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Jérémy Arnaud (directeur marketing de l’interprofession de Cahors) : « L’appellation gagne à nouveau de l’argent. »
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Jérémy Arnaud (directeur marketing de l’interprofession de Cahors) : « L’appellation gagne à nouveau de l’argent. »

Par Egmont Labadie Le 01 février 2012
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Jérémy Arnaud (directeur marketing de l’interprofession de Cahors) : « L’appellation gagne à nouveau de l’argent. »
I

Il y a bientôt trois ans, nous avions interviewé Jérémy Arnaud pour connaître ses projets destinés à redorer le blason d’une appellation de 3800 hectares qui avait pris de plein fouet la crise du milieu des années 2000. Il tire aujourd’hui un bilan lucide d’une stratégie de reconquête de longue haleine qui commence à porter ses fruits.

 

Quelle a été la stratégie marketing de Cahors depuis trois ans, en particulier à l'export ?

Le nom Cahors n’existait pas à l’export, on a osé l’associer à son cépage principal, pour conquérir les marchés internationaux. Nous avons aussi mis en place une segmentation de la gamme : cuvées tradition (ronds et structurés, 70 à 85% de malbec, garde 3-5 ans, prix inférieur à 7€), cuvées prestige (puissants et gourmands, 85 à 100% de malbec, garde 5 à 10 ans, prix de 7 à 14€), cuvées spéciales (intenses et complexes, 100% malbec, garde de plus de 10 ans, prix supérieur à 14€). Et c’est le milieu de gamme qui est notre « cheval de Troie », notre vin le plus offensif pour conquérir le marché international.

Mais c’est le cépage malbec qui nous ouvre les marchés grâce au travail de promotion de l’Argentine, qui dépense pour ceci des millions d’euros chaque année. On a travaillé la complémentarité, progressivement les marchés qui s’intéressent au malbec redécouvrent le « French Malbec », donc Cahors. Aux Etats-Unis, où nous travaillons depuis 2009, des importateurs de dimension petite et moyenne se fournissent en Cahors Malbec pour offrir des malbecs différents des argentins. On est donc apporteurs de marché si on se positionne correctement sur ces marchés.

On accroche deux types de consommateurs américains. Ceux qui aiment les malbecs argentins, et qui sont prêts à apprécier les malbecs de Cahors, ce qui permet aux revendeurs d’étendre leur offre de malbec ; mais aussi les gens qui n’aiment pas le malbec argentin, qui ont toujours préféré les vins de la vieille Europe, plus acides que sucrés, plus complexes que simplement sur le « big fruit ». C’est par exemple la raison pour laquelle Roadbird Import, un importateur récemment créé, a décidé de commencer son activité en se spécialisant en Cahors Malbec .

Quel est le positionnement prix actuel du Cahors sur le marché américain ?

Ils sont à 17 dollars en moyenne, quand les argentins sont à 10. Le segment stratégique est entre 15 et 25 dollars, et 25 à 30 dollars pour ceux qui ont la clientèle. Par exemple, Bev Mo (Beverages and More, distributeur en Californie) achète pour positionner les Cahors entre 15 et 30 dollars la bouteille, et les gens de National Republic, un gros importateur, considèrent qu’on doit pouvoir vendre les Cahors 50 à 100% plus cher que les malbecs argentins, sachant qu’on est une niche du malbec, et qu’on n’est pas là pour aller à la compétition par des volumes aussi importants que les argentins. Ces acheteurs sont persuadés que la qualité est suffisante, peut plaire aux cibles identifiées, mais il a fallu les convaincre que c’était possible, en faisant déguster les Cahors à 743 professionnels américains de New-York, Chicago, Boston, San Francisco, Miami et Washington. Aujourd’hui ces professionnels savent que nous existons, qu’il n’y a pas du malbec qu’en Argentine, que nous en produisons un différent, et que s’ils le vendaient, il pourrait être vendu à plus fort prix.

Quels sont les résultats économiques de cette stratégie ?

 Elle est juste au début des résultats qu’elle va permettre d’avoir, mais il fallait amorcer. Aujourd’hui il y a des déclenchements, parce que le marché américain n’a jamais décéléré sa consommation de vin en général ni de malbec en particulier, que l’économie repart un peu, et qu’en même temps l’euro est moins cher qu’il y a quelques mois. En conséquence, en 2012, on devrait pouvoir faire 8 à 10 000 hl aux Etats-Unis si tout se passe bien, contre 4 000 hl en 2011. Et la valorisation monte progressivement, c’est le marché, avec le Canada, où on vend le plus cher. Le prix moyen professionnel hors taxe départ cave à l’exportation est de 4,5 euros le litre, il n’était que de 2,78 € en 2006, ce qui fait une bouteille à 3,5 €. Ça fait des vignerons heureux, parce que sur le marché français les prix sont beaucoup moins importants.

En 2010, nous avons exporté 15 à 20% de notre production, soit environ 25 000 hl (+25% par rapport à 2009), sur 164 000 hl commercialisés, c’est à peu près le même résultat qu’en 2008, à l’époque où Alain-Dominique Perrin était président de l’interprofession, mais avec une valorisation supérieure (11 millions d’euros contre 9,5). Ça concerne une quarantaine de domaines, les trois quarts des exportations sont le fait de structures petites et moyennes, pas du grand négoce, mais j’ai de grands espoirs avec le groupe Taillan (Ginesté) qui possède le château Quattre,  et qui travaille très fort pour ça.

