Jean-Michel Deiss, président du syndicat des grands crus d’Alsace, se bat depuis de longs mois pour obtenir des autorités françaises la transmission à la commission européenne d’une version du ou des cahiers des charges des grands crus alsaciens. Ce qui permettrait à l’Europe de protéger non seulement la mention « Alsace Grand Cru », mais également les 51 dénominations locales (d’Altenberg de Bergheim à Zotzenberg) qui épousent la très grande variété géologique, climatique et humaine de ces terroirs. Cette protection est essentielle pour les vignerons alsaciens, parce que ces noms de lieux-dits sont très répandus dans tous les pays germaniques, leur réputation construite par l’Alsace pourrait donc être facilement récupérée par les producteurs d’autres vignobles.
Le 24 mars, la question semblait être réglée, d’un commun accord entre les représentants du ministère de l’Agriculture, de l’INAO, de l’AVA, de la CNAOC et de la Commission européenne, les premiers acceptant de transmettre à la dernière un cahier des charges unique de l’AOC Alsace Grand Cru, assorti de 51 déclinaisons comprenant l’explicitation du lien au terroir de chacune. Mais quelques jours plus tard, les services juridiques du ministère de l’Agriculture décidaient de renvoyer ce cahier des charges devant le Conseil d’Etat (qui avait déjà lu et demandé des modifications des deux versions précédentes).
Jean-Michel Deiss craint aujourd’hui que le Conseil d’Etat n’accepte pas la spécificité alsacienne consistant à vouloir protéger les dénominations locales internes à l’appellation, mais aussi que la suite de la procédure (examen par le Conseil d’Etat du document, communication des conclusions au syndicat des grands crus, nouvelle révision du document, éventuelle nouvelle validation) ne soit trop longue au vu du délai de transmission des cahiers des charges à la Commission européenne fixé au 31 décembre de cette année. Le risque étant alors que les grands crus alsaciens n’aient in fine plus aucune protection communautaire
Article d'Egmont Labadie