e prochain Vinitech Bordeaux, salon mondial des équipements et techniques de la vigne, du vin et des spiritueux, se déroulera du 3 au 6 décembre 2003.
Le thème de cette année sera 'pas de grand vin sans grande technique'. A cette occasion, Vinitech a fait réaliser cette enquête nationale au mois de mai 2002, par l'Institut d'études Gaultier & Associés.
Quelles sont les grandes mutations qui ont marqué la vigne et les vins de France ces 2 dernières décennies ?
Quelles sont les perspectives pour les prochaines années ?
QUELQUES CONSTATS 'Au cours des 10 dernières années, la viticulture a connu plus d'évolutions qu'au cours du siècle précédent'. La France demeure un pays leader en matière de recherche et de technologie. Les évolutions extrêmement importantes ayant affecté la viticulture depuis 20 ans témoignent d'une forte capacité à s'adapter. Quelles explications la filière donne-t-elle à cette dynamique sur fond de mondialisation et de contraintes du marché ? - Coopération optimale entre la recherche fondamentale, les centres d'instituts et les chambres d'agriculture, - Prise de conscience constante de la notion de qualité par l'ensemble des acteurs de la filière, - Gestion informatique omniprésente de toutes les étapes de l'élaboration du vin (de la culture des vignes jusqu'à la commercialisation des bouteilles) avec arrivée d'internet. LES FAITS MARQUANTS DES 2 DERNIERES DECENNIES Les années 80, gestion et maîtrise du process vin avec Prise en considération et maîtrise de l'hygiène (de la vigne à la mise en bouteilles), Maîtrise scientifique et technique des tâches et soins apportés à la vigne et au vin comme les nouveaux programmes de lutte raisonnée, maîtrise des températures, maîtrise des tâches mécaniques ? machine à vendanger, prétailleuse, effeuilleuse mécanique, sécateur, épampreuse, sortie du 1er guide du désherbage, Apparition des méthodes soustractives comme alternative possible aux méthodes additives, Modernisation des caves de vinification avec par exemple automatisation des processus de macération et d'extraction, microfiltration. Les années 90, vers une viticulture de précision Application généralisée à l'ensemble des vignobles de la gestion et la maîtrise rigoureuses des domaines viticoles au travers de la protection raisonnée (retour à l'enherbement) et la mise en service de la micro informatique (pour la gestion commerciale et également pour le suivi des cultures et de la production), Modélisation de la qualité : le terroir et sa typicité commencent à avoir une existence plus objective, Emergence d'un concept de production intégré avec maîtrise des résidus phytosanitaires, Evolution des équipements pour les travaux viticoles : machines à vendanger, tracteurs, outils de tailles? pour les travaux vinicoles (capteurs pour la maîtrise des températures) avec une nette amélioration des équipements de la cave (pressoirs à membranes, systèmes automatisés pour le travail de l'extraction et de la filtration). LES CLES POUR LA DECENNIE A VENIR Une corrélation forte entre vin et technologie Interdépendance totale entre la culture de la vigne et l'élaboration du vin, Aux savoir-faire traditionnels fondés sur l'empirisme et une transmission orale se substituent de plus en plus des compétences fondées sur l'observation, l'analyse et l'expérimentation : La technologie de plus en plus au service de la qualité, du produit et du consommateur, Utilisation raisonnée de la technologie au service d'une vraie stratégie du vigneron avec des itinéraires de cultures et d'œnologies bien définis en amont, La technologie semble permettre une meilleure compréhension des pratiques traditionnelles et contribuer à la préservation de la typicité des terroirs, On s'accorde pour ne pas (plus) opposer tradition et technologie parce que : La recherche scientifique permet de mieux comprendre certaines pratiques issues de la tradition, On peut continuer à faire des vins de qualité avec de faibles apports technologiques, On peut de plus en plus anticiper le produit que l'on veut créer, Les choix techniques et les approches œnologiques sont fonction des cahiers des charges respectifs à chaque élaboration. Les mutations attendues nécessiteront des compétences et des investissements importants.Relationnel plus fort entre le vin et le consommateur : Elaboration d'un produit de plus en plus propre, Respect de la santé du consommateur et valorisation du vin sur le plan diététique et santé, Gestion et suivi de la qualité de la vigne à la bouteille (sécurité alimentaire, traçabilité, respect de l'environnement, diminution des intrants, gestion des effluents?), Intervention croissante du consommateur dans la définition du produit avec prise en compte de 4 exigences : L'authenticité et l'originalité, La santé et la sécurité, La diversité, Des technologies non polluantes.
