eprésentant à eux deux 27 hectares, les châteaux Boyd Cantenac et Pouget avant tout de petites propriétés à l'échelle des grands crus classés de 1855. Mais elles restent avant tout familiales et garanties « sans consultants, ni gourou », comme s'enorgueillit Lucien Guillemet. Pour lui, « le vinificateur doit s'effacer, toute la création du vin se produit à l'extérieur, au vignoble. Les processus techniques d'extraction et de vinification n'en sont qu'une traduction. Le vin est pareil au thé, il s'agit de macération. » S'il se réjouit de l'impact de la semaine des primeurs dans le calendrier du marché mondial des vins, il en regrette une dérive particulière : « tous les professionnels goûtent en série, et seul l'œil ne se fatigue pas... Dans ce cadre, nous avons tendance à donner un prix à ce qui nous réveille, ce qui puissant. Les vins portés au pinacle ne correspondent pas à mon idée du vin que l'on sert à table. Un vin puissant, on en prend une cuillère à café et cela suffit, on en a fait le tour. » Pour illustrer son propos, il se souvient d'un déjeuner passé dans les années 1990 dans le restaurant de Francis Goullée (Saint-Emilion). Pour ce repas il avait commandé une bouteille de 1987 (« pas solide, mais agréable et équilibré ») et un cru de 1993 (« très concentré! ») et il se trouve qu'à la fin du repas, c'était la bouteille entière de 1987 qui était vide, contrairement au premier verre de 1993. Une question d'émotion et d'esthétisme pour Lucien Guillemet qui juge que dans le monde « il y a beaucoup de vins ''puissants et grossiers'' ou ''fins et légers''. Je cherche des vins ''puissants et fins'' », féminin en somme. Des vins qui existent dans l'irrégularité du millésime 2013 de Bordeaux, « dont la réputation a été abîmée par la météo (notamment lors du salon Vinexpo, ce qui est très mauvais au vu de l'affluence!). Très tôt l'opinion générale, et internationale, a été que le millésime serait mauvais, mais il y a de bons vins, même si en faible quantité. Ce millésime est difficile à vendre, surtout en primeur. Au final c'est une bonne chose pour le consommateur, qui pourra savoir ce qu'il achète, au-delà de la réputation. »
[Photo : Lucien Guillemet dans le salon 1855 du palais de la Bourse ce 29 juin]