nnoncé ce 24 novembre à Montpellier, le plan d’aide à la filière viticole marque les esprits vignerons avec son annonce de 130 millions € de crédits nationaux pour l’arrachage définitif, mais alimente aussi les interrogations alors qu’il n’est question que de 70 millions € mis à disposition par le gouvernement. Peut-être qu’il y aurait entourloupe, peut-être que l’enveloppe annoncée sera divisée par deux entend-on grogner dans un vignoble à bout de nerfs… Inaugurant ce 25 novembre le salon Sitevi, la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, le martèle : « ce n'est absolument pas peut-être. C'est une somme qui est certaine. On fera une première évaluation à 70 millions d'euros pour un déploiement ensuite à la hauteur de ce que nous avons dit. » Ajoutant qu’en termes de calendrier, « on commence en 2026 et on verra bien ce qu'on aura consommé en 2026. 70 millions d'euros en 2026 : il n'y a absolument aucun doute sur la somme sur laquelle le gouvernement s'est engagé » de 130 millions €. Sachant que ce dispositif est lié à l’adoption d’un Projet de Loi de Finances pour 2026 (PLF) : « il faut que la France ait un budget pour qu'on puisse déployer les mesures que j'ai annoncées » répète la ministre.
Pour la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA), il y a urgence à mettre en œuvre ces outils de redimensionnement du vignoble. Sachant que « ce qui a été annoncé est une bonne nouvelle, ce n’était pas gagné » pose Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA en conférence de presse ce 25 novembre sur le Sitevi. Constant que pour l’arrachage « il ne se passera rien avant début 2026 » (comme il faut un cadre communautaire pour l’autoriser, ce qui fait consensus dans le paquet vin actuellement discuté à Bruxelles). Dans l’immédiat, « ne faisons pas rêver tous les viticulteurs voulant arracher, il y aura un cadencement » prévient Arnaud Rousseau, qui affirme « l’objectif de sortir cette production pour la prochaine vendange » Sachant que le récent sondage de FranceAgriMer chiffre à 34 428 hectares les surfaces viticoles candidates à l’arrachage. Avec une prime à l’arrachage reconduite à 4 000 €/ha, l’enveloppe de 130 millions € concernerait 32 500 ha (avec 70 millions € cela concernerait 17 500 ha).
Président du conseil spécialisé vin de FranceAgriMer, Jérôme Despey veut qu’il n’y ait qu’une campagne d’arrachage et qu’elle soit rapidement mise en place : « ces arrachages devront être réalisés avant la prochaine récolte. Sinon les volumes se retrouveraient sur le marché et cela ne servirait à rien » pointe le premier vice-président de la FNSEA. Arnaud Rousseau donne clairement « rendez-vous au salon de l’Agriculture fin février pour s’assurer que les engagements pris soient mis en œuvre ». Plus frontalement, Jean-Marie Dirat, le président de la Fédération Régionale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FRSEA Occitanie) prévient que « si rien n’est fait avant le salon de l’Agriculture, ça ne va pas bien se passer. Il y aura une mise sous pression. »
Alors qu’il est question de mettre en place des critères pour assurer l’efficacité de ce plan d’arrachage, Jérôme Despey distingue les viticulteurs souhaitant arracher l’intégralité de leurs vignobles pour quitter le métier (20 % du sondage FranceAgriMer) et ceux voulant réduire leurs productions (pour regagner en rentabilité). Pour les premiers, « il est hors de question qu’il y ait une sélection. C’est un soutien qui est social » déclare-t-il, indiquant que pour les deuxièmes : « le ministère demande à la filière de travailler des critères. Nous allons nous mettre autour de la table avec l’AGPV (Association Générale de la Production Viticole) sur le sujet : âge de la vigne, production en rouge plutôt qu’en blanc ou rosé, présence d’irrigation ou non… Je n’ai pas de position, si ce n’est qu’il va falloir trouver des solutions pour répondre à l’arbitrage rendu. »
Alors que des critiques s’élèvent sur une nouvelle mesure d’arrachage, la ministre assume d’être à l’écoute de la filière pour répondre à sa crise : « l'arrachage est une mesure structurelle. Parce que sinon, on est condamné à produire plus de vin qu'on ne peut en consommer et en commercialiser. Et ça crée des stocks qu'il nous faut ensuite distiller. Donc ça n'est pas une bonne solution. Il faut vraiment qu'il y ait adéquation entre la production et le marché. Donc c'est vraiment une mesure structurelle de fond. »
Pour compléter le plan de crise, la Commission européenne est désormais sollicitée pour débloquer des réserves de crise, 30 à 40 millions € sont évoqués dans la filière. « Mes derniers échanges avec le Commissaire [NDLR : à l’Agriculture, Christophe Hansen], que j’ai sensibilisé depuis plusieurs mois aux grandes difficultés du secteur, ont été encourageants. Si, comme je l’espère, nous obtenons l’accord de la Commission pour le financement de cette distillation, nous en définirons ensuite les modalités et les priorités avec l’ensemble de la profession, en vue de sa meilleure efficacité » indique Annie Genevard à Vitisphere. Affaire à suivre.




