Pour la Cnaoc et la Cnaol (produits laitiers d'origine contrôlée), agglomérer l’Aop et l’Igp les rendra encore moins lisibles.. Si les consommateurs achètent des produits Aop, c’est pour leur goût mais aussi pour leur histoire(© JC)
“Si le mécanisme des indications géographiques de l’Union européenne est fondamentalement bien conçu et offre des avantages tant aux consommateurs qu’aux producteurs, la nécessité de le simplifier, de le clarifier et de le rationaliser justifie une réforme législative”. Pour la Commission européenne il est temps de réformer la politique de qualité des produits agricoles et notamment la protection des indications géographiques, afin de la rendre plus efficace. “Toutes les indications géographiques n’ont pas une réputation et un potentiel commercial qui transcendent les frontières nationales”, souligne la Commission.
Bruxelles propose de fusionner les trois régimes de protection existants (vins, spiritueux, et produits agricoles/denrées alimentaires) en “une structure réglementaire unique, tout en préservant les spécificités de chaque système” et de fusionner aussi l’Aop et l’Igp. Selon la Commission le consommateur ne sait pas distinguer les deux catégories et les différents systèmes ne seraient pas assez clairs à ses yeux.
Les Aoc, une partie du patrimoine européenEn février dernier, les députés européens de la commision de l’agriculture se sont prononcés pour le maintien du système actuel d’IG et de ses instruments Aop et Igp. Une bonne nouvelle pour la Cnaoc et Efow qui se mobilisent contre les propositions de la Commission, avec notamment le Conseil national des appellations d’origine laitières. “Agglomérer l’Aop et l’Igp les rendra encore moins lisibles, ce serait annuler tout le travail de communication sur les Aop et leurs spécificités, basées sur des savoir-faire enregistrés dans des cahiers des charges. Si les consommateurs achètent des produits Aop, c’est pour leur goût mais aussi pour leur histoire”, a déclaré Claude Vermot-Desroches, président du Comité interprofessionnel du Comté et invité par la Cnaoc lors de son récent congrès à Angers à une table ronde sur la régulation de la production et la politique de qualité.
“Le registre européen des Aoc est une idée formidable. Il faut vraiment faire en sorte que Bruxelles comprenne que les Aoc font partie de notre patrimoine. On ne peut pas fondre les régimes de protection et fusionner celui des vins avec celui des spiritueux, cela entraînerait une perte des spécificités. Les vins sont soumis depuis toujours à des règles différentes”, renchérit Ricardo Ricci Curbastro, président de la fédération des vins Aoc d’Italie (Federdoc) et d’Efow, la fédération européenne des vins à origine.
“Pour améliorer la qualité, la compétitivité, la Commission européenne ne nous propose que la fusion des deux instruments existants, l’Aop et l’Igp, a déploré lors du congrès de la Cnaoc Philippe Armand Martin, député de la Marne, chargé par la commission des affaires européennes de l’Assemblée de rédiger un rapport sur les signes de qualité. Et au vu des résultats de la réforme de l’Ocm, je me pose des questions sur la volonté de Bruxelles de protéger nos produits agricoles”.
Différents niveaux de protectionBruxelles veut aller plus loin qu’une simplification du système des IG en instaurant différents niveaux de protection dans l’Union européenne. Pour améliorer la protection des IG à l’international, la Commission préconise de chercher à obtenir une protection renforcée hors-UE “par l’amélioration de l’accord de l’Omc” et des accords bilatéraux entre pays.
Elle suggère également “d’inclure les indications géographiques dans le champ d’application de l’accord commercial anticontrefaçon ainsi que dans les compétences du futur observatoire européen de la contrefaçon et du piratage”. Les producteurs d’Aop craignent qu’ainsi seules les Aop les plus connues et les plus présentes à l’export soient efficacement protégées.