aru cet été, le livre « Sauvons le Muscadet d’une mort programmée » d’Alan Coraud livre une analyse marketing et culturelle de la crise de l’appellation nantaise. La rupture du vignoble avec son origine bretonne et celtique est la thèse principale de la crise structurelle que traverse ce vignoble qui fut le plus grand d’Europe en termes de surface. La disparition des superficies (8000 ha aujourd’hui contre 13000 il y a 20 ans) est le fait d’une stratégie de rattachement du vignoble au fleuve Loire alors que le Muscadet est lié « au Massif Armoricain et à l’Océan Atlantique » : un terroir à l’opposé de ceux calcaires que l’on trouve en bord de Loire. « Un fleuve n’a jamais été un territoire » grince Alan Coraud qui estime que le Muscadet a été dilué dans l’identité ligérienne. A l’opposé, l’identité bretonne (pour le marché français) et celtique (pour l’export) permettraient de construire une image forte. « Ces identités trouvent un écho très positif auprès des consommateurs » insiste Alan Coraud. Elles ouvrent également un marché d’envergure avec 140 millions de Celtes dans le monde et une attractivité indiscutable. « Selon la langue, le mot Bretagne est référencé entre 60 et 600 fois plus que le Val de Loire sur Internet ». Cette identité peut être supportée par des évènements culturels d'envergure comme le Festival Interceltique de Lorient ou la grande parade de la Saint-Patrick qui se déroule à New-York tous les ans.
Alors, évidemment, Alan Coraud voudrait bien gommer la fleur de lys, symbole des rois de France, qui orne certaines bouteilles de Muscadet pour la remplacer par une Hermine, symbole de la Bretagne. « C’est comme si on mettait la croix occitane sur une bouteille de vin d’Alsace » déplore-t-il. Ce travail de marketing identitaire lui paraît être l’urgence. Les problèmes de qualité des vins sont à balayer tout comme la proposition d’introduire le colombard dans les cahiers des charges. « Depuis 25 ans, on concentre l’attention des vignerons sur des problèmes secondaires. Il y a eu un débat sur les volumes, puis sur le degré, puis le rendement… Mais ce n’est pas la question essentielle ».
Alan Coraud, qui ne se cache pas soutenir le rattachement de la région Nantaise à la Bretagne, sait que son livre « est un brûlot ». Son discours a en effet de quoi heurter la région Pays de Loire et InterLoire qui accompagnent la promotion et le développement du Muscadet. Mais, il a aussi un écho national au moment où se dessine une nouvelle carte régionale. Et de s’interroger : « Ce sont des empilements de départements sans âmes et identités. Quelle en sera la répercussion économique ? »
[Crédit photo : Couverture du livre Sauvons le Muscadet d'une mort programmée]