’est une semaine d’automne où il pleut de la vraie pluie bien plus que de l’actualité sur le vin. Dans ce quasi désert de la toile et du papier, se dessinent les tendances à l’oeuvre, et en creux, les faiblesses françaises. C’est ainsi qu’il faut lire la promotion de l’oenotourisme comme celle du Beaujolais, tout court, et le nouveau qui s’annonce. Née après-guerre, l’oenologie s’est imposée dans les caves, creusant le fossé entre deux conceptions du vin : Bordeaux et Emile Peynaud d’un côté, la Bourgogne, Jules Chauvet et Max Léglise de l’autre. Epousant cette tendance, Jacques Berthomeau, ex pompier du vin pour l’Etat et blogueur inaugure ainsi cette semaine une nouvelle rubrique en faisant entrer dans son blog les « oenologues ».
Bon week-end et à la semaine prochaine. Catherine Bernard
Nous vivons dans une société devenue de loisirs, et nous buvons du vin par plaisir. C’est une tendance lourde qui se traduit, depuis bien des années déjà dans les autres pays producteurs dits du Nouveau monde, en Californie en particulier, en France maintenant, par une offre économique dédiée : l’oenotourisme ou le tourisme vitivinicole. Le secrétaire d’Etat au tourisme, Hervé Novelli, est ainsi allé cette semaine en faire la promotion à Avignon où se tenait la 3ème édition de la réunion professionnelle internationale « Destination Vignobles 2008 ». Il y a annoncé la création d’un label national. Le site de voyage.youvox cite ainsi le secrétaire d’Etat : « L’oeno-tourisme représente un véritable relais de croissance pour le tourisme français et une porte d’entrée sur l’offre touristique des territoires. A l’heure où près d’un Français sur cinq choisit sa destination de vacances parce qu’elle est vinicole et près de 40% des visiteurs étrangers choisissent la France pour découvrir son vin et sa gastronomie, je suis déterminé à développer et dynamiser cette filière. »
Relatant la visite ministérielle, le quotidien régional La Provence pointe le retard français : « Première destination touristique mondiale, la France doit faire feu de tout bois pour le rester. Les professionnels doivent notamment rattraper leur retard sur les USA, l'Espagne ou même l'Australie en matière d'oenotourisme. Avec, pour mot d'ordre, l'accélération de la"mise en marché de la France des vignobles et des vins ».
Dans le même temps Aqui.fr site d’informations régionales fondé par un journaliste du quotidien papier Sud-Ouest, faisait écho de la soirée de remise des « Best of wine tourism», concours international avec des étapes régionales organisé par la Chambre de commerce et d’industrie de Bordeaux. Cette année, 87 propriétés viticoles bordelaises concouraient pour décrocher un prix et figurer dans le guide. C’est à Bordeaux, encore, que se tiendra le premier salon mondial de l’oenotourisme, annonce l’Echo Touristique . La première édition se déroulera en novembre 2009. Je remarque que pour ce qui est au moins de la médiatisation, la dimension touristique l’emporte nettement sur la dimension viticole, et Bordeaux sur les autres régions viticoles françaises. L’oenotourisme peut-il venir au secours des ventes et de la consommation de vin ? Il faut lire en contrepoint sur les sites Winealley et Decanter la grogne montante des négociants anglais. « Les prix des pimeurs 2008 de Bordeaux vont devoir baisser », titre la revue britannique. Le journaliste Oliver Styles entonne le refrain des négociants anglais, lesquels estiment avoir chèrement payé en 2007 un millésime médiocre. Le journaliste cite notamment Robert Lench de Bordeaux Wine Investments : « La Russie n’achète pas en primeur et bien que les producteurs parient sur les achats de la Chine au prétexte que 8 est là-bas un chiffre porte-bonheur, je ne suis pas sûr que les investisseurs du sud-est asiatique soient naïfs ». Il y a un vieux proverbe qui dit : il ne faut pas prendre des vessies pour des lanternes. Décliné au vin, cela pourrait donner : les beaux châteaux ne font pas le bon vin.
Le Beaujolais, l'ancien et le nouveauC’est un succès, tout au moins médiatique. L’Express, le Point , Bussiness Wine International et le site espagnol Elmundovino, tous reprennent le reportage de Reuters sur le Beaujolais.
L’agence de presse relaie ainsi la campagne : « Le Beaujolais veut redorer le blason terni de son vignoble ». Il y a une belle mise en scène à ce renouveau : une marquise, Roussy de Sales, un château du XVIIème siècle, la Chaize à Odenas, et de « prestigieux invités » que je vous laisse découvrir. Au cas où nous ne serions pas convaincus par la démarche des vignerons du Beaujolais, ils abattent une carte maîtresse : « une note d'enfer dans le Wine Spectator » après la visite, « exceptionnelle dans ce vignoble» de son journaliste Matt Kramer. A quelques semaines du Jeudi J, le nouveau, cousin médiatique du Beaujolais tout court, s’offre cette année pour son affiche l’artiste niçois Ben. Le moteur de recherche Viafrance l’a bien repéré. Car de ce côté-là, les nuages aussi s’amoncellent. Selon Resthonews le grossiste France Boisson veut « dans un contexte de baisse de la consommation (...) renouveler le concept des vins primeurs », en mettant en avant les vins de cinq autres terroirs : des vins primeurs de 5 autres régions ( Touraine, Anjou, Gaillac, le Côtes du Rhône et Mâcon). Fini donc pour le Beaujolais le monopole national du genre.
A propos de la langue du vinOeno ou vinum... Dans la langue du vin d’aujourd’hui, je remarque que l’on a de plus en plus recours à ses origines grecques, oeno, qui donnent le mot oenologie, que latines, vinum. Il en va de même dans les caves et les chais, dont on ne sait plus toujours qui du vigneron ou de l’oenologue fait le vin. C’est ainsi que Jacques Berthomeau, blogueur, « impertinent et pertinent », tente, à sa manière, de cerner le phénomène . Il annonce une nouvelle rubrique : « Les 3 mêmes Questions à un ou une œnologue… ». Les trois questions sont presque aussi longues que les réponses de Sophie Pallas, la première à se coller à l’exercice. Cette dernière n’évite pas vraiment le piège du discours consensuel. Les mots en oeno sont promis à une longue vie ! Des vins qui ont du corsage Toujours dans la langue du vin, Martine Coutier, chercheur au CNRS, souligne dans son dictionnaire, qu’au fil des siècles, le vin devient métaphore du corps et, après un XIXème siècle ayant achevé de brider les moeurs, l’expression des fantasmes des hommes donnant ainsi les mots de "corsage ou cuisse", ou les expressions « rhabiller la gamine ». Le magazine américain Playboy revisite cette vision bacchique : 550 bouteilles de quatre crus habillées avec des unes légèrement déshabillées ou suggestives des années 60. Selon le site Menstyle, les sommeliers chargés de cette sélection veillent à ce que « l'adéquation étiquette / arôme soit la plus parfaite possible ».




