Tonnellerie : le retour du chêne espagnol

uercus, une tonnellerie d’Alava dans le Pays Basque espagnol a relancé la production de barriques en chênes espagnol provenant exclusivement de forêts de la Rioja et destinées à l’élevage de vins de qualité. L’entreprise a abattu ses premiers arbres en 2006 et les premières barriques devraient abriter le millésime 2009.

Objectif millésime 2009

Quercus, une tonnellerie d’Alava dans le Pays Basque espagnol a relancé la production de barriques en chênes espagnol. L’entreprise a abattu ses premiers arbres en 2006 dans une même forêt du Manzanares dans la Rioja Alta. Ces chênes ont été séchés de forme naturelle pendant deux années dans les installations de la société où elles devraient être bientôt transformées en douelles. La chauffe sera réalisée ensuite selon le système innovateur de chauffe rotative horizontale (TRH) qui permet une qualité constante. Ces barriques abriteront le millésime 2009 et feront l’objet d’un programme de recherche reposant sur des tests organoleptiques comparatifs sous la responsabilité du Centre de Recherche et de Développement Agricole (CIDA).

Assurer la pérennité de l'approvisionnement

Le projet est né sous l’impulsion du groupe Rivercap auquel appartient Quercus, fournisseur bien connu en produits œnologiques. Il propose le suivi comparatif détaillé de chaque type de chêne utilisé dans l’élevage du vin. Comme l’explique l’entreprise, « les perspectives futures du chêne européen (et plus particulièrement des chêneraies d’Europe de l’Est, ndlr.) et plus particulièrement sa disponibilité sont préoccupantes. » Outre son intérêt scientifique, l’étude a pour ambition d’assurer la pérennité de la disponibilité de ce type de bois indispensable à l’industrie viticole espagnole – et de mentionner l’exemple français qui a su garder une utilité œnologique à ses forêts de chêne et qui est, toujours selon l’entreprise, « le seul pays en mesure de garantir et certifier la fourniture en chêne de qualité à la filière ».

Une diversité prometteuse

En Espagne, on trouve différentes variétés de chênes: le Quercus petraea (chêne que l’on utilise majoritairement en France) qui donne d’excellents résultats pour l’élevage du vin mais qui n’est malheureusement disponible qu’en faibles quantités en Espagne ; le Quercus robur des zones plus humides qui apporte peu d’arômes au vin ; et le Quercus pyrenaica que l’on trouve communément dans la Rioja, à Alava et en Castilla et Léon : ce dernier, excellent pour l’élevage du vin, présente encore de nombreux nœuds et des irrégularités dus au manque de suivi sylvicole et qui rendent pour l’instant difficiles la production de douelles pour la tonnellerie. Enrique Echepare, le président du Grupo Rivercap explique : « les forêts disparaîtront si nous ne leur donnons pas une valeur économique durable. (…) Si nous ne réagissons pas maintenant, ces forêts finiront par disparaître. Il est nécessaire que le Gouvernement de la Rioja – comme l’a fait celui de Castilla et Léon – élabore une politique destinée à ce que dans un futur proche, nous puissions tirer un profit œnologique de cette précieuse ressource. »

Des propriétés œnologiques exceptionnelles

Des chercheurs du SINC (Service d’Information Scientifique dépendant du Ministère de la Recherche espagnol, ndlr) mènent parallèlement une étude sur l’impact de ces bois sur les vins : ils comparent ainsi trois types de chêne (l’espagnol de Salamanque ; le nord-américain du Missouri ; et celui du centre de la France) et leur interaction avec quatre vins d’AOC Bierzo, Toro, Ribera del Duero et Rioja. « Les résultats indiquent que d’un point de vue chimique comme sensoriel, le chêne espagnol peut parfaitement être utilisé pour le vieillissement de vins de qualité », explique Estrella Cadahia, une des auteures de l’étude qui confirme les travaux réalisés par la Tonnellerie Quercus. Cadahia ajoute que le Quercus pyrenaica présente des propriétés structurelles optimales (qualité du grain, porosité et perméabilité) pour une utilisation œnologique. De plus, les caractéristiques techniques de ce type de bois (quantité de polyphénols, tannins et composés aromatiques volatiles) sont très similaires à d’autres bois reconnus pour leurs qualités comme le Quercus petrae (français) ou le Quercus alba (nord-américain).

Un impact olfactif remarquable

La dégustation organisée par l’équipe de scientifiques a montré selon Silvia Pérez, une autre chercheuse de l’équipe que « les principales différences entre les vins ont été détectées dans la phase olfactive de la dégustation : les vins élevés en chêne espagnol présentent des notes boisées plus saillantes et des arômes toastés plus marqués. » Cette remarque est valable pour les quatre vins testés par l’équipe. Ces études ouvrent la voie à une nouvelle exploitation des chêneraie dans la péninsule ibérique à des fins œnologiques. Les surfaces occupées par ces forêts couvrent plus d’un million d’hectares en Espagne et sont essentiellement situées en Castille et Léon (722 700 ha). Ce bois était traditionnellement utilisé pour la fabrication de bateaux, une activité qui fut peu à peu abandonnée au profit du bois de chauffage. L’intérêt des tonnelleries et du secteur viticole tout entier devrait rapidement changer ce panorama.

 

 

 

Retrouvez une sélection de barriques sur le Salon Virtuel de Vitisphere