menu burger
Lire la vigne en epaper Magazine
Accueil / Commerce/Gestion / Négoce : le rendez-vous manqué de la concentration ?
Négoce : le rendez-vous manqué de la concentration ?
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin

Négoce : le rendez-vous manqué de la concentration ?

Par Vitisphere Le 02 mai 2011
article payant Article réservé aux abonnés Je m'abonne
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin
Négoce : le rendez-vous manqué de la concentration ?
L

a filière vin est particulièrement atomisée. Si des opérateurs sont parvenus à atteindre des tailles critiques dans le Nouveau Monde, c'est encore loin d'être le cas en Europe et notamment en France. Les crises sont l'occasion d'achats d'opérateurs affaiblis et de constitution d'oligopoles. Celle que la filière vient de traverser a-t-elle au moins permis ce mouvement au sein du secteur européen du vin ?

Retard européen

« Pas encore assez », observe Philippe Hermant, associé chez Transcapital[1] « Le Nouveau Monde a fait sa course à la taille voici cinq ou dix ans, et ses leaders, Constellation, Gallo, Foster’s, Concha y Toro... sont actuellement en phase de consolidation. Ces groupes, le plus souvent  cotés en bourse, ont pu mobiliser des capitaux importants et s'ériger en géants du secteur par des opérations de fusions et d’acquisitions. Mais en Europe, les entreprises du vin cotées en Bourse sont rares et, les autres séduisent assez peu les investisseurs : leurs besoins en fonds de roulement élevés et leurs faibles taux de retour sur investissementeffraient les fonds d'investissement, tandis que les banques s'inquiètent de la faible rentabilité qu'elles dégagent ».

Le cas de Castel est une exception, dans une filière en manque structurel de trésorerie « Avec la vente de son pôle Eaux en 2008, Castel a récupéré plus de 800 millions d'euros de liquidités qui lui ont permis entre autres de racheter rapidement Oenoalliance, Barton et Guestier, Barrière Frères, puis très récemment Patriarche/Kriter », précise Philippe Hermant.

[1] Transcapital est une Société de Conseil en Fusions & Acquisitions dans les Industries Agro-alimentaires ; cet acteur est notamment très présent dans le secteur vitivinicole.

Effervescences?

Les opérations transfrontalières sont encore trop limitées en Europe, en raison d’une part des forts particularismes de chaque pays producteur traditionnel de vins tranquilles, d’autre part d’un certain manque d’audace des principaux acteurs de la filière, au-delà de leurs frontières. Selon Philippe Hermant : « Les quelques opérations significatives recensées depuis 10 ans répondent le plus souvent à un besoin précis, par exemple celui de se doter d’un réseau de distribution structuré dans les pays voisins, comme ce fut le cas lors de l’acquisition en 2001 du négociant bordelais Yvon Mau par l’Espagnol Freixenet.

C’est d’ailleurs sur le segment assez concentré du sparkling wine que les mouvements transeuropéens les plus importants sont intervenus, avec, outre les opération de Freixenet « le roi du Cava », les croissances externes des allemands spécialistes du Sekt comme Schloss Wachenheim sur La Compagnie Française des Grands Vin ou plus récemment du groupe Henkel (Oetker) sur le spécialiste du prosecco, l’Italien Mionetto. Par ailleurs, des partenariats commerciaux ont également touché ce secteur, plus rentable que celui des vins tranquilles, comme le très récent accord entre l’autre catalan du Cava, Codorniu, avec la coopérative Jaillance à Die ».

Evolutions stratégiques

La croissance externe reste le moyen le plus rapide, pour les entreprises qui en ont les moyens, d’accélérer une stratégie gagnante déjà en place, ou au contraire de la réorienter. « On a pu constater cette réorientation d’abord chez le groupe Jeanjean/Advini avec ses deux acquisitions ciblées haut de gammede la maison Cazes puis surtout Laroche. », précise Philippe Hermant. Même observation chez le groupe Castel, avec un glissement vers l’export et le haut de gamme de sa branche vin, suite aux reprises des négociants Barton et Guestier et de Barrière Frères. On peut encore citer la montée en gamme de l'Allemand Racke, matérialisée par la cession de la cave de Hechtsheim, en 2008, à une filiale de Grands Chais de France, alors même que le groupe allemand prenait une participation majoritaire chez le distributeur haut de gamme Eggers & Franke.

Les solutions astucieuses existent

« Le financement de telles opérations de développement est souvent problématique et requière une ingénierie financièresérieuse, faute de fonds propres suffisants. Celle-ci permet de déboucher sur des fusions, des échanges de titres ou des prises de participations progressives (partenariats capitalistiques). La fusion Jeanjean-Laroche, donnant naissance à Advini fait figure d'exemple de solution pertinente ayant permis au groupe coté originaire du Languedoc de poursuivreune croissance externe ambitieuse, malgré des moyens financiers limités : la famille Jeanjean a compris l'intérêt de posséder une plus petite part d'un plus gros ensemble », explique Philippe Hermant, « tandis que Michel Laroche faisait le pari que la qualité du business model déployé par Antoine Leccia (Advini) lui permettrait à terme de bien valoriser ses 10% du capital du nouvel ensemble ». Le capital d'Advini est aujourd'hui détenu à 49,8 % par la famille Jeanjean (qui conserve toutefois la majorité des droits de vote), à 10 % par Michel Laroche et à 2,6 % par le management. Le solde représentant le flottant en Bourse (34 %), l’auto-contrôle (4 %) et des investisseurs tiers.

