e ralentissement économique mondial a durement touché le Portugal et accentué le rôle central de ses vins dans son économie. La reprise qui s'annonce pourrait être l'occasion pour le pays de transformer l'essai de sa montée en gamme, à l'export et sur le marché domestique. Huitième vignoble mondial (242 000 ha en 2010), le Portugal est également un marché de consommation important. Cette consommation est en baisse tendancielle, comme dans la plupart des pays historiquement producteurs : de 57,3 litres/personne/an en 1995, la consommation est passée à 42 litres en 2009. Rapportée à leur population, les Portugais affichent la deuxième consommation de vin au monde, après les Français. Le Portugal est ainsi le onzième marché de consommation de vin au monde en 2009, avec une consommation de 4,65 millions d’hectolitres. Annes Serre - Eurowine n°1 (Février-Mars 2011)
La production se stabiliseAprès une réduction de la superficie viticole du pays de 12 % entre 1986 et 2001 (de 282 000 ha à 248 000 ha), le mouvement s'est stabilisé, la surface des vignobles diminuant de seulement 2,4% entre 2001 et 2010. Dans le cadre de la nouvelle OCM, 1300 ha de vignoble ont été arrachés en 2010. Plus ou moins âgé selon les régions, le vignoble portugais présente l'un des rendements moyens les plus faibles d'Europe (4,3 tonnes/ha sur cinq ans) avec un record à 2,2 t/ha en 2009 pour une vendange de moins de 500 000 tonnes au lieu des 800 000 à 1 Mt habituels. Le volume de vin produit en 2009 représente 5,7 Mhl, soit un tiers de moins que la production de 1986. Les premières estimations de la production 2010 font état d'une légère remontée. 29 % des volumes produits sont en DOC, 15% des VLQPRD, 21% des vins de pays (IPR) et 35% des vins de table. Le vignoble est très morcelé avec près de 300 000 petites exploitations viticoles, les Quintas et une superficie moyenne des exploitations de seulement 1 ha. Le tissu productif est dilué : les douze premiers opérateurs assurent moins d’un quart de la production. Les coopératives représentent environ 41% de la production des vins VQPRD, 63% des vins IPR et 64% des vins de table. Le secteur privé, constitué de plus de 600 caves et 1200 vignerons indépendants, assure la production de 59% des VQPRD, 37% des vins régionaux et 36% des vins de table.
Les importations de vin face à la crisePlus d'un tiers de la consommation portugaise de vins en 2009 provenait de l'étranger (35,4 %). Compte-tenu du faible volume de la vendange, les importations ont quadruplé par rapport à 2008 en volume (1,65 Mhl) mais diminué de 6,6 % en valeur à 110,4 M$. Le vrac représentait en 2009 50% de la valeur et 76% des volumes de ces importations destinées à compenser des manques sur l'entrée de gamme alors que lors des campagnes précédentes la progression des importations était particulièrement marquée en valeur (+90% entre 2006 et 2008). Sur la période 2007 - 2009, les importations de vins en vrac ont augmenté en valeur et en volume (respectivement de +51,9% et +41,7%). Celles des vins tranquilles embouteillés ont augmenté en valeur (+27,1%), mais ont légèrement diminué en volume (-3%). Il faut tenir compte de l'impact de la crise économique mondiale, qui a fait reculer le PIB portugais de 2,8 % en 2009 (la situation serait stabilisée en 2010 avec une progression du PIB de 0,3 %) et pesé sur la progression des différentes catégories de vin à l'importation. L'importation de vins tranquilles embouteillés représentait en 2009 27% des importations en valeur et 20% en volume. Les vins effervescents importés sont principalement positionnés en haut de la gamme (moins, cependant, qu'avant 2008), avec une part de marché de 4 % en volume pour 23 % en valeur. En 2009, l'Espagne a tiré son épingle du jeu en misant sur l'entrée et le coeur de gamme : elle est le premier fournisseur du Portugal avec 73% de la valeur et 95% des volumes importés. La France, l’Italie et l’Allemagne se partagent le reste du marché avec des positionnements en valeur beaucoup plus élevés qu'en volume. Le Portugal a ainsi importé 1,4 Ml de vin français pour 12,7 M$. La part de la France, deuxième fournisseur du marché portugais en valeur et troisième en volume, poursuit sa décrue. Entre 2006 et 2009, la part de marché de la France est passée de 22,6% à 11,5% en valeur et de 1,17% à 0,85% en volume. L'essentiel des importations de vin français repose sur le champagne et les grands crus bordelais.
