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Recherche viticole : Heurs et malheurs des variétés résistantes aux maladies
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Recherche viticole : Heurs et malheurs des variétés résistantes aux maladies

Par Vitisphere Le 11 février 2011
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lors que l'Inra s'apprête à mettre un coup d'arrêt aux variétés inter-spécifiques développées par Alain Bouquet, un programme multidisciplinaire se met en place en Languedoc pour tester à grande échelle les variétés suisses et allemandes.

Le risque de contournement de résistance

La décision n’est pas encore officielle, elle devrait l’être d’ici fin mars. Les variétés inter-spécifiques développées par Alain Bouquet ne seront pas inscrites au catalogue, interdisant ainsi leur diffusion. En cause : le caractère monogénique de ces obtentions, qui a de fortes chances d’induire des contournements de résistances du mildiou. Cette crainte a d’ores et déjà été vérifiée sur deux autres variétés monogéniques : le Bianca, cépage inter-spécifique hongrois issu d’un croisement entre Villard blanc et Bouvier et la variété allemande Regent, fruit d’une hybridation entre Diana et Chambourcin, pour lesquels vient d’être mis en évidence le développement de souches de mildiou résistantes. Alain Bouquet de l’Inra de Montpellier avait initié, dès 1974, un programme d’hybridation en croisant Vitis vinifera avec Muscadinia rotundifolia, une espèce américaine qui dispose de gènes de résistance à de nombreux parasites de la vigne (phylloxera, nématodes...) mais surtout au mildiou et à l’oïdium. A partir de ce premier croisement, le chercheur montpelliérain a pratiqué 5 recroisements successifs avec des variétés connues de Vitis vinifera comme le Merlot, le Grenache ou le Cabernet Sauvignon. Au final, huit obtentions (5 en cépages rouges, 3 en cépages blancs) ont été retenues et sont en cours d’expérimentation dans différents vignobles français : Languedoc-Roussillon, Vallée du Rhône, Bordeaux, Cognac. Plantées à partir dès 2007, ces variétés ont montré jusqu’ici de bonnes résistances au mildiou et à l’oïdium. Mais des travaux récents menés par l’Inra de Bordeaux ont renforcé les craintes sur les risques de contournement de résistance, notamment par le mildiou, champignon doté d’une étonnante capacité à contourner les résistances. «Le gène qu’a développé Alain Bouquet est précieux, c’est celui qui présente aujourd’hui la plus grande résistance au mildiou. Si nous diffusons ces variétés, il est quasiment certain que nous allons perdre cette résistance. On ne peut plus se permettre de diffuser des variétés avec un seul gène de résistance, car une fois la résistance contournée, le gène est perdu pour toujours. L’Inra ne veut pas gaspiller cette ressource », argumente Anne-Françoise Adam Blondon de l’Unité de recherche en génomique végétale de l’Inra à Evry. Il faudra donc attendre les résultats du nouveau programme de recherche lancé par l’Inra en 2000 portant sur des variétés disposant d’au moins deux gènes de résistance au mildiou et à l’oïdium. Compte tenu du parcours obligatoire pour valider cette sélection, ces nouvelles variétés ne seront pas inscrites au catalogue avant 2016.

L'éventualité d'une diffusion dans un cadre restreint

Dans cette attente, il n’est pas exclu que des travaux de recherche se poursuivent sur les variétés de Bouquet pour étudier le contournement de résistance et vérifier, par exemple, s’il est possible de les contenir avec un nombre limité de traitements. Certains en Languedoc réclament une diffusion encadrée de ces variétés. « Poursuivons les expérimentations et autorisons une diffusion très encadrée auprès des viticulteurs qui s’engageront à assurer au besoin 2 à 3 traitements par an pour éviter les risques de contournement », plaide Jean-Pierre Van Ruys, directeur de l’IFV. L’Inra de Pech Rouge suggère une diffusion de ces variétés pour la production de jus de raisin, production très encadrée qui fait l’objet de contrats entre producteurs et industriels. A ce jour, la position de l’Inra vis-à-vis de ces propositions n’est pas arrêtée. «Il faut que l’Inra se rapproche de la profession pour confronter tous les points de vue et trouver un mode de fonctionnement pour une éventuelle diffusion de ces variétés dans un club restreint. Ce que nous voulons éviter à tout prix, c’est une diffusion à grande échelle », estime Anne-Françoise Adam Blondon . Le sort de ces variétés devrait être à nouveau débattu lors d’un prochain CST programmé fin mars.

