is en route début 2024, le plan de relance du vignoble de Collioure-Banyuls, près de la frontière espagnole, livre déjà de premières observations consistantes sur les données climatiques. « Un an de pluviométrie et de température montrent déjà des tendances fortes, en particulier sur les cas extrêmes, les niveaux de pluies pouvant aller du simple au double selon les secteurs, alors que l’appellation ne couvre qu’une surface de 5 kilomètres sur 10 », commente le président du syndicat du cru Banyuls-Collioure Romuald Peronne.
Ces chiffres devront être encore consolidés par les deux prochaines années de collectes de données prévues par le plan, mais « ces chiffres viennent mettre du concret sur des choses dont on se doutait déjà, en particulier cette existence de climats où l’eau est plus abondante, et permettre de définir les zones à potentiel d’avenir », enchaîne le président du syndicat. Car redéfinir l’ensemble des potentialités viticoles et climatiques de la zone d’appellation est bien l’un des objectifs essentiels de ce plan, pour pouvoir à long terme envisager une redéfinition éventuelle de cette aire « qui compte des milliers d’hectares éligibles, de la mer jusqu’à plus haute altitude ».
Mais lorsqu’on parle de cette appellation, le distinguo entre vins doux et secs est une pierre angulaire, en particulier sur le positionnement hiérarchique et la stratégie commerciale. Sachant que l’étude financière du Cru réalisée en 2022 avait montré une marge négative de -340 000 €/an pour le Cru, principalement liée au vrac, alors que 60% de la marge positive provient des Banyuls grand Cru, soit seulement 5% des volumes. « Tout le monde s’est donc dit : je ne vais faire que des Banyuls Grand Cru ! », sourit Romuald Peronne, « mais c’est tout le contraire d’une hiérarchisation si on fait ça. Donc sur les vins doux naturels, où l’effet terroir est très faible, nous allons installer une pyramide de valorisation calquée sur celle des Portos ».
Basée sur les niveaux de vieillissement, celle-ci se décline sur 3 niveaux : Rimage (muté puis mis en bouteille rapidement sur le fruit), Rimage mise tardive ( RMT, avec un peu plus d’élevage), et enfin Banyuls Grand Cru tout en haut de la pyramide. « Nous ferons voter cette demande de hiérarchisation en assemblée générale à nos adhérents pour le présenter à l’Inao début 2026 », pose le président du syndicat. La hiérarchisation sera du même type pour les Banyuls blancs. Pour les vins secs en AOP Collioure en revanche, c’est l’aspect terroir qui prime, et la hiérarchisation passera par l’intégration de lieux-dits définis au cadastre et disposant de parcelles spécifiques (une trentaine dans un premier temps, sur plus de 300 existants) « pour un travail de long terme avec l’étude en cours des climats et terroirs dont nous disposons, des vinifications isolés, et donc sur le long terme définir une classification de ces terroirs en crus, voire 1ers crus, à l’image de ce qu’a pu réaliser la Bourgogne depuis très longtemps », ambitionne Romuald Peronne.
Pas en reste sur la nécessaire adaptation du vignoble aux enjeux du climat, le syndicat du Cru envisage également la plantation de cultures alternatives pour maintenir la dimension coupe-feu que la surface viticole en décroissance assure de moins en moins. Des partenariats avec le privé devraient faire aboutir un projet dès 2026.