eader mondial de la production de plants de vigne, l’Italien VCR (Vivai Cooperativi Rauscedo) continue à investir dans l’innovation, « meilleure anti-dote à la crise » comme l’affirme son directeur général Eugenio Sartori (voir photo). Fondée en 1933 à Rauscedo dans le Frioul, la coopérative regroupe aujourd’hui 250 pépiniéristes, tous basés dans le village de Rauscedo et exploite 1 100 hectares de pépinière, 1 050 hectares de vignes-mères de porte-greffes et 1 500 hectares de vignes-mères de greffons. A ces surfaces s’ajoutent 1 000 hectares cultivés par des viticulteurs sous le contrôle de VCR et plus récemment 80 hectares de vignes-mères de greffons ont étés plantés sur le littoral Adriatique : un potentiel qui permet à VCR de produire annuellement plus de 60 millions de plants de vigne greffé-soudés et racinés repartis en plus de 4.000 combinaisons variété/clone/porte-greffe.
360 micro-vinifications en 2010La coopérative a investi dès 1969 dans l’innovation avec la construction de son Centre expérimental à Rauscedo où elle a pu mener des programmes d’amélioration génétique à travers la sélection clonale, aboutissant aujourd’hui à l’inscription de plus de 350 clones originaux VCR de variétés locales, internationales et et de variétés spécifiques à certains pays viticoles. En 1972, ce centre de recherche se dotait d’une cave expérimentale afin de réaliser des micro-vinifications des différents clones en vue de définir les caractéristiques œnologiques et les profils sensoriels de chacun des clones proposés dans son catalogue.
Toutes ces données sont consignées dans les Cahiers Techniques VCR qui détaillent par variétés les caractéristiques ampélographiques et les performances culturales de chaque clone ainsi que leurs caractéristiques œnologiques et profils sensoriels sur la base des microvinifications réalisées à la cave expérimentale. En 1972, année de mise en service de la cave expérimentale, 25 microvinifications ont été réalisées en 1972. En 2010, VCR suivi 360 microvinifications. Un travail colossal qui permet à VCR de proposer à ses clients de déguster les différents clones avant de faire leur choix. Dans la salle de dégustation en sous-sol du centre expérimental, une fabuleuse collection d’échantillons de toutes ces microvinifications offre la possibilité d’une dégustation éclectique des cépages les plus répandus aux variétés plus rares en passant par les métisses (croisement entre deux variétés).
Automatisation de la greffe à la mortaiseParallèlement à la poursuite de ce programme d’expérimentation sur les clones, VCR continue en inniver pour améliorer ses techniques de production de plants. Ainsi la coopérative italienne a-t-elle mis au point une machine, baptisée Celerina plus (voir photo ci-contre), capable d’automatiser la greffe à la mortaise (ou greffe à emboitement multiple). Un système de greffage qui présente l’avantage par rapport à la greffe omega de doubler la surface de contact entre greffon et porte-greffe. La machine permet une zone de coupe parfaite, la cicatrisation des tissus est meilleure et les manifestations d’hyperplasie (boursoufflure au niveau de la greffe) sont réduites.
Les couteaux de la machine qui entaillent les bois sont désinfectés avant chaque coupe. Mais surtout, cette machine permet de réaliser 8000 greffes par jour et par opérateur contre 2000 avec un greffage manuel. Une cinquantaine de machines sont déjà opérationnelles et utilisées par les membres de la coopérative chez les coopérateurs pépiniéristes.
Autre avancée de la coopérative dans le domaine de la détection des virus : VCR a mis au point un système automatisé pour la préparation des échantillons destinés au test ELISA (voir photo ci-dessous), test de référence pour dépister les virus tels que le court noué, l’enroulement, la marbrure…. Le test est réalisé sur des bois qui doivent être broyés afin qu’on puisse leur additionner des anti-corps qui permettent de détecter la présence ou non des virus. L’automatisation de cette opération, incluant une désinfection de l’appareil de broyage avant chaque intervention, est un gain de temps énorme. La coopérative a ainsi pu multiplier par cinq le nombre de tests réalisés sur l’année : 6 à 7000 avant automatisation, 30 000 cette année.
VCR a également engagé un partenariat avec l’Université d’Udine et l’Institut de Génomique Appliquée sur un programme de sélection de variétés résistantes aux maladies. Les travaux ont été initiés par l’Université d’Udine en 1998. « Le monde de la viticulture est un géant aux pieds d’argile, argumente Raffaele Testolin de l’Université d’Udine. Il a développé un énorme business sur une plante incapable de repousser les maladies ».
Selon Testolin, ces recherches sont d’autant plus urgentes que dans l’Union européenne, alors que seulement 3% des terres agricoles sont plantées en vignes, ces surfaces consomment 65% des fongicides utilisés dans toute l’agriculture européenne. L’équipe d’Udine a travaillé à partir d’espèces américaines et asiatiques dans lesquelles on peut trouver des gènes de résistances à l’oïdium et au mildiou. Des programmes de croisement ont été réalisés avec des Vitis Viniféra type Chardonnay, Sauvignon, San Giovese, Cabernet Sauvignon, Merlot, Tokay …. et des hybrides déjà obtenus dans d’autres pays comme Bianca, 20/3, Regent, Seyval, Pannonia, SK-00-1/2…. Plus de 16 000 croisements ont été réalisés.
Une première sélection a été effectuée et testé à petite échelle avec une évaluation agronomique (productivité, forme de la grappe, résistance aux maladies…) et une évaluation qualitative des raisins et des jus ainsi qu’une évaluation œnologique basée sur les résultats de microvinifications réalisées sur trois ans. A ce jour, 15 hybrides ont passé tous les stades de la sélection parmi lesquelles un blanc et un rouge qui pourraient être multipliés dès l’année prochaine. Sur le site VCR de Grado en bordure de l'Adriatique, 34 hybrides ont été plantés en 2009 dont 20 sont de l'Institut de Génomique Appliquée de Udine et les 14 autres 14 proviennent d'autres obtenteurs étrangers. « Nous espérons commencer la multiplication dès l’année prochaine pour pouvoir implanter ces hybrides dans d’autres régions en Italie et à l’étranger », affirme Eugenio Sartori.
Enfin VCR contribue au financement des travaux menés par l’Institut de Génomique Appliquée de Udine sur le séquençage du génome de la vigne.