Les mutations passées et à venir au travers des grands principes de viti-vinicultureL'approche agronomique : vers un double axe de travail Le 1er : la sélection clonale et variétale (elles parviennent à un niveau jamais atteint, fruit et aboutissement des recherches initiées il y a 50 ans) avec : - Sélection des cépages en fonction des rendements et de leur qualité, - Sélection clonale sanitaire et génétique des cépages. En perspective, de nouvelles ouvertures en biologie et génétique moléculaire au service de variétés résistantes aux maladies et autres parasites : Travaux de recherche sur les OGM. Le 2ème : les recherches portant sur le sol et les interférences sol - plant : - Définition de nouvelles conduites des cultures, - Appréciation plus fine des besoins de la plante, - Application de techniques de greffes avec désinfection des bois et plants. En perspective, une meilleure connaissance de l'activité biologique (rôle des acariens et des champignons) et de l'interdépendance scientifique sol?vigne. La protection du vignoble : vers une réduction généralisée des produits utilisés - Développement des mesures prophylactiques, - Développement des produits phytosanitaires de synthèse, - Réduction de l'utilisation des fertilisants, d'herbicides, de pesticides et de fongicides et retour aux méthodes 'traditionnelles' comme le labour, - Emergence de nouvelles techniques de traitement intégrant les approches biologiques, - Elaboration d'outils d'aide à la décision permettant d'anticiper les traitements et de les utiliser avec une plus grande précision (et non systématiquement). En perspective, application généralisée de l'approche 'viticulture raisonnée' visant à maintenir et préserver un écosystème faune?flore?vigne dans un souci de respect de l'environnement et de rentabilité des exploitations. Cette évolution progressive serait susceptible de devenir obligatoire pour les AOC. Les équipements pour la vigne : vers une mécanisation de précision - Mécanisation de plus en plus complète de la viticulture, - Développement d'équipements permettant de revenir au travail du sol (désherbage mécanique, matériel adapté à tous types de terrain, machines à planter réalisant un traitement herbicide du sol), - Mécanisation soigneuse des soins apportés à la vigne (mécanisation de la prétaille à l'aide de sécateurs électriques) au moment de l'ébourgeonnage, du relevage par exemple, - Généralisation de la machine à vendanger avec souci du respect du raisin, - Utilisation plus précise des épandeurs et pulvérisateurs (mieux dirigés, mieux localisés sur la grappe, moins sensibles aux effets du vent). En perspective, efficacité accrue des différentes opérations avec un souci de précision, de rapidité, d'amélioration du confort du travail, d'amélioration de la qualité du raisin et de la vendange. Les équipements pour les caves : modernisation et précision - Evolution très importante des équipements en cave et chai : matériaux utilisés pour les contenants (acier inox, matériaux synthétiques, barriques en bois), les pressoirs (automatiques, pneumatiques, flash détente), les capteurs (analyse des densités, température, taux de sucre, gaz?), les systèmes de remontage et pompage, filtrations?, - Automatisation de certains process allant vers la robotisation, - Utilisation de matériel permettant un suivi informatisé du processus de vinification, d'élevage et du vieillissement du vin, - Amélioration des conditions de conservation du vin qu'il soit destiné au vieillissement ou destiné à être vendu à court terme. En perspective, des équipements au service d'une œnologie de précision afin d'assurer la maîtrise du process, le contrôle permanent de la qualité et la diminution des produits exogènes. Les techniques vinicoles : vers une œnologie de précision - Amélioration de la qualité du raisin avec diminution de l'oxydation en accélérant le temps entre la vendange et la réception, amélioration des matériels pour transporter le raisin, prise en compte de la variable climatique, tris sélectifs, - L'œnologue est devenu un acteur incontournable : on reconnaît mieux son rôle et on revendique plus son intervention, - Meilleure compréhension des phénomènes biologiques et physico-chimiques, - Transferts de technologies issues d'industries nucléaires ou agroalimentaires (osmose inversée, microfiltration, électrodialyse, utilisation d'enzymes). En perspective, dans la viticulture de précision se prolonge une œnologie de précision avec une grande considération pour le respect du Vin au travers de l'amélioration de sa stabilité, les procédés physiques ou biologiques substitués aux méthodes chimiques ; le tout dans l'objectif d'apporter une naturalité accrue au Vin. Dans la pratique, la production du vin va de plus en plus s'appuyer sur une collecte d'informations en amont. De plus, la recherche de la qualité optimale impose la mise en place de structures de