n 2013, le vignoble cadurcien aura connu une année de records. Tous sont loin d'être fastes, mais ils ont pour point commun de dessiner les contours d'une situation complètement opposée à la crise que traversait l'AOC Cahors au milieu des années 2000. La production de l'AOC aura d'abord atteint un niveau historiquement bas, à 96 000 hectolitres en 2013 (-38 % par rapport à 2012, jusqu'à -60 % par rapport à 2004). Même le difficile millésime 2010 n'avait pas réussi à passer en deçà de la barre des 100 000 hectolitres revendiqués. Les stocks sont également au plus bas dans le Lot, à 287 750 hl au 31 juillet 2013 (en baisse de 30 % par rapport au surstock de 2005). Allant de paire avec cette faible disponibilité, les cours sont logiquement à la hausse. En décembre, l'Union Interprofessionnelle des Vins de Cahors enregistrait un prix moyen de 123 € l'hectolitre, quasiment le double de ce qui était négocié fin 2006.
Pour Jérémy Arnaud, directeur marketing de l'UIVC, ce faisceau d'indices ne laisse pas de doute : Cahors est en train de réussir sa sortie de crise. « Ce n'est pas qu'un mouvement d'écume, on peut véritablement dire que quelque chose va redémarrer structurellement. Après avoir touché le fond de la piscine en 2004-2006, le vignoble a rebondi » s'enthousiasme-t-il, voyant dans cette success-story en devenir un « véritable laboratoire de sortie de crise du système français des AOC ». La stratégie a l'origine de cette rémission est marketing, consistant à resserrer les liens entre une marque et un déclencheur d'achat, respectivement l'appellation Cahors et son cépage, le malbec. Ayant l'ambition de regagner le leadership du malbec, la capitale historique a concentré avec succès ses efforts sur les Etats-Unis.
Mais un grain de sable vient de faire hoqueter la belle horlogerie : la très faible récolte 2013. Président de l'Organisme de Défense et de Gestion de l'appellation Cahors, Maurin Béranger y voit « une double peine. D'abord il y a l'impact sur la trésorerie des exploitations. Ensuite, on ne sera pas en mesure de fournir tous nos marchés, alors que depuis quatre campagnes les sorties progressaient. » Dans cette phase d'ouverture de marchés et de créations de marques, cette petite disponibilité pénalise économiquement et commercialement les opérateurs de Cahors. En accord avec la hausse des cours, ces niveaux historiquement bas hâtent mécaniquement la démarche de valorisation des Cahors, amenant à une sélection des réseaux de distribution (l'AOC Cahors désinvestit notamment la grande distribution : -26 % en volume et -14 % en valeur depuis 2007).
Face à ces faible stocks, tous s'accordent sur la nécessité absolue d'une récolte normale en 2014. « On retient notre souffle jusqu'aux premières feuilles et à la floraison » rapporte Jérémy Arnaud. « S'il y a peu de volumes, cela deviendrait structurellement difficile... sinon le cap pourra être passé sans difficulté. » Avec un rendement moyen de 42 hectolitres par hectare ces cinq derniéres années, les producteurs de Cahors demandent de plus belle l'ouverture des Volumes Complémentaires Individuels auprès de l'INAO. « On la réclame à corps et à cris », ajoute Maurin Béranger. « Le malbec est un cépage très coulant, notre priorité pour 2014, c'est d'obtenir l'application du VCI pour la prochaine récolte, maintenant que l'on est arrivé à la dernière année d'expérimentation. »
[Illustration : UIVC]