« L’herbe en place, les racines, les feuilles et les sarments sont une source de matière organique qui n’est pas toujours suffisante à maintenir le niveau de production souhaité par le vigneron. Des apports peuvent alors être nécessaires », expliquait l’Atv 49, lors d’une journée sur l’entretien d’automne des sols en septembre dernier. L’objectif : assurer à ceux-ci un bon fonctionnement, en termes d’alimentation pour la vigne mais aussi pour améliorer leur structuration. La matière organique animale et végétale qui va se décomposer est en effet nécessaire, en quantité suffisante et apportée de façon régulière, pour « nourrir » les micro-organismes.
L’automne coïncide avec le moment où les apports de matières organiques à décomposition lente doivent être réalisés, pour un effet sur le sol et la plante au printemps suivant. C’est le cas des amendements commerciaux, des composés ligneux - paille et bois - et de toutes les matières organiques compostées pendant plus d’un mois.
Des apports à effectuer après les vendangesLes apports de ces matières organiques à décomposition lente doivent donc être réalisés « dès que possible après les vendanges, car elles nécessitent beaucoup d’énergie pour être dégradées et vont consommer quelques unités d’azote », conseille l’Atv 49. Ce phénomène peut s’expliquer par le rapport carbone/azote (C/N), l’indicateur de la vitesse de décomposition de la matière organique. « Plus le végétal est vieux, plus le carbone qu’il contient est stable, plus le rapport C/N est élevé et plus les matières organiques vont mettre du temps à se décomposer », explique l’association.
Le calcul au laboratoire de « l’Indice de stabilité de la matière organique » (Ismo), peut également aider à prédire la dégradation des amendements organiques. L’agrégation des particules minérales par les micro-organismes du sol dépend en effet de la facilité des matières organiques à être dégradées, ceux-ci se servant de ces dernières pour fonctionner. Plus les matières organiques sont labiles et plus l’activité biologique est forte.
Le compost de marc de raisin livré non criblé peut être plus ou moins évolué. Il peut donc être intéressant, si l'on recherche un effet d'augmentation du taux de matière organique stable au sol, de poursuivre la maturation du compost par stockage en bout de champ avant utilisation. (©JCassagnes)Sur ce principe, les produits organiques qui ont une certaine capacité à rester stables augmentent le taux d’humus. Un apport à l’automne présente donc un « intérêt vis-à-vis de l’entretien du stock d’humus et de l’apport de potassium ». Un passage de matière organique plus instable aura par contre plus un effet fertilisant à court terme, car minéralisera facilement, libérant des éléments nutritifs pour la plante ; un tel apport sera donc conseillé en sortie d’hiver.
Ce principe s’applique donc pour les composts : plus celui-ci a duré longtemps, plus les matières organiques sont stables et vont mettre du temps à se décomposer. Ceux-ci permettent donc d’enrichir les sols en humus stable et d’en améliorer leurs propriétés physiques, chimiques et biologiques. De façon générale, « un compost évolué sera plus adapté aux sols à texture plutôt sableuse, afin d’en augmenter la rétention en eau et la Cec, précise de son côté la Chambre d’agriculture du Bas-Rhin dans sa fiche pratique. Un compost jeune sera plus adapté aux sols à texture argileuse (Cec élevée), afin de stimuler l’activité biologique et d’entretenir la stabilité structurale… ». Et sera donc à apporter de préférence au printemps.
Concernant les amendements commerciaux, leur temps de compostage est d’au moins six mois, afin d’assurer le respect des normes sanitaires pour l’utilisation sur les cultures, notamment maraichères.
La stabilité de la matière organique, et donc la vitesse de dégradation de celle-ci, varie selon les natures de matières organiques apportées. Celles qui se dégradent rapidement ont une action plus rapide sur la stabilité structurale. (©Ch Ag Paca)
Les viticulteurs qui laissent en place leurs sarments après la taille, ou enherbent, doivent bien entendu en tenir compte dans le raisonnement de leur fertilisation organique. « Les autres apports d’amendement à base de bois sont alors fortement déconseillés, indique l’Atv49. A l’inverse, un apport de matières organiques rapidement dégradables en sortie d’hiver est recommandé pour compenser les sarments ».
Concernant les restitutions humiques par les feuilles et l’herbe, la Chambre d’agriculture Paca évalue entre 200 à 500 kg/ha pour les premières et entre 100 à 300 kg/ha pour l’herbe.
Enfin, les viticulteurs doivent aussi rester vigilants vis-à-vis du risque éventuel d’excès d’apport de matière organique. Celui-ci peut avoir des conséquences négatives, notamment sur la vigueur, et donc sur la sensibilité de la vigne aux maladies. Pour savoir précisément le type et la quantité de matière organique à apporter – ou non - pour entretenir ou augmenter la fertilité des ses parcelles, l’Atv49 conseille une analyse de sol de type « Hérody », « la seule analyse qui renseigne sur l’équilibre entre les matières organiques dans le sol ». Celle-ci comprend une observation de terrain basée sur la pédologie, suivie d’analyses en laboratoire, pour la compléter.
*Demi-journée technique ATV49 « Entretien d'automne des sols » 05 septembre 2013