vec ses 180 000 ha de vignes, une production de 14 millions d’hl, le Languedoc-Roussillon reste la première région viticole française, l’une des premières du Monde. La reconnaissance des Appellations Corbières, Minervois, Coteaux du Languedoc, Côtes du Roussillon a conduit à la création des Interprofessions. C’était il y moins de 30 ans. Un temps suffisant pour qu’une génération initie une grande mutation et un grand saut qualitatif, reconnus par les acheteurs et les consommateurs. C’est aussi dans cette région que l’organisation interprofessionnelle s’est réinventée, avec quelques étapes marquantes : Création du CIVL en 1994 (Conseil Interprofessionnel des Vins du Languedoc), puis reconnaissance d’InterOc , première Interprofession de vins de pays, mise en place d’INTERSUD, fédération des 4 interprofessions du « bassin viticole Languedoc-Roussillon… »
Ce n’est pas fini, Claude BALAND, le Préfet de région vient de demander à…
Bernard DEVIC, actuel président d’INTERSUD de poursuivre le déploiement de cette fédération, pour qu’elle devienne l’unique interprofession. Une première en France ? Le chemin est encore long, mais Bernard DEVIC est confiant : « Une grande partie du chemin a été parcourue, grâce à INTERSUD : les DRM (Déclarations Récapitulatives Mensuelles) et l’enregistrement des contrats de ventes ont été harmonisés et centralisés, le linéaire unique LANGUEDOC ROUSSILLON (dans les rayons de la Grande distribution) est en train de devenir réalité, et le SAQ (Suivi Aval Qualité) est piloté par INTERSUD ». Le Languedoc ROUSSILLON, dernier de la classe, dernier entré dans le monde interprofessionnel est-il devenu l’exemple qui fait bouger les périmètres, les moyens, les méthodes des interprofessions à la française ?
Certes, le Conseil Constitutionnel vient de confirmer le rôle, les missions et la légalité juridique des « interpros » (il y a eu un grand ouf de soulagement !) mais les interrogations, les doutes, persistent. Une opportunité à saisir par les interprofessions viticoles pour s’adapter et se réinventer pour devenir les acteurs et les pilotes, incontestés et incontournables du développement global des vignobles français. Elles doivent répondre à une situation nouvelle :
- celle des bassins de production. Cette organisation administrative a été voulue et bien accueillie par les professionnels de la vigne et du vin. Le contour de chaque bassin doit coïncider avec le territoire d’une seule interprofession.
- celle des moyens. La maîtrise des frais de fonctionnement est pour la plupart des interprofessions une nécessité. Par exemple, en regroupant leurs moyens, humains et techniques, les interprofessions du Languedoc Roussillon gagneraient en efficacité et réduiraient les coûts. Les Interprofessions sont dans le périmètre des budgets publics : la réduction des déficits les concernera directement ou indirectement.
- celle de la mission. Là encore l’exemple d’INTERSUD (et il n’est pas le seul) est enrichissant. Dans un cadre très incertain, les dirigeants ont réussi à harmoniser, à simplifier des missions que nous appellerons « régaliennes » comme les DRM, le SAQ. Dans quelques mois, qui mieux que les interprofessions, avec leurs collèges producteurs/négociants, pourront définir et gérer, les nouvelles règles de gestion des surfaces en vigne, nouvelles règles émises avec l’accord de l’UE pour remplacer (éventuellement) les droits de plantations.
- celle de la cohérence. Actuellement les disparités entre interprofessions sont criantes. Cotisations, budgets, champs d’actions… Incohérence aussi entre vins en bouteilles (les seuls qui soient mis en avant) et les vins vendus en vrac qui ne bénéficient pas ou rarement des budgets de communication. Conclusion : Pour des organisations « accréditées » par l’Etat, par l’Europe aussi, ce fonctionnement n’est pas en cohérence avec les règles de la concurrence ou les principes d’égalité. Le CNIVE (Confédération Nationale des Interprofessions des Vins et Eaux de vie) pourrait recevoir des pouvoirs de régulation pour améliorer cette cohérence inter-bassins.
- celle de la souplesse. Revenons aux fameuses C.V.O. (Cotisation Volontaire et Obligatoire). Elles sont interprétées comme obligatoires. Le mot volontaire existe pourtant. On pourrait donc imaginer :
une cotisation véritablement obligatoire pour gérer les fonctions régaliennes de l’interprofession (coordination des orientations du bassin viticole, DRM, SAQ, application des futures règles de gestions des surfaces en vignes, défense des marques collectives AOP, IGP ou autres …). Cette cotisation obligatoire serait plafonnée au niveau national,
une cotisation véritablement volontaire qui permettrait de financer des projets de communication voulus par un collectif de producteurs, de négociants. Seuls les professionnels payants bénéficiant de ces actions de communications cotiseraient.
Au cours de la dernière décennie, la viticulture française a fait du surplace. Qui n’avance pas, recule. Reprendre le premier rang mondial est la mission et la responsabilité des interprofessions. Elles doivent s’adapter et évoluer, prendre en compte le changement (changement des modes de consommations, changements des concurrences, changements climatiques…), adopter de nouveaux outils (marketing digital, réseaux sociaux, protection internationale des marques collectives, authentification des produits…), séparer les budgets (cotisation obligatoire/cotisation volontaire).
L’Interprofession en Languedoc-Roussillon. Un exemple à suivre ? Il y a 30 ans, le Languedoc-Roussillon s’est mis en mouvement. Difficilement, âprement, lentement, mais il avance. Monsieur le Préfet a raison d’y croire !