delphe assume de faire les deux en même temps : inciter à l’allègement des bouteilles ET au réemploi des bouteilles de vin (objectif inscrit dans la loi Anti-Gaspillage pour une Economie Circulaire, AGEC). Les deux gestes sont souvent contradictoires, mais « en attendant le jour où l’on pourra réutiliser des bouteilles légères, il faut bien faire de l’éco-conception des bouteilles », nous dit-on. C’est d’ailleurs la feuille de route d’Adelphe, alignée sur les exigences de la loi AGEC et du règlement européen PPWR (Packaging and Packaging Waste Regulation) : « -15 % d’emballages ménagers à usage unique d’ici 2030 (par rapport à 2010) et -80 % des émissions de CO₂ pour le secteur de l’emballage d’ici 2050 ». Les sept lauréats de l’appel à projets d’Adelphe bénéficient d’une aide technique et financière allant jusqu’à 50 000 € HT par projet.
La stratégie d’allègement est mise en avant notamment pour l’export, puisqu’aucune solution de réemploi n’existe aujourd’hui. En France, le réemploi des bouteilles de vin reste balbutiant. Le projet ReUse, axé sur la grande distribution et dont le déploiement a démarré dans le Nord-Ouest de la France, n’intègre que 10 cuvées de vin pour l’instant. « Il nous en faut plus pour que le client s’habitue, c’est le moment de foncer », appelle Mehdi Besbes, d’Adelphe, qui parle de « marchés à prendre ».
Mais l’affaire "réemploi des bouteilles de vin" paraît beaucoup plus complexe et incertaine que l’allègement des bouteilles. D’autant que les verriers ont l’art et la manière de présenter ces nouveaux poids-plumes comme des "innovations" extraordinaires. Un tour de force que cette communication, visant à transformer une bouteille autrefois considérée comme "cheap" en "bijou de technologie", et ainsi flatter les vignerons attachés à leurs gros calibres. L’allègement des bouteilles permet aux entreprises et aux filières de réduire rapidement leur empreinte carbone, sans révolution copernicienne. Sur la copie, c’est tout bénéf’.
Mais le problème de fond de la bouteille de vin en verre, ce n’est pas son embonpoint, dérive marketing d’un autre temps, mais son usage unique. L’énergie, l’argent, le temps dépensés pour installer ces bouteilles allégées dans les habitudes des usagers, distillent l’idée de « bouteilles en verres à usage unique mais avec la conscience tranquille ». Et c’est autant de retard pris sur le vrai défi : le retour du réemploi. Défi sur lequel les interprofessions sont bien peu nombreuses à plancher (il n’y a qu’Interloire), tout occupées qu’elles sont à réduire le poids des bouteilles. Bref, à force de ne regarder que les courbes de CO2, on approche là dans la zone grise de la mal-adaptation et du possible effet rebond. Gare à la gueule de bois.