stockage spécifiques (caves climatisées, conservation des vins à basse température tenant compte de la fraîcheur du produit différente selon les processus de vieillissement?). Le packaging : un produit pour un marché précis La bouteille - La bouteille verre aujourd'hui incontournable et ses attributs (bouchons et étiquettes) répondent à des cahiers de charges de plus en plus contraignants en ce qui concerne leur intégration dans des processus de type industriel, - Le marché a commencé à imposer son besoin de différenciation exprimé au travers de la bouteille, de l'étiquette à l'aide de signes de reconnaissance spécifiques. En perspective, recherche de différenciation pour un consommateur aux nombreuses exigences. La bouteille sera moins lourde (la 75cl est passée de 5-600gr à 400 gr), dans des formes et couleurs nouvelles (petites bouteilles de champagne destinées aux établissements nocturnes), de contenance moindre (généralisation des 50cl pour les mono ménages) ou proposée en pack. L'étiquetage - Une double évolution complémentaire due à l'amélioration de l'information destinée au consommateur, une normalisation croissante des mentions obligatoires et au développement de la dimension Communication et des créations nouvelles, - L'étiquette est de plus en plus sophistiquée, rompt parfois avec les codes traditionnels, prend des formes diverses (bandeaux, collerettes, étiquettes arrière). En perspective, vers une sophistication pour répondre à une forte concurrence et un consommateur en attente d'informations. Le bouchon - La problématique du bouchon se situe à la convergence des préoccupations hygiéniques, qualitatives et marketing avec une remise en question du liège qui ne correspond plus aux critères de qualité au plan international, - Apparition de nouveaux produits et matériaux (plastiques, cellulaires, agglomérés, composites, synthétiques) et en parallèle le traitement du liège pour éviter les odeurs, les moisissures et protection du liège par du silicone, - Apparition de produits de couleur. En perspective, existence d'alternatives utilisées dans certains pays comme les capsules à vis mais règne encore un fort attachement des consommateurs au bouchon traditionnel.
(suite)L'hygiène et le respect de l'environnement : vers la persévérance? L'hygiène Poursuite des progrès et de la prise de conscience de l'application de cette notion. Dans ce domaine, plusieurs objectifs sont prioritaires : - Préserver la stabilité microbiologique et les caractéristiques organoleptiques, - Préserver les qualités du vin acquises au cours du processus d'élaboration jusqu'au consommateur final (entretiens de stockage, maîtrise des conditions d'ambiance ? température, humidité, ventilation ? processus d'embouteillage), - Préserver la santé du consommateur et du producteur. L'environnement Prise en considération de la notion d'impact sur l'environnement avec maîtrise et traitement des effluents, des sous-produits de la vinification (boues, lies, marcs, tartre), des déchets d'emballage. En perspective, instauration de réglementations comme par exemple les deux dispositifs réglementaires récents comme la loi sur l'eau et la réglementation ICPE (Installation Classée pour la Protection de l'Environnement) concernant les caves produisant plus de 500 hl. De plus, la dimension hygiène est évoquée comme un élément de communication important lorsque le viticulteur reçoit des acheteurs professionnels. La sécurité alimentaire ou traçabilité omniprésente Des acquis : abandon et limitation progressive de certaines techniques avec diminution de l'utilisation du SO2, abandon des filtres en amiante ou des capsules en plomb, diminution de l'utilisation des intrants. En perspective, développement inéluctable de la traçabilité pour rassurer le consommateur avec des contrôles indispensables. La formation : professionnalisation de la filière Importance croissante de la formation accompagnant l'évolution des technologies, dans la continuité des mutations constatées au cours de 2 dernières décennies avec multiplicité des filières, BTS, formation des œnologues, centres de formations techniques et commerciales? La qualité : enjeu essentiel vers une viticulture raisonnée L'amélioration de la qualité devient un enjeu transversal essentiel pour l'avenir. Elle peut se résumer en 2 ensembles d'enjeux ayant donné lieu à l'élaboration de référentiels :La production intégrée de raisins ou une viticulture durable avec trois objectifs : 1. Produire des raisins de haute qualité (avec un minimum de résidus), 2. Respecter l'environnement (diminution de l'utilisation des produits phytosanitaires et des fertilisants, préservation de la diversité biologique, préservation des mécanismes naturels de régulation, atténuer la pollution de l'eau, du sol et de l'air) et les hommes, 3. Préserver la rentabilité économique et la pérennité des exploitations. Les pratiques œnologiques