es politiques de marques des vins sur leur présentation packaging (étiquettes, bouteilles et suremballages divers) font toujours l'objet de débats parmi les universitaires et professionnels du marketing du vin. Peu d'entre eux pourtant prêtent attention au problème des « architectures de marques », bien que la compréhension des statuts et des fonctions des différentes marques utilisées pour désigner un même produit soit indispensable pour développer un branding efficace.
Auteurs :
François BOBRIE, Chercheur Associé de l'équipe 'Marchés des Vins et des Spiritueux' à BEM, Directeur CEPE - Centre Européen du Packaging et de l'Emballage, francois.bobrie@free.fr
www.bem.edu/vin
L’architecture de marques organise la lecture et la compréhension d’un texte packaging qui parle du produit et le distingue de ses concurrents pour les consommateurs. La sémiotique narrative, depuis les années quatre-vingt dix, permet l’analyse rigoureuse des architectures de marques. Sa méthode permet d’identifier quel rôle est attribué à chaque marque présente et quel type d’information elle apporte. Habituellement une architecture de marques se compose de trois niveaux : - celui dédié à l’énonciateur, - celui dédié à la catégorie du vin désigné, - celui du vin qui se trouve dans la bouteille étiquetée. La marque de l’énonciateur désigne souvent une entreprise, une winery, dans le monde anglo-saxon et en Chine, ou un domaine dans le monde latin, ou les deux, notamment en Espagne et en Amérique Latine, mais aussi fréquemment en Californie et dans l’Oregon. Généralement cette marque est la plus importante visuellement et/ou symboliquement. Lorsqu’elle est minorée, cela témoigne d’un positionnement atypique dans l’univers concurrentiel.
De la marque « ombrelle » à la marque « topique »La marque de catégorie, équivalent à ce que le marketing appelle « l’ombrelle » pour les produits de consommation, permet aux consommateurs de situer le produits par rapport à un ensemble plus vaste et de faciliter leurs choix. En France cette marque est souvent le nom de l’Appellation d’Origine, ou d’une fraction de celle-ci, selon les degrés de notoriété qui leur sont attachés. Il peut aussi s’agir d’un cépage ou d’un signe distinctif de qualité, tel un classement, ou plus rarement une méthode vitivinicole (exemples : icewines au Canada et en Chine du Nord, vendanges tardives en Alsace et en Allemagne, etc.). Enfin vient la marque dite « topique » parce qu’elle désigne le produit « là-même » (topos), dans sa bouteille. Celle-ci peut-être un nom de cuvée et/ou de parcellaire (fréquent en Californie), associé ou non à un millésime. Cette trilogie de base offre ainsi une multiplicité de « plans d’expression » pour signifier les différents positionnements souhaités en fonction de l’importance qui sera attribuée à chaque niveau. L’architecture de marques peut aussi, pour répondre à des objectifs stratégiques, être réduite à deux, voire (rarement), à un seul niveau. En synthèse, le marketing du vin devrait s’attacher à la question « des marques » d’un vin, au pluriel, plutôt que de s’engager dans l’impasse de la fausse problématique de « la marque » de vin, au singulier, car chaque vin mérite à la fois l’identification du producteur, une localisation catégorielle et une valorisation particulière de sa différence.