Le repositionnement des exportations porte ses fruitsAprès une phase ascendante spectaculaire (+143 % entre 1981 et 2007), les exportations de vins portugais ont été durement touchées par la crise (-29 % entre 2007 et 2009). Le Portugal était en 2009 le 10ème exportateur mondial de vins en volumes, pour une production représentant entre 3 et 4% du marché mondial. Ces exportations représentaient 2,4 Mhl, soit près de 40 % de la production et 763 M$, en baisse de 7% par rapport à 2007 : cette régression, supérieure à celle du PIB, traduit un impact particulièrement rude de la crise sur la filière vin portugaise, dont la part dans le chiffre d'affaire du pays à l'export est en outre passée de 58% en 2007 à 76% en 2009 en volume et à 93 % en valeur. Dans le même temps, les exportations de vins tranquilles embouteillés reculaient davantage en volume (-11,6%) qu'en valeur (-5 %), tandis que les ventes en vrac chutaient de 61,7% en volume et de 35,2% en valeur ; la part des vins en vrac dans les exportations est ainsi passé de 42% à 23% en volume et de 8% à 6% en valeur. On peut en déduire que la progression des exportations portugaises vers le haut de la gamme ont constitué leur premier moteur, puis leur meilleur rempart contre la baisse de la demande, qui s'est concentrée sur l'entrée de gamme et à présent leur meilleur ressort pour profiter de la reprise. Autrefois produit essentiel des exportations portugaises, le Porto représentait en 2009 53 % des exportations de vin (0,56 Mhl) contre 60 % en 2006. Cette évolution témoigne de la diversification des vins portugais à l'export autour de vins rouges secs très prisés, mais aussi de vins blancs à succès, tous marqués par la fraîcheur que leur procure la proximité de l'océan Atlantique. Le Portugal exporte principalement vers l'Europe : la France, le Royaume Uni, la Belgique, les Pays Bas, l'Allemagne et les pays scandinaves représentent près de 47% du volume et 55% de la valeur des exportations portugaises en 2009. La France est le premier client du Portugal en valeur (144 700 $ soit 19% des exportations de vin) et le deuxième en volume (18,4%, soit 42 500 tonnes) avec une belle appréciation des exportations (par rapport à 2006, les exportations de vins portugais vers la France ont progressé de 12% en valeur et diminué de 25% en volume). Le Portugal entretient également des relations privilégiées avec ses anciennes colonies : l'Angola est la première destination des vins portugais en volume et la troisième en valeur : elle représente un marché prioritaire et prometteur. En 2009, les exportations de vins portugais se sont accrues de 56 % à destination du Brésil, relai de croissance essentiel pour la filière portugaise de même que, dans une moindre mesure, le Mozambique, le Cap vert et la Guinée Bissau. Le Portugal exporte également en Amérique du Nord (Etats-Unis, +32 % en 2009, et au Canada) et progresse sur les marchés émergents d’Europe de l’Est (République Tchèque, Russie), grâce essentiellement aux vins de Porto.
Paris d'avenirAvec une progression du PIB stabilisée en 2010 et des espoirs de reprise pour 2011, le marché portugais du vin devrait profiter des avantages de sa montée en gamme, entamée avant la crise. L'essor du tourisme au Portugal bénéficie également au vin, grâce à des projets oenotouristiques tournés vers le haut de gamme. Le Portugal fait figure de précurseur en la matière, avec la Route du Vin de Porto, inaugurée le 21 septembre 1996 et s'appuyant sur le paysage de la Vallée du Douro, classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco. La Route des Vins de Porto impose aux 54 domaines qui la jalonnent des critères de qualité directement et indirectement liés à la culture vitivinicole, dans la région d'appellation du Douro et permet aux amateurs de Porto de découvrir les autres vins de la DOC Douro, ainsi que des vins de muscat et des mousseux. Autre fer de lance des vins portugais sur le marché domestique et à l'export, les Vinho Verde, vins blancs secs de la région de Minho, et notamment ceux produits à base d'Alvarinho, très prisés au Portugal et à l'export. Ces vins imposent une image fraîche et moderne des vins du Portugal, loin de la caricature des vins doux de Porto et de Madère, trop associés à une consommation vieillissante en apéritif et en vin de dessert. A cette image, les vins de Porto eux-même opposent des produits complexes et recherchés des plus fins amateurs, comme les Late Bottled Vintage. D'autres régions et notamment l'Alentejo, au sud du Portugal, ont pris les devants dans cette renaissance et représentent aujourd'hui plus de la moitié du marché portugais du vin.
Dernière minute : reprise confirmée en 2010Sur les onze premiers mois de 2010, les exportations de vin portugais, toutes catégories confondues ont progressé de 17,4 % en valeur à 5,98 M€ et de 9,9 % en volume à 2,38 Mhl par rapport aux onze premiers mois de 2009. Le prix moyen a progressé de 6,9 %. L'Angola occupe la première place des destinations des vins portugais (27 % des ventes en volume et 17 % en valeur), hors vins de Porto et de Madère. Mais la progression des ventes en volumes (+7,8 %) l'emporte de loin sur celle, négative, des ventes en valeur (-4,6%) : le prix moyen du litre de vin importé a diminué de 11,5 %. Le Royaume-Uni est la seconde destination des vins du Portugal qui doublent leur chiffre d'affaires (+99 %) sur cette destination où le prix moyen progresse de 62,5 % par rapport à la même période en 2009. Autres marchés en forte progression : le Brésil (+51 % en valeur et + 53 % en volume) et la Chine (+106 % en valeur et +147 % en volume).