Lozère : le renouveau d'une terre de vins

assée de moins de 2000 hectares au début du XXe siècle à seulement 11 hectares aujourd'hui, la Lozère – département le moins peuplé de France – s'est lancé un pari fou dans les années 2000 : réintroduire des vignes. A l'occasion du 3e forum du vin Sud de France, organisé à Mende les 17 et 18 juin prochain (télécharger le programme), Terredevins.com s'est intéressé aux deux vignerons qui peuplent ces terres lozériennes.

Le premier à avoir tenté l'expérience est un savoyard. Sylvain Gachet, du Domaine de Gabalie à Ispagnac, a commencé à planter en 2003. "Je travaillais en Côte Rôtie mais je pensais à m'installer. Le projet de la commune est très motivant car tout est à faire", explique ce père de trois enfants. Sur ses six hectares, deux et demi sont situés en terrasse, donc non mécanisables. Il bénéficie de deux types de sols : argilo-calcaire au dessus d'Ispagnac, avec des cépages de pinot, chardonnay et marcelin, et une terre de schiste vers Florac et les Gorges du Tarn, essentiellement constituée de syrah.

Exode rural
A 500 m d'altitude, ces terres intermédiaires entre plaine et montagne présentent tous les atouts pour faire un vin de qualité. "On garde la fraîcheur tout en ayant de belles maturités." Les changements climatiques déclenchent un retour à ces terres plus en hauteur. Le déclin connu pendant plus d'un siècle pourrait donc être renversé. "Il y a toujours eu de la vigne en Lozère, explique le vigneron. Mais elle a commencé à péricliter à partir de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu'à disparaître dans les années 1970. Il y avait la tradition du vin de table. Mais au moment de l'exode rural, il n'y a plus eu de bras pour travailler. Traditionnellement, les gens allaient dans le sud pour travailler. Mais ils revenaient avec des méthodes de là-bas, pas adaptées à la géographie de petite altitude de la Lozère."

Vieux cépage et location de ceps
Sylvain Gachet a de la suite dans les idées. Il y a trois ans, il a planté "à titre expérimental" du négret de la Canourgue, un cépage "a priori autochtone. Nous avons retrouvé deux ceps sains ici et deux autres au conservatoire génétique de la vigne au domaine Vassal à Montpellier." Ces 500 ceps n'ont pas encore fait l'objet de micro-cuvée : "Je m'attends à quelque chose de plutôt léger, apparenté au gamay".
Autre originalité lancée depuis une semaine, que développent d'ailleurs de plus en plus de domaines : la location de ceps à des particuliers sur une parcelle de syrah*. Pour 135 euros, le locataire signe un contrat pour 30 ceps. En retrour, il peut aller les visiter et a le droit à trois bouteilles 2009, six bouteilles 2010 et six autres de la prochaine cuvée 2011. Pour un prix à l'unité plus économique - 9 € - au lieu de 12 € à la vente. "J'organise une réunion par an. L'objectif est de développer une vrai relation avec les clients. Cela permet de travailler différemment, car la location ramène aussi de l'argent tout de suite".

Amplitude thermique très favorable
Elisabeth Boye, la deuxième vigneronne, partage avec Sylvain Gachet le même bâtiment de vinification. Il s'agit de l'ancienne cave coopérative de fraise et de cerise d'Ispagnac, abandonnée dans les années 70-80. Sur le modèle de Sylvain, Elisabeth s'est installé en 2006 sur une friche pour créer le domaine des Cabridels. Soutenue par le SIVOM des Grands sites des Gorges du Tarn, elle a planté 5 hectares sur les communes de Quézac et Sainte-Enimie. "Le sol est constitué d'éboulis calcaires des Causses. Il est très sec, assez pauvre. Mais ces terres chaudes et l'amplitude thermique sont particulièrement favorables aux vins." Plus qu'une envie, celle d'y goûter.

* Pour devenir locataire, écrire un mail à sylgac@orange.fr