e 20 août, la chambre criminelle de la Cour de cassation rejette l’ensemble des pourvois pour annulations de pièces de la procédure et non-lieu partiel formés par l’ancienne direction du négociant Raphaël Michel (basé à Châteauneuf-du-Pape, Vaucluse). Soit son ex-président, Guillaume Ryckwaert, son directeur comptable et son maître de chai, tous trois poursuivis pour escroquerie et tromperie en bande organisée après les révélations par la répression des Fraudes de la production et la commercialisation de 2013 à 2017 de 480 000 hectolitres de vins revendiquant à tort les AOC Côtes-du-Rhône et Châteauneuf-du-Pape. Soit « l'équivalent de 13 piscines olympiques », comme le résumait l’administration en 2018. Cette affaire est désormais en l’état d’être jugée par le tribunal correctionnel de Carpentras, après une longue succession de péripéties aussi procédurales que complexes.
Parmi les étapes de ce serpent de mer judiciaire, on notera l’ordonnance du 4 juillet 2023, par laquelle le juge d'instruction prononçait un non-lieu pour les volets d’escroquerie et de tromperie au bénéfice des trois mis en examen. Pour le reste de l'affaire, le juge d'instruction proposait une procédure de Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (une CRPC, ou plaider-coupable) pour l’absence de Déclaration Récapitulative Mensuelle (DRM) par un entrepositaire agréé. Attaquée par les parties civiles représentant le vignoble et le négoce de la vallée du Rhône et de Châteauneuf-du-Pape*, cette décision de non-lieu partiel a été retoquée une première fois par la Cour d'appel de Nîmes le 12 décembre 2023, renvoyant les trois mis en examen sur l’intégralité des chefs de prévention**. Un jugement lui-même annulé par la Cour de cassation le 26 mars 2024, mais que la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, nouvellement saisie, avait battu en brèche, le 22 mai 2025, en ordonnant le renvoi des trois prévenus devant le tribunal correctionnel. Ce que les ex-président, comptable et maître de chai ont contesté devant la Cour de cassation, faisant valoir leur validation du principe d’un plaider-coupable sur le volet douanier et fiscal de l'affaire Raphaël Michel. Se penchant sur les moyens juridiques soulevés par les parties (avec des arguments procéduraux complexes et ramifiés en plusieurs branches), la plus haute juridiction démonte cet été l’argumentation des mis en examen : « les moyens proposés par ces demandeurs sont rendus inopérants ».


« Les parties civiles se félicitent de cette décision qui était très attendue et qui reflète l’implication et la persévérance des organisations professionnelles de Châteauneuf-du-Pape et des Côtes-du-Rhône. Cela va permettre que cette fraude massive soit enfin jugée et tout un chacun ne peut que s’en satisfaire » réagissent maître Matthieu Chirez et Nathalie Tourrette, défenses des vignerons et négociants du Rhône*. Contactés par Vitisphere, Guillaume Ryckwaert et son conseil n’ont pas donné suite à date de parution.
Pour rappel, Raphaël Michel et sa dette de 25 millions € étaient rachetés par la famille Labruyère en 2018 à la barre du tribunal de commerce de Montpellier. Le nouvel investisseur lançait un ambitieux projet de plan de sauvegarde avec Anagram, un opérateur dédié aux vins en vrac, qui n'a pas connu le succès escompté et dont l'activité a cessé en 2022 après une liquidation judiciaire.
* : Soit le Syndicat Général des Vignerons Réunis des Côtes du Rhône, l’Union des Maisons de Vins du Rhône (UMVIN Rhône), l'Interprofession des Vins du Rhône (Inter Rhône), la Fédération des Syndicats de Producteurs de Châteauneuf-du-Pape et l’Organisme de Défense et de Gestion de l’appellation d’Origine contrôlée Châteauneuf-du-Pape.
** : L’ information ouverte le 29 juin 2017 avait pour chefs de poursuite : « escroquerie en bande organisée, tromperie en bande organisée par personne physique, tromperie par personne morale, faux administratif et usage, absence de déclarations récapitulatives mensuelles par un entrepositaire agréé, omission ou inexactitude dans la comptabilité matières par un entrepositaire agréé, mise en circulation de produits ou biens relevant de la législation des contributions indirectes sans document d'accompagnement conforme, falsification de denrées servant à l'alimentation en récidive, usage frauduleux d'une appellation d'origine protégée, tromperie sur une appellation d'origine contrôlée ».