Partenariats : approvisionnements et distribution

En amont de la filière, les négociants sont de plus en plus friands de partenariats qui leur permettent de sécuriser leurs approvisionnements, alors qu'ils n'ont ni la surface financière ni l'objectif d'acquérir et d'exploiter des vignes. « Dans la plupart des régions viticoles où la terre reste chère, la tendance pour le négoce est d'avoir une petite partie d'auto-approvisionnement réservée à une production qualitative emblématique », précise Adrien Pedron, spécialiste du vitivinicole chez Transcapital.

Des prises de participation dans le capital de l'un et/ou l'autre des fournisseurs importants, peuvent renforcer ces relations contractuelles.

En aval, « le ralentissement économique et la mondialisation de la filière ont incité de nombreux propriétaires de domaines viticoles ou négociants à confier la commercialisation de leurs gammes à des partenaires dotés d’un réseau commercial étoffé pour relancer les ventes sur le marché domestique ou à l’export, sans que cela se matérialise nécessairement pardes prises de participations ou des acquisitions. De nombreux exemples d'addossements commerciaux sont intervenus au cours des derniers exercices, soit entre Châteaux et négociants français, soit entre grands groupes de pays différents pour dynamiser les ventes. Les partenariats qui lient Castel et Suntory en France et sur de nombreux marchés asiatiques, ou Advini et COFCO sur la Chine, (marché qui connaît un développement exponentiel), sont parmi les exemples d’accords de distribution les plus remarqués ».

Un momemtum pour les cessions

Pour autant, le lien étroit et organisé entre la production et le négoce n'est pas une nouveauté : « elle a fait la richesse de la Bourgogne et explique le succès de la place de Bordeaux, dont le système de commercialisation efficient a permis de conserver un négoce solide malgré la crise »constate Philippe Hermant : « La place de Bordeaux, ce sont environ 300 négociants dont certains ont traversé une période difficile avec des millésimes moyens dans un environnement international morose. Dans ce contexte, les quelques maisons à vendre n'ont pas ou difficilementtrouvé preneur. Aujourd'hui, les millésimes sont superbes, la demande est là, catalysée par la Chine, et c’est, paradoxalement, sans doute le moment que choisiront certains actionnaires managers opportunistes ouen fin de carrière, pour vendre au moment où les bilans sont meilleurs.

Cela devrait offrir à toute une génération de dirigeants du monde du vin l’opportunité inespérée de transmettre leur entreprise dans des conditions très honorables. »

 

Leaders

A quoi ressembleraient les futurs leaders de l'industrie du vin ? « En France, on assiste à l'émergence de leaders qui tiennent une part significative de certains bassins régionaux, comme  Castel, le groupe Ballande ou CVBG(Thienot) à Bordeaux, Grands Chais de France et Castel dans la Loire, Advini dans les vins du Sud et du Sud-Ouest ou enfin Boisset en Bourgogne. Les caves coopératives ne sont pas exclues de ce mouvement et certaines jouent le jeu de la concentration (Val d'Orbieu, Vinovalie...).

A terme, on pourrait assister à une nouvelle concentration qui rappellerait celle connue dans le Nouveau Monde, où quelques acteurs détiennent chacun 20 % ou plus de leur marché », explique Adrien Pedron.

La filière pourrait alors intéresser de grands groupes industriels ou financiers, qui choisiraient d'investir dans la construction d'un leader ou d’un challenger du secteur, « comme ce fut le cas en Champagne où un géant du luxe soutient aujourd’huisimultanément  quatre ou cinq marques dans son réseau commercial, alors que le n°2 mondial des spiritueux, Pernod Ricard, y est également très actif», rappelle Philippe Hermant. Cette perspective séduisante reste cependant assez peu vraisemblable pour les vins tranquillesdont l’activité, hors grands crus classés bordelais ou AOC rares, génère des marges encore trop réduites.

Reste l'hypothèse qu'un puissant groupe du Nouveau Monde vienne en Europe pour acquérir du savoir-faire, compléter sa gamme et surtout sécuriser ses approvisionnements, en créant à cette occasion un nouveau géant, seul ou en partenariat avec un acteur européen.

Pour le moment, seuls quelques partenariats transatlantiques ou trans-pacifiques ont vu le jour pour donner lieu à la naissance de marques très prestigieuses comme Opus One ou Almaviva. Lafite-Rothschild vient de nouer une alliance prometteuse avec la société d'investissement chinoise CITIC, pour produire du vin en Chine.

Mais on est là bien loin d'oligopoles industriels pour la filière vins, comme dans le lait, les produits frais ou les spiritueux.

Vous n'êtes pas encore abonné ?

Accédez à l’intégralité des articles Vitisphere - La Vigne et suivez les actualités réglementaires et commerciales.
Profitez dès maintenant de notre offre : le premier mois pour seulement 1 € !

Je m'abonne pour 1€
Partage Twitter facebook linkedin
Soyez le premier à commenter
Le dépôt de commentaire est réservé aux titulaires d'un compte.
Rejoignez notre communauté en créant votre compte.
Vous avez un compte ? Connectez vous

Pas encore de commentaire à cet article.
vitijob.com, emploi vigne et vin
Maine-et-Loire - Stage Freixenet Gratien
Bouches-du-Rhône - CDI PUISSANCE CAP
Aude - CDI Ollieux Romanis
Charente - CDI HUMAN CAPITAL GROUP
La lettre de la Filière
Chaque vendredi, recevez gratuitement l'essentiel de l'actualité de la planète vin.
Inscrivez-vous
Votre email professionnel est utilisé par Vitisphere et les sociétés de son groupe NGPA pour vous adresser ses newsletters et les communications de ses partenaires commerciaux. Vous pouvez vous opposer à cette communication pour nos partenaires en cliquant ici . Consultez notre politique de confidentialité pour en savoir plus sur la gestion de vos données et vos droits. Notre service client est à votre disposition par mail serviceclients@ngpa.fr.
Commerce/Gestion
© Vitisphere 2025 -- Tout droit réservé