intégrées répondant aux objectifs suivants : 1. Elaborer des vins de qualité, 2. Préserver la santé du consommateur, 3. Répondre aux attentes des consommateurs en terme de qualité organoleptique, typicité, tradition, 4. Préserver l'environnement, 5. Renforcer des pratiques maîtrisées, raisonnées respectant et valorisant les qualités du raisin, 6. Préserver la rentabilité économique au travers d'une gestion optimale des outils de production.En perspective, bien que débouchant encore rarement sur des procédures de certification, ces référentiels constituent des repères vers lesquels la production tend progressivement. Cette certification se développera avec des apports économiques et d'organisation. Il s'agira de garantir une origine mais également une démarche avec des contrôles de traçabilité. Aux regards des perspectives limitées de la démarche Bio, les perspectives prévoient une généralisation de la viticulture raisonnée. L'approche des marchés : pour un consommateur averti ! - La mondialisation des marchés a plusieurs conséquences : Développement d'une concurrence des pays producteurs non européens (Australie, Chili, USA, Afrique du Sud?) sur nos marchés export traditionnels. Compétitivité de vins technologiques relativement standardisés mais dotés d'une qualité indéniable sans typicité. Apparition de ces produits sur le marché français. Nécessité de renforcer les dispositifs réglementaires définissant le 'Vin' au niveau de l'OMC, de la FAO et de l'OMS - Seul le vin de raisin est bon pour la santé !- Autre concurrence, moins souvent évoquée, celle des principaux pays méditerranéens comme l'Espagne, le Portugal, l'Italie, la Grèce : pays ayant fait de gros efforts de formation et venant d'acquérir des équipements modernes et des technologies de pointe. - Importance croissante de la grande distribution avec rationalisation des achats, qualité croissante de la présentation des produits (réserve ventilée, respect des conditions de manutentions et de stockage?), développement d'offres extrêmement larges intégrant des produits d'importation, mise en œuvre d'opérations promotionnelles et d'animations fortes porteuses de pédagogie nouvelle. Problématique : certains producteurs ne sont pas encore adaptés à cette nouvelle distribution regrettant encore les relations plus souples avec les cavistes traditionnels. - A retenir aussi l'émergence de nouvelles approches Marketing avec Des segmentations de marchés en terme de gamme, Confrontation à des positionnements nouveaux et à des discours différents en terme de communication (vins exotiques, vins tendances, vins style de vie, vins fruités, vins boisés?), Aujourd'hui, tendance au positionnement simple au détriment des produits complexes que sont les vins français (ces vins permettent à de nouveaux consommateurs d'accéder à leur consommation de manière simple et relativement immédiate), Aussi, ces approches tendent à privilégier certains circuits de distribution pour des produits disponibles en quantité restreinte type caviste, CHR. - De plus, la recherche de différenciation conduit à l'élaboration de produits de niche visant une meilleure rentabilisation de la production (micro cuvées, vins de garage), - Du côté de la demande, l'évolution est constante en matière de culture et de compétences du consommateur (essor des clubs de dégustation, de la presse spécialisée, succès des salons spécialisés). Il peut être le garant d'une certaine tradition au travers d'une demande s'exprimant en termes de nature et d'authenticité. En perspective, importance croissante du marketing pour positionner les produits (AOC-Vin de Pays, Vin de Table, Vin de terroir- Vin de cépage, Vin rouge et autres vins avec la dimension santé propre aux rouges) et structurer les offres en niveau de gamme et surtout pour asseoir les marques. Enfin à l'avenir, les différentes mutations évoquées précédemment concourent à protéger globalement le consommateur au niveau sanitaire et concernant l'authenticité des produits. En cela, il conviendra de plus en plus de le faire savoir et donc de le communiquer afin de garantir la sécurité alimentaire et, ce faisant, en changeant avec l'image traditionnelle de l'univers du vin.
Annexe : objectifs et méthodologieObjectifs Recenser les différentes mutations ayant affecté : - la viticulture - la production et l'élevage du vin - l'environnement immédiat de la viticulture et de la production Période de référence : les 20 dernières années et la prochaine décennie. Méthodologie 4 entretiens en face à face auprès de l'INAO, CEMAGREF, ITV et ONIVINS 48 entretiens téléphoniques auprès des * représentants des Unions des œnologues en région viticole * ITV régionaux * Centre de recherches et de formations (universités?) * Direction technique des interprofessions régionales viticoles * Figures emblématiques d'œnologie, de viticulture * Grand chroniqueur - dégustateur et sommelier