La filière ressent-elle l'influence de ces résultats positifs ?

Les volumes n’augmentent plus à Cahors, mais on a des progressions de chiffre d’affaires parce qu’on perd progressivement les premiers prix en hard discount, hyper et super. Le cours du vrac est aujourd’hui à 102 €/hl, contre 64 € en 2006, et comme le marché du vrac pèse 50% des volumes de l’appellation, celle-ci gagne à nouveau de l’argent. On est revenus à un cours type Bordeaux générique, c’est pas follichon, mais on est revenu. Et le baromètre de la santé financière des entreprises que produit le Crédit Agricole depuis 2008 nous montre qu’en deux ans, la proportion d’entreprises qui sont dans une situation bonne à très bonne est passée de 38 à 45% du total, et que nous avons moins de vignerons dans une situation juste normale (33% contre 36% en 2009) dans une situation difficile (22% contre 26% en 2009) voire en défaut de paiement (14% contre 17% antérieurement). Du côté du marché, nous sommes contents de voir que nous sommes dynamisés par la création de produits sur le thème du malbec, comme le JP Chenet Malbec des grands chais de France (gamme Limited release), qui est en AOC Cahors, ou Legendary Roots Castel Malbec.  Et je crois savoir que Castel prépare une nouvelle marque pour le CHR en AOC Cahors…

Comment le vignoble gère-t-il son potentiel de production aujourd'hui ?

Il y a eu une grosse récolte en 2011, mais on a su ne pas augmenter la production revendiquée en AOC Cahors, en faisant 60 000 hl d’autres vins, des vins de pays, deux fois plus de rosé malbec, 10 000 hl de vins sans origine…Quand on est en période de forte production, on peut être fournisseur de malbec en vin sans origine, ça peut être une manière à la marge de ne pas produire n’importe quoi ni en vins de pays ni en Cahors, mais quelque chose de correct qui serve aussi des marques françaises qui ont besoin de ces volumes de « French Malbec ». Pour accompagner cette diversification a été créé en 2010 le pôle de recherche d’Anglars-Juillac (coût : 1,5 million d’euros) dans le but d’adapter l’offre, le malbec bien sûr, le rosé, mais aussi le blanc dans lequel nous avons un formidable potentiel, et d’autres produits encore. Il faut rester créatifs, et ne pas gérer la rente !

Quel a été le rôle économique de l'interprofession dans cette période ?

Il y a le rôle économique qu’accorde la loi, qui nous a permis de régler la question des volumes, de produire autant que nous vendons, et de faire baisser les stocks (moins de 2 récoltes aujourd’hui, contre près de 3 en 2006) et de nous diversifier. Mais nous avons aussi utilisé nos réserves financières pour miser avec le vignoble sur sa relance et son renouveau : on a doublé notre budget sans augmenter la cotisation de 3,66 €/hl, l’interprofession a dépensé plus d’un million d’euros par an entre 2007 et 2010, ce qui nous a permis d’aller chercher une subvention européenne de 500 000 euros. On a diminué un peu l’effort en 2011 pour reconstituer nos réserves, mais maintenant à côté de l’argent, on offre aussi du temps à nos 260 entreprises : je vais les voir pour qu’elles passent à l’opérationnel, pour que la segmentation de leurs gammes corresponde à la stratégie générale, que les vignerons rentrent dans une dynamique collective. On les fait réfléchir sur leur propre marketing, on leur donne des contacts qui correspondent à ce repositionnement, et puis on leur redonne la pêche et le moral ! Il n’y a pas de réussite collective, s’il n’y a pas en même temps une animation des entreprises individuellement, et une appellation brille aussi en se nourrissant de ses marques individuelles qui peuvent et doivent également briller.

Quels sont les prochains chantiers de l'interprofession ?

Sur le sujet de l’interprofession du Sud-Ouest, on a refusé la fusion, mais on a proposé de passer avec elle une convention pour collaborer quand nous avons des intérêts partagés, comme au Canada pour le linéaire de la SAQ.  Nous réfléchissons d’autre part au regroupement de toutes nos institutions locales, pour ne pas être trop dispersés, pour rester à proximité des entreprises, gérer la diversité des productions, et que la recherche et la promotion soient dans le même organigramme. Et on va essayer d’avoir une démarche marketing pour dynamiser l’ensemble, c’est la vision du marché qui va nous permettre de rendre cohérente toute l’action du vignoble, quels que soient ses produits.

Tout ceci en continuant à avoir des stratégies communes avec notre territoire-terroir, des partenaires, des collectivités, l’office de tourisme de la ville et du département. On voudrait que notre maison des vins, la Villa Malbec Cahors, ce concept créé par l’interprofession, soit le point de départ d’une stratégie qui se développerait hors de nos frontières, avec la ville de Cahors, le Grand Cahors, les collectivités locales, le secteur du vin associé au secteur de la gastronomie et du tourisme, pour la promotion de ces trois secteurs et de leurs produits.

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