auchemar des Å“nologues, les Brettanomyces, levures de contamination des vins en cours gt !d’élevage, sont à l’origine de la production des phénols volatils, responsables de profondes altérations des arômes des vins rouges : perte des arômes de fruit, amertume, caractère métallique, arômes prononcés de cuir, d’animal ou d’écurie. Plusieurs études statistiques menées entre autres en Bourgogne, en Val de Loire et en Vallée du Rhône, montrent que ces levures indésirables sont présentes dans 50% des cuvées en cours d’élevage. Fort heureusement, la présence de phénols volatils reste, quant à elle beaucoup plus sporadique. A ce jour aucun traitement ne permet d’éliminer les phénols volatils. Le respect de bonnes conditions d’hygiène en cave permettent néanmoins de limiter le développement des Brettanomyces et par voie de conséquence la production de phénols volatils. Depuis 2000, les équipes de l’IFV de Beaune, de Bordeaux, de Nîmes et de Nantes, travaillent sur différentes techniques physiques susceptibles d’éliminer les Brettanomyces en cours d’élevage ou avant la mise en bouteille. Les récents essais menés en 2007 par l’IFV pôle Bordeaux confirment notamment l’intérêt du traitement aux Champs Electriques Pulsés (CEP).
La technique des CEPLe principe consiste à exposer le vin contaminé à un champ électrique intense sous forme d’impulsions de courte durée (1 à 10 micro seconde) répétées entre 2 et 50 fois. Ce traitement, plus connu sous le nom d’électroporation, a pour effet de rendre poreuse la membrane des cellules des levures, entraînant la migration vers l’extérieur du contenu de la cellule et donc la mort du micro-organisme. Pour mener ces essais, l’IFV de Bordeaux en partenariat avec le CRT AGIR de Pessac a utilisé un matériel réalisé sur demande par la société Thomson. Ce pilote comprend : - un générateur haute tension chargeant les condensateurs en continu, -des condensateurs libérant l’énergie nécessaire au niveau de la chambre de traitement, - deux électrodes entre lesquelles circule le vin à traiter, - deux chambres de traitement permettant de traiter successivement deux fois le vin selon les mêmes réglages dans chacune des deux chambres, - un oscilloscope mesurant la tension aux bornes des électrodes et visualisant la forme des impulsions. Dans les premiers essais réalisés, ce sont les impulsions carrées qui ont été retenues, car elles présentent l’avantage de délivrer une énergie électrique à la tension maximale pendant la quasi-totalité de l’impulsion.
Une bonne efficacité sur la duréeLes essais réalisés dès 2007 sur des vins rouges de 2006 en cours d’élevage naturellement riches en micro-organismes , ont pour objectif de comparer l’efficacité de trois procédés physiques pour maitriser la microflore d’altération des vins( levures et bactéries) mais plus particulièrement les levures du type Brettanomyces : les CEP, la filtration, la flash-pasteurisation. Il est prévu de reconduire ces essais cette année en ajoutant d’autres techniques comme la centrifugation. Ces différents traitements ont été menés sur des vins avant mis en bouteille, conservés par la suite avec deux niveaux de SO2 : un lot à faible dose de SO2 libre ( SO2 actif inférieur à 0,4 mg/l) et un lot à dose plus élevée ( SO2 actif supérieur à 0,6 mg/l) . Les vins sont suivis pendant un an après la mise en bouteille avec 4 contrôles : à 10 jours, 3 mois, 6 mois et un an après traitement. Les résultats des tous derniers essais mettent en évidence l’efficacité sur la durée de deux techniques : la flash-pasteurisation et les CEP. Ces deux techniques sont celles qui présentent la meilleure efficacité dans le temps. «A 10 jours après la mise en bouteille, on observe des résultats similaires entre toutes les techniques. Mais au bout d’un an de conservation, c’est avec les CEP et la flash-pasteurisation que les populations de Brettanomyces sont les plus faibles. Ces deux techniques obtiennent de bons résultats non seulement sur le plan microbiologique, mais elles présentent l’avantage d’avoir une incidence non significative sur la composition analytique des vins (contrairement à certaines techniques de filtration qui appauvrissent les vins en polyphénols). Elles sont également sans impact sur les qualités organoleptiques », affirme Emmanuel Vinsonneau de l’IFV Bordeaux en charge de ces essais. Ces résultats ont été obtenus notamment sur les vins les moins protégés en SO2, alors que les vins des témoins non traités ont vu leur population de Brettanomyces et leur teneur en phénols volatils, augmenter significativement en cours de conservation, même sur les lots fortement protégés par le SO2.
Une technique à coupler avec un traitement thermique en amont« Ces techniques nous semblent intéressantes dans une optique des réduction des intrants et notamment du SO2. Pour plus d’efficacité et pour une meilleure maîtrise de la dépense énergétique, il semblerait intéressant, dans le cas des CEP, d’essayer de positionner en amont un traitement thermique de courte durée qui permet d’affaiblir les micro-organismes suivi du traitement aux CEP ; ce dernier peut alors être plus modéré et assurer la destruction des micro organismes et notamment des Brett. C’est un axe de recherche que nous allons creuser au cours des prochaines années », assure le chercheur bordelais. L’équipement requis pour envisager un traitement aux CEP représente un investissement difficilement accessible actuellement pour des caves particulières voire même des structures coopératives, mais si les prochaines expérimentations confirment l’intérêt réel de cette technique, il sera sans doute possible d’envisager ce traitement sous forme de prestation de service, avec la mise au point d’unités mobiles même titre que la filtration ou le traitement thermique de la vendange et avec des coûts de réalisation acceptables.
Des travaux en cours sur la biodiversité des BrettEn parallèle de ces travaux et dans le cadre du groupe de travail national mis en place sur le thème de Brettanomyces, l’IFV de Beaune travaille sur la biodiversité des Brettanomyces : il s’agit de déterminer d’où viennent ces levures : si elles sont déjà présentes sur le raisin et en quelles quantités et ce qui favorise leur développement, idem pour leur développement en cave. Les résultats de ces travaux doivent permettre de mieux cibler les interventions pour lutter efficacement contre le développement de ces levures indésirables. Les premiers résultats seront présentés fin août 2009.
Légende photo : Equipement de Champs électriques pulsés – Agir Talence (33)
Source : Matevi France