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Taxer plus le vin ? "L'impact serait massif sur l'économie, mais pas sur les comportements excessifs"
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Débats budgétaires et sanitaires
Taxer plus le vin ? "L'impact serait massif sur l'économie, mais pas sur les comportements excessifs"

C’est l’automne : les feuilles jaunissent et tombent dans le vignoble, les amendements budgétaires de fiscalité comportementale fleurissent et ciblent les vins malgré une consommation modérée acquise et une crise viticole qui frappe la filière. Le point avec Samuel Montgermont, le président de Vin & Société
Par Alexandre Abellan Le 23 octobre 2025
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Taxer plus le vin ?
Face aux amendements qui reviennent chaque année pour augmenter la fiscalité de la consommation de vin, 'je ne suis pas certain que ces députés aient réellement pris la conscience de ce qu'ils souhaitent. Les déplafonnements, le prix minimum… Pourquoi pas supprimer l'économie de viticole française ? Et puis on n'en parle plus' soupire Samuel Montgermont. - crédit photo : DR
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ans le premier Projet de Loi de Financements de la Sécurité Sociale pour 2026 (PLFSS 2026, depuis relancé par l'exécutif pour prendre en compte la lettre rectificative sur les retraites) on trouve des amendements pour que les cotisations de la sécurité sociale touchent toutes les boissons alcooliséespour taxer les publicités sur les boissons alcoolisées  pour indexer sur l'inflation la taxe sur l'alcoolRien d'inhabituel en somme ? Toujours les mêmes antiennes hygiénistes pour réduire la consommation globale d'alcool sans s'attaquer spécifiquement aux comportements excessifs ?

Samuel Montgermont : C'est la petite routine habituelle, on va dire. Je pense que ça manque quand même de créativité. Je rappelle quand même qu'au départ, ce n'est pas le gouvernement qui porte ses mesures, ce n'est pas écrit dans le texte. Ce sont des amendements qui viennent s'ajouter en première lecture de la commission des affaires sociales. Dans ces amendements, il n'y a rien de nouveau, ce sont ceux qui, chaque année, de façon systématique je dirais, arrivent sur le sujet. Et j'ai l'impression qu'on ne prend pas écho de l'environnement hyper concret qu'on connaît aujourd'hui pour toutes les boissons alcooliques confondues. Nos amis spiritueux viennent de sortir des problématiques chinoises à travers le cognac et je pense que la crise viticole n'est ignorée de personne. Sauf d'une partie de députés, qui ne doivent pas avoir la lecture du territoire sur lequel ils exercent.

C'est exaspérant de voir, peu importe la couleur politique, cet acharnement sur une économie qui va déjà si mal. Le réflexe est absolument abject et inaudible sur les territoires. Ça, c'est très clair. Et j'appelle ces députés à venir rencontrer les vignerons sur le territoire, leur expliquer le projet. Je ne suis pas certain que ces députés aient réellement pris la conscience de ce qu'ils souhaitent. Les déplafonnements, le prix minimum? Pourquoi pas supprimer l'économie de viticole française ? Et puis on n'en parle plus. On sait très bien que ce n'est pas une majorité de députés, mais ce qui devient agaçant, c'est qu'il n'y a pas de remise en question, alors que les temps d'hier ne sont pas les temps d'aujourd'hui. Je pense que déjà, nous [dans la filière vin], on a nos problèmes à résoudre. Et pas que sur les questions de fiscalité comportementale, il y a déjà des questions structurelles de fond. Qu'est-ce qu'on va faire de la viticulture demain ? Est-ce qu'on peut nous ficher un peu la paix ? Ce serait bien.

 

S'il n'y a a priori pas de majorité pour ces mesures, la France est aujourd'hui dans un contexte budgétaire très contraint. Sera-t-il difficile d'éviter la tentation de nouvelles taxes pour rentrer des fonds ?

C'est toute la vigilance que l'on doit avoir dans une période tellement déstructurée et désorganisée, où l'on pourrait très bien avoir un risque. Il nous faut examiner tout ce qui va être dit et pris comme position en première lecture dans la commission des affaires sociales. Les amendements sont essentiellement portés par des groupes LFI et écologistes. Avec quelques exceptions isolées. J'ai pris le temps de rencontrer des députés, de leur expliquer, mais ils n'ont pas compris, ou ne souhaitent pas comprendre. Parce que l'impact serait massif sur l'économie, mais pas sur les comportements excessifs. Il y a aura zéro impact. Donc on est mobilisés, comme chaque année, pour expliquer, pour faire de la pédagogie, en expliquant que ce n'est pas la bonne trajectoire.

La trajectoire, c'est celle que la filière porte depuis longtemps : la bataille de la modération. Désolé, mais c'est nous qui l'avons gagnée. Si on veut bien regarder les chiffres de la consommation de vin, ils traduisent ce qu'est la consommation de vin aujourd'hui : très occasionnelle chez les Français. Donc n'en rajoutez pas, messieurs les député. Si votre objectif est uniquement de trouver des budgets et combler les déficits de l'État français, alors ce n'est pas la bonne trajectoire. 93 % des départements sont couverts par de la viticulture et une décision comme ça, sortie de nulle part, sans étude d'impact, causerait d'énormes dommages collatéraux. Alors l'enjeu n'est pas de santé publique : la consommation de vin est très modérée en France.

