e vin crève le grand écran. La journaliste Jancis Robinson et le réalisateur Jonathan Nossiter tentent d’analyser le phénomène. Si on oublie le rosé de Brad Pitt et le futur vin de Rocco Siffredi, les stars de la semaine sont : le divico, le white zin et le lapin des frères Lester.
Catherine Bernard
Le vin crève l'écran« Pourquoi y a-t-il autant de films sur le vin ? », s’interroge cette semaine la journaliste anglaise Jancis Robinoson dans sa chronique dans le Financial Times. La grande dame de la dégustation passe en revue cinq films récents réalisés en Amérique du Sud, en Australie, en France et aux Etats-Unis, tous créant une fiction autour du vin. Selon Jancis Robinson, cette nouvelle vague n’est pas la seule conséquence de l’universalisation du vin. « A la différence de la cuisine, les programmes de télévision dédiés au vin ne sont pas très nombreux. La difficulté avec le vin, c’est qu’il y a peu d’action pour une émission en direct, tandis qu’il y a avec la cuisine l’excitation de l’action, et la transformation des ingrédients en plats, très visuels. (…) L’aspect le plus intéressant du vin, la dégustation, n’est définitivement pas un sport de spectateur. Même quand il est présent dans les émissions de cuisine, le dialogue est rarement plus riche que « Mmm » ou bien « vraiment goûteux ». Auteur entre autres de Mondovino, Jonathan Nossiter, trouve lui dans une conférence reprise par Bourgogne Live que le cinéma et le vin obéissent au même processus de création. Evoquant les vins « honnêtes » et « buvables », il observe : « Ce qui est extraordinaire, c’est qu’il y a énormément de gens, et surtout des jeunes, qui sont très sensibles à ces actes. Et peut-être qu’ils sont tolérants aussi à l’idée de « défauts », de cuvée « défectueuse » comme c’était le cas dans la culture du cinéma dans les années 70 notamment. Sont arrivés un nouveau Cassavetes, un nouveau Scorcese, un nouveau Pasolini, où techniquement il y a des « défauts » selon les normes de l’industrie mais où il y a une espèce de prise de risque qui est un acte libérateur, non seulement pour celui qui le fait, mais aussi pour celui qui le reçoit ». Plus classiques mais néanmoins dans l’air du temps, Bettane et Desseauve invitent cette semaine les internautes à une séance au château de Clos Vougeot où sera projeté « Jamais en vain, toujours en vin », écrit par Jean-François Bazin. Pierre Arditi y propose « une plongée en panoramique dans 900 ans d’histoire de la Bourgogne, des moines de Cîteaux qui, au fil des siècles ». Enfin, le blogueur vin du Huffington Post, Fabrizio Bucella, conseille « à voir sans modération », le film-documentaire Terra d'Oportunitats du réalisateur espagnol Roger Roca, version dans la vraie vie, en Catalogne, de la fiction de Ken Loach, La Part des Anges.
Le divico et le white zin dans notre miroirNos voisins suisses qui ne sont pas complexés avec le terroir comme nous le sommes en France et s’amusent à créer de nouveaux cépages dont ils sont fiers se réjouissent d’un nouveau né dans la famille, le divico. Sa propriété : il résiste au mildiou : « Grâce à sa résistance élevée au mildiou, à l’oïdium et à la pourriture grise, le nouveau cépage ne nécessite en effet qu’un à trois traitements phytosanitaires par an », nous apprend le Matin. Le divico est né à Agroscope, la station fédérale de recherches agronomiques de Changins, et semble avoir tout pour lui : « Il possède en outre des propriétés anti- oxydantes favorables à la santé humaine ». Le « white zin » a-t-il, lui, de l’avenir ? La feuille de vigne dresse cette semaine le portrait du white zin, « le rosé cheap » américain, cousin de nos rosés. « Le White Zin est l'enfant terrible des Etats-Unis. Le rosé facile, doucereux, avec une pointe d'acidité, beaucoup de simplicité, pas vraiment cher, ou vraiment pas cher, c'est selon. Mais aussi et surtout le style de vin qui représente 10% de ventes totales de vin aux Etats-Unis (en volume), même s'il est rarement exporté ». Son histoire rappelle celle du Languedoc et de ses cépages aussi maudits qu’identitaires, tel le carignan : « Le zinfandel est le cépage classique et typique de la Californie, connu pour donner de puissants et riches vins de garde, aux arômes intenses de prune et de fruits rouges et noirs. La peau épaisse des grains de raisin leur confère également tannicité et intensité de couleur. Si on appelle le rosé "white" zinfandel, c'est parce qu'il est vinifié pour ainsi dire comme un vin blanc, avec une pression directe des baies et sans contact prolongé entre le moût et les peaux de raisin (contrairement aux rosés de saignée par exemple). La fermentation est arrêtée alors qu'il reste du sucre dans le vin, simplement par manque de levures pour le convertir en alcool, expliquant le côté "demi-sec" du White Zin. ». Pour autant, selon l’auteur, « le « white zin » est-ce encore du vin » ?
Ce matin, un lapinC’est un petit livre aussi merveilleux que le pays d’Alice qu’une amie m’a mis entre les mains. Ecrit par Krishna Lester, illustré par Guy Lester, son frère, Le petit livre de la vigne est délicieusement anglais. Les héros en sont une vieille souche et un jeune lapin. Ils tiennent ainsi conversation : « Ne fais pas ça ! Le lapin arrêta net ce qu’il faisait et regarda en direction de la vieille vigne. « Mais on m’avait dit de venir ici pour le petit-déjeuner ». La vigne le fixa durement du regard ». Le lapin de Guy Lester rappelle beaucoup celui de Beatrix Potter, héros national des petits Britanniques. Dans la préface, Krishna Lester explique qu’il a géré un vignoble dans la vallée de la Loire pendant une vingtaine d’années. Il dit ce qui l’a conduit à ce petit opuscule : « Les vignes dont je m’occupais, environ cent mille, sont devenues mes amies et au bout d’un certain temps, le vignoble tout entier m’est apparu comme un petit monde situé l’intérieur de notre monde et dans lequel la diversité des habitants vit dans une sorte d’équilibre écologique dont j’étais responsable dans une certaine mesure ». Que ferait-on sans les Anglais ?