omme Jean-Michel Deiss, vigneron et président du syndicat des grands crus alsaciens, nous l’expliquait en mars dernier (voir son interview), il a lancé un vaste chantier de définition du lien au terroir dans les 51 lieux-dits concernés par la mention. Sa méthode n’a cependant pas fait l’unanimité, et a généré de vives discussions autour des notions de cépage et de terroir, comme en témoigne l’envoi d’une lettre signée par 200 vignerons à l’AVA (association des vignerons alsaciens) en juin dernier : « S’il est vrai qu’un grand vin sec illustre à merveille un terroir, vouloir se priver de la possibilité d’en exprimer toute la quintessence grâce au caractère unique apporté par la symbiose entre un botrytis de grande qualité, un grand terroir et un millésime d’exception serait un contresens agronomique, technique et commercial. Même si vous jugez cette cohabitation possible, votre position sur ce point demande une définition très claire ».
Lors d’une conférence de presse organisée le 3 décembre à Paris, le directeur de la cave coopérative de Pfaffenheim Alex Heinrich exposait les termes du débat : « il y a les partisans de la spécialisation des grands crus, avec un cépage principal qui serait le mieux adapté à exprimer tout ce que le terroir peut apporter, comme le Riesling dans le Schoenenbourg ; les partisans de l’élargissement des cépages autorisés, comme le Sylvaner dans le Zotzenberg, voire le pinot noir dans le Vorbourg ; et les partisans de l’assemblage, comme dans le Kaefferkopf et l’Altenberg de Bergheim ». Au delà ce débat de fond, Alex Heinrich a fait référence à une autre querelle : « il y a les partisans et les opposants de l’indication des cépages sur l’étiquette. A travers du monde entier, la lecture du vin commence par le cépage, pour donner une idée de la saveur et du goût que peut avoir le vin ; je pense que ce serait vraiment une erreur colossale d’enlever le cépage et de ne laisser que le terroir. Je sais bien qu’il y a de très grands viticulteurs qui ne pensent pas comme ça. »
Invité à réagir aux critiques, Jean-Michel Deiss reconnaît qu’il « avait essayé de mettre la pression au maximum dans les premiers mois » mais qu’il a « aujourd’hui l’intention d’avoir une approche plus libérale » en laissant le choix de son avenir à chacun des syndicats. Il dénie cependant avoir demandé à chaque grand cru de choisir un cépage unique, et n’est pas contre l’idée que le cépage puisse être « mentionné en petit, par exemple sur la contre-étiquette ».
Mais il persiste à penser que le cépage est un mauvais cheval de bataille dans la compétition mondiale pour les vins d’Alsace, en raison du contexte réglementaire très libéral, en particulier sur les vins de cépage sans IG. C’est la raison pour laquelle il a récemment proposé qu’un débat soit organisé avec l’ensemble des vignerons alsaciens sur le lien au terroir, débat qui a pour l’heure été refusé. Pour lui, d’une façon générale, il y a une crainte d’ « ouvrir la boîte de Pandore de la segmentation », ce qui justifierait également la décision récente de l’INAO de gérer le dossier du lien au terroir, plutôt que de laisser à chaque appellation le soin de définir son identité. Pour les grands crus alsaciens en tout cas, le travail de définition reprendra dès le mois de janvier 2010.
Alsace : la querelle des grands crus, du cépage et du terroir
Par Vitisphere Le 23 décembre 2009
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