 

Si les hygiénistes français ne changent pas de stratégie fiscalité comportementale, l'Organisation Mondiale sur la Santé (OMS) s'oriente finalement vers une forme de reconnaissance de la consommation modéréeEst-ce que ça pourrait changer la donne à l'avenir ?

C'est un joli combat qui a été mené par toutes les filières françaises, qui ont pesé de tout leur poids dans cette négociation à l'ONU pour être en capacité de garder la trajectoire des luttes entre les consommations excessives. Ce cap aurait pu changer vers le no-safe level, mais le braquet n'a pas été passé. Je pense que nos hygiénistes doivent l'entendre. Et ils doivent également prendre en compte que c'est bien ce combat contre les consommations excessives qui doit être mené. C'est le sujet, pas les consommations modérées dans le cadre des repères de santé publique. L'interdiction du produit, la non-accessibilité par le prix, ce n'est pas le sujet.

 

Le docteur Michel de Lorgeril vient de publier un livre jugeant notamment que la filière vin commet une grave erreur en ne communiquant pas sur les effets du French paradox : est-ce un tabou pour Vin & Société ?

Si vous êtes juge et partie, comment voulez-vous être crédible ? C'est compliqué. En revanche, que la communauté scientifique s'approche de ce type d'études, c'est son rôle. Le rôle des médecins, c'est de soigner les gens. Moi, mon rôle n'est pas d'expliquer que mon produit est un médicament, ce n'est pas le sujet. Mon rôle, c'est de dire que mon produit n'est pas neutre, donc il faut le consommer de manière responsable, modérée et dans des repères de santé publique. Je ne suis pas un prédicateur qui va faire une ordonnance. On pourrait avoir envie de dire que l'on a des études à l'appui, mais c'est assez difficile à tenir, parce qu'il y aurait des contre-exemples, autant vérifiés que vérifiables, ou pas vérifiés. Ce serait en fait un combat d'études dans lequel on rentrerait. Je vous le dis d'avance, le combat est perdu. En plus, il est inaudible dans notre environnement médiatique. Ça ne veut pas dire que nous ne cautionnons pas ce qui peut être dit. Je dis simplement avec quelle méthode on peut le dire. En tant que président de Vin & Société, je ne veux pas rentrer dans des débats d'études. Et j'en ai pas les compétences.

Venue du Gard, une pétition demande un changement pour le vin de la loi Évin, vue comme un levier de blocage pour la communication des savoir-faire du vin. Partagez-vous cet objectif, ou est-ce que la réouverture de ces dispositions pourrait au contraire amener à des durcissements ?

La loi Évin, on l'a quand même clarifiée pour tout ce qui est développement des territoires. Aujourd'hui, on a quand même un arsenal juridique qui nous permet de communiquer sur nos destinations, de vignobles, etc. Après, séparer les boissons alcoolisées les unes avec les autres, je ne sais pas ce que ça veut dire juridiquement. La molécule visée est l'éthanol, je ne sais pas comment expliquer scientifiquement que ce n'est pas la même dans un cas ou dans l'autre. Je n'ai pas trouvé la solution. Et je n'ai pas envie de la porter. La dernière chose, c'est de savoir s'il vaut mieux une communication grand public plutôt qu'être en capacité de faire vivre des expériences et renouveler l'approche finalement de notre produit. Ce ne sont pas les spots publicitaires à la télé qui vont relancer la consommation. Je n'y crois pas. Parce que personne ne regarde la télé. Et puis de toute façon, il faut avoir les moyens financiers. Qui aurait les moyens de faire de la communication mass-media dans la viticulture ? Il n'y en a pas, en réalité. Je comprends très bien la trajectoire de se dire que « c'est la loi Évin » qui pose un problème, mais on se rend compte que c'est un peu plus compliqué.

 

Un autre appel, celui de Strasbourg signé par 23 régions, demande une Europe fièrement viticole : est-ce que le vin est oublié et délaissé par les politiques alors qu'il affronte l'une de ses crises les plus violentes ?

La filière a besoin d'avoir de la cohérence et d'avoir de la coordination sur ces sujets quand on parle au niveau européen. Ça, c'est la chose la plus essentielle pour la filière viticole française et tous les producteurs de boissons alcoolisées. Pour se faire entendre, il faut être coordonné et en cohésion. On l'a bien vu avec l'OMS, c'est parce qu'il y a eu une très bonne coordination qu'on a su se faire entendre. Quand on est aligné, notre histoire sait encore se faire entendre. Et ça fonctionne. Le premier ministre Michel Barnier me disait « si vous allez en ordre de marche, vous serez entendus ». Parfois, nous avons pu commettre l'erreur d'être un petit peu dispersés. Les temps font qu'aujourd'hui, il faut être très coordonné, très fier de ce que l'on est, et très affirmatif dans ce que l'on dit. Et l'opinion publique nous aime. Les gens, je crois, aiment la filière viticole. Donc, il faut que nos élus entendent les Français leur dire « arrêtez de nous emmerder, fichez-nous la paix ».

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