Une réforme kafkaïenne prive les Russes de vins et d’alcool

?Sommes nous revenus à l'époque des pénuries de l'Union soviétique ? ? C'est l'interrogation des consommateurs russes face à des rayons d'alcool et de vins presque totalement vides depuis le début du mois de juillet. Selon l'agence de presse russe RIA Novosti qui cite l'Association nationale des alcools, les consommateurs se sont rués sur les rayons au début du mois de juillet, emportant près de 200 millions de bouteilles de vin étranger, soit environ 10 % des besoins du marché russe, laissant vides les rayons, mais aussi les entrepôts, les restaurants et les commerces de détail. L'embargo décrété depuis avril 2006 par les autorités russes sur les vins et alcools géorgiens et moldaves a sans doute participé à l'aggravation de la crise. Mais la vraie cause de cette pénurie est la réforme du système de vignettes fiscales qui semble avoir été mal coordonnée entre le ministère du développement économique et du commerce, le service fédéral des impôts et celui des douanes ainsi que de l'entreprise publique Atlas. Adoptée fin 2005, une nouvelle loi réglementant la production et la vente d'alcool a en effet créé de nouvelles vignettes fiscales et interdit, depuis le 1er juillet, la vente de bouteilles portant d'anciennes vignettes. Alors qu'elle devait entrer en vigueur au 1er avril, cette réglementation avait été repoussée car les nouvelles vignettes n'étaient pas imprimées. Elle est finalement appliquée depuis le 1er juillet mais seulement 1,9 millions de bouteilles ont pu être dotées des nouvelles vignettes... Dans le même temps, l'entreprise publique Atlas a été chargée de mettre en place un ?Système d'information automatisé unique d'Etat? (EGAIS) qui doit permettre aux distributeurs de faire enregistrer chaque bouteille auprès de l'administration fiscale fédérale -et non plus régionale- mais tous les distributeurs n'ont pas pu se procurer à temps le logiciel nécessaire à cette opération... RIA Novosti cite Dmitri Ianine, directeur de la Confédération internationale des sociétés de consommation qui estime que la crise de la distribution d'alcool ne s'achèvera pas avant la fin de l'année et qu'elle provoquera une nette augmentation des prix de détail. Et certaines voix estiment que cette désorganisation pourrait être voulue, ou au moins entretenue, comme un moyen de lutte contre l'alcoolisme, qui demeure un fléau national. C'est en tous cas une mauvaise nouvelle pour les vins français dont les importations en Russie, qui enregistraient ces dernières années une progression à deux chiffres, pourraient être freinées par ces difficultés de distribution.