e nombreux représentants de la filière viticole hexagonale peuvent en témoigner, l'histoire de la gestion du potentiel viticole européen est loin d'avoir été un long fleuve tranquille... A sa source on trouve l'arrêt du système des droits de plantation, acté en 2008 par la commissaire européenne à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel. Un enterrement express qui n'avait ému et mobilisé qu'à partir de 2010, le vignoble devenant soudainement inquiet face à la libéralisation des plantations. Fronde qui avait gagné en poids (et en soutiens politiques) jusqu'à remporter en juillet 2013 la création d'un nouvel outil au sein de la Politique Agricole Commune : les autorisations de plantation, plafond de nouvelles plantations, en vigueur de 2016 à 2030 et fixé à 1 % au maximum de la surface nationale. Il semblait alors que la rédaction de l'acte délégué par la Commission Européenne ne serait plus qu'une simple formalité pour classer le dossier. Mais au lieu d'un paisible épilogue, les premiers jets du texte proposé par le commissaire européen Dacian Cioloș ont ravivé la colère des responsables viticoles, certains décelant même une revanche de la Commission avec une régulation quantitative et non qualitative.
La question centrale dans ce débat aura été l'étanchéité des autorisations de plantation entre les catégories à indication géographique (vins à Appellation d'Origine Protégée et à Indication Géographique Protégée) et les Vins Sans Indication Géographique Protégée (VSIG). Et plus précisément le niveau de garantie à demander aux viticulteurs souhaitant planter des vignes à VSIG sur une aire à AOP et IGP, afin qu'ils ne revendiquent pas d'IG et empêcher un contournement des systèmes de régulation. Au terme de réunions et consultations de groupe d'experts, la Commission Européenne va finalement proposer dans son acte délégué un principe d'engagement des producteurs de VSIG à ne pas demander d'IG dans le cas où ils se trouveraient dans une zone à IG. Un critère d'éligibilité qui serait facultatif, mais que chaque état membre décidant de le mettre en place pourrait ensuite définir dans son détail (durée, zones concernées et détournement de notoriété...). Au cœur du débat sur la fin des droits de plantation, la Confédération Nationale des producteurs de vins et eaux de vie de vin à Appellations d'Origine Contrôlées (CNAOC) est globalement satisfaite par la tournure prise par l'acte délégué, saluant la possibilité laissée à chaque état membre de compléter ce dispositif au niveau national. La CNAOC pose cependant d'ores et déjà la question de la mise en application au niveau national, demandant que le ministère de l'Agriculture mette en place cet engagement de non-contournement pour l'ensemble des aires viticoles à IG.
La présentation de l'acte déléguée au Conseil des Ministres et du Parlement Européen devrait avoir lieu cette fin septembre, pour la remise d'un accord ou rejet avant la fin 2014. A noter que l'irlandais Phil Hogan est désormais le nouveau commissaire européen en charge de l'Agriculture et au Développement Rural, après avoir été désigné ce 10 septembre par Jean-Claude Junker.
[Illustration : Rideau du théâtre de Newcastle Upon Tyne (Royal Theatre)]