux de mettre un terme à son expérimentation du VCI (prévue pour fin 2014), afin que l'on puisse déclarer le dispositif concluant et le généraliser aux autres appellations intéressées ». Le président du CIVRB abordera cette position lors de sa prochaine rencontre avec son homologue du Conseil Interprofessionnel des Vins de Bordeaux (CIVB), Bernard Farges.

Bilan compliqué pour 2013, perspectives délicates pour 2014

Le CIVRB a enregistré pour ses 13 appellations une récolte de 188 800 hectolitres de vins en rouge (avec le rendement historiquement bas de 32 hl/ha) et 161 700 hl de blancs, en baisse globale de 27 % par rapport à 2012. Avec 477 200 hectolitres de stock déclarés au 31 juillet (-27 % par rapport précédente campagne), les disponibilités s'annoncent d'ores et déjà insuffisantes, notamment en rouge et plus particulièrement pour l'AOC Bergerac. Dans ce contexte, le début de la campagne 2013-2014 a vu les cours se tendre (ils ont doublé pour les rosés de Bergerac). Craignant que les marchés ne soient déstabilisés, Didier Grandeau (président de la Fédération des Négociants de Vins de Bergerac et du Sud-Ouest) n'a pas hésité à jeter un froid en jugeant que la hausse des cours était « nécessaire », mais « trop brutale, et pas en adéquation avec la qualité des vins produits, il s'agit d'un effet d'aubaine ».

Réponse du berger à la bergère, Jean-François Fruttero (président du FVB) juge au contraire que « la hausse significative des cours est une bonne chose, qui ne permettra pas de combler les pertes de chiffre d'affaires ». Jugeant venu le « temps de la maturité », il souhaite la mise en place d'une contractualisation interprofessionnelle : « la production est prête à signer des contrats pluriannuels, il reste au négoce de s'en saisir » ajoute-t-il. En juge de paix, Paul-André Barriat en appelle à « la coopération entre les deux familles », jugeant que « la stabilisation des cours à 1 100 euros le tonneau pour cette campagne » serait « un objectif raisonnable ».