Un programme d'expérimentation sur les variétés suisses et allemandes

Pour avancer dans une autre direction, l’ICV a initié en Languedoc un projet impliquant les instituts de recherche, chambres d’agriculture et quelques groupements coopératifs ou caves particulières. Tous sont mobilisés, avec le soutien du pôle Qualiméditerranée et Transfert LR, pour engager un programme multidisciplinaire sur les variétés inter spécifiques résistantes aux maladies, développées avec succès en Allemagne et en Suisse. « Si la viticulture veut tenir les objectifs du plan Ecophyto 2018, qui prévoit une réduction de 50% des pesticides d’ici 2018, il faudra avoir recours à ces variétés résistantes. Les dispositifs de récupération de produits de traitement ou les efforts de réglage des pulvérisateurs ne suffiront pas à diminuer les traitements dans ces propositions », plaide Jacques Rousseau de l’ICV, un des porteurs du projet. Qui plus est la pression sociétale sur les traitements phytosanitaires s’amplifie avec les récentes plaintes engagées contre deux arboriculteurs de Corrèze, poursuivis pour avoir traité alors que le vent était trop fort. « Le développement et l’utilisation de cépages résistants oïdium et mildiou permettraient de réduire de 80 à 100 % les fongicides utilisés en viticulture. Tout en répondant au plan Ecophyto 2018, on sécuriserait l’utilisateur et le consommateur Pour les vignobles sans IG ou IGP comme celui du Languedoc, ces nouveaux cépages produisant des vins réellement « biologiques», à coût compétitif, seraient une source importante de compétitivité », soutient Vincent Puigibet, vigneron indépendant également engagé dans ce projet.

Allemands et Suisses ont une longueur d'avance

En Europe, certains pays, au premier rang desquels l’Allemagne et la Suisse, proposent déjà des variétés résistantes ou tolérantes aux maladies. Les Allemands et les Suisses ont mené leurs recherches à partir d’hybrides déjà existants, développés en France pour l’essentiel, dont les qualités organoleptiques étaient jugées insuffisantes. Les travaux suisses et allemands ont visé à améliorer, par recroisement avec Vitis Vinifera, la qualité organoleptique de ces hybrides franco-américains tels le Seyval, le Villard blanc ou le Chambourcin. Ces travaux ont porté leurs fruits. Même si les résistances ne sont pas totales, les variétés obtenues permettent de réduire notoirement les traitements anti-fongiques, voire même de les supprimer. Les qualités organoleptiques de ces nouvelles variétés approchent celles des variétés classiques d’après les tests à l’aveugle menés auprès des consommateurs. Certaines de ces nouvelles variétés sont d’ores et déjà commercialisées. En Suisse, elles représentent déjà 8% de la surface du vignoble bio et 1% de la surface total du vignoble suisse. En Allemagne, certains Länders ont même autorisé certaines de ces nouvelles variétés pour la production de leur Qualitätswein. Le Bronner, variété créée par le Weinbau Institut de Freiburg, a même été autorisé dans une appellation du Trentino en Italie. Et 1000 ha sont en cours de plantantation en Afrique du Sud avec des variétés résistantes du centre de recherche de Freiburg.

Des essais grandeur nature en Languedoc

Le projet languedocien consiste à implanter ces différentes variétés sur des surfaces significatives (de 5 à 10 ha) afin de pouvoir mener des vinifications grandeur nature pour tester, en parallèle des aptitudes culturales, les qualités organoleptiques des vins obtenus sous le climat languedocien. Une dizaine de variétés pourraient être implantées en vue de tester leurs aptitudes culturales et leur potentiel commercial (1). Plusieurs groupements coopératifs sont partants pour ces expérimentations comme Foncalieu, Terroir en garrigues à Corneilhan ou les Vignerons Créateurs dans le Gard. «Nous sommes très motivés pour engager ces essais », témoigne Etienne de Parzia, directeur de Terroir en garrigues. « Ces cépages seraient une avancée pour réduire nos coûts de traitement et préserver l’environnement. L’idée de les implanter d’emblée à grande échelle permet d’accélérer leur éventuelle diffusion. Les viticulteurs des environs pourront venir constater de visu le comportement de ces variétés. C’est beaucoup plus convaincant que des essais réalisés sur des micro-parcelles ». En parallèle à ces essais terrain, IFV, ICV et Chambre d’agriculture travailleraient sur trois volets de ce dossier : Le recensement des cépages existants, leur niveau de résistance et leur potentiel qualitatif Une étude de marché auprès des éventuels acheteurs pour mesurer leur intérêt par rapport à ces variétés résistances et cerner sur quels segments de marché ces vins pourraient être positionnés. Cette étude viserait également préciser les axes de communication autour de ces produits pour éviter toute confusion avec les OGM. Les possibilités de transfert et de partenariat avec les pépiniéristes français pour organiser la diffusion de ce matériel végétal.

Des freins réglementaires

La mise en place de ce projet se heurte à des problèmes réglementaires. Ces variétés suisses et allemandes ne sont pas inscrites au catalogue, leur plantation en France est donc interdite sauf à titre expérimental dans le cadre d’essais ne dépassant pas 5000 m2. Par ailleurs le vin ainsi produit ne peut être commercialisé. Pour lancer ce programme, il faut donc faire évoluer les textes. La section vigne du CTPS a émis un avis favorable à cette évolution réglementaire et transmis la demande au Ministère. Un dossier a par ailleurs été transmis par les professionnels au Ministre lors de sa récente visite dans l’Hérault le 31 janvier dernier. Le volet financier de ce projet reste également à boucler. Des demandes de financement ont été adressées aux collectivités locales et à France Agrimer. Les protagonistes de ce projet espèrent qu’une solution pourra être trouvée d’ici la fin 2011 pour lancer les plantations en 2012. (1) Johanniter, Muscaris, Souvignier gris, Prior, Monarch, Cabernet Carbon, Cabernet Cortis, Saphira, Rondo, Cabernet Blanc, Cabernet Jura…. font partie des variétés qui pourraient être testées.

 

 

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