e 17 juillet, la chambre des appels correctionnels de Bordeaux s’est repenchée sur la saga judiciaire des marques dites domaniales de vins bordelais : les dénominations commerciales s’inspirant d’un nom de château pour rendre plus désirable un vin de négoce sans autre lien avec la propriété réputée que des références marketings. Après "le Bordeaux de Maucaillou" en 2022, puis "le Bordeaux de Larrivet Haut-Brion" et "le Bordeaux de Citran" en 2024, la cour d’appel revient sur "le Bordeaux de By" qui avait abouti l’été 2022 aux lourdes condamnations par la quatrième chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux pour pratiques commerciales trompeuses de la propriété partageant sa marque, avec 100 000 € pour la SAS la Haute Couture du Vin By Jean Guyon (propriétés viticoles situées à Bégadan, dans le Médoc) et à 5 000 € son président du conseil de surveillance, Jean Guyon (76 ans), ainsi que d’importantes amendes pour le négoce exploitant la marque, avec 100 000 € pour la SAS Les chais d’Haussmann (Saint-André-de-Cubzac) et 5 000 € pour son président Pierre Jean Larraqué (65 ans). Des sommes liées aux montants générés : 110 799,26 € de redevance pour la SAS Jean Guyon et 1,43 million € de chiffre d’affaires pour le groupe Larraqué. Ce dernier vendant exclusivement sa marque au distributeur Metro, qui présentait ainsi "le Bordeaux de By" dans un catalogue : « vin de l’année 2017 […] ont été retenus les domaines Rollan de By, vignobles bordelais maintes fois récompensés ».
« Nous n’avons pas fait appel de la condamnation à la différence de Jean Guyon » indique-t-on au négoce Larraqué, où l’on ajoute que « nous ne suivons plus ce dossier depuis que nous avons réglé l’amende requise par le tribunal » et que le groupe ne distribue plus de marques domaniales. Pour Jean Guyon, qui avait fait appel, la relaxe en appel est un soulagement qu’il souhaite partager avec le plus grand nombre. L’affaire ayant fait grand bruit à l’époque, l’administration ayant épinglé 509 233 bouteilles de la marque "Bordeaux de By" (rouge 2014 et 2015, blanc et rosé 2016) pour, selon les termes de la prévention, « pratique commerciale trompeuse reposant sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur portant sur les caractéristiques essentielles d’un vin AOC Bordeaux, à savoir ses qualités substantielles, sa composition, son origine et son mode de fabrication ». Le dossier rapportant qu’« en mettant en avant le domaine de By et ses compétences dans les pratiques viticoles avec le terme "By" plus visible que Bordeaux alors que ces vins n’ont pas été produits par le domaines Rollan de By, le château de By, ni la SAS La Haute Couture du Vin By Jean Guyon ».
Insuffisance de preuves
« C’est dans la commercialisation de ce vin qu’il est reproché à la société Haute Couture By Jean Guyon et M. Jean Guyon une pratique commerciale trompeuse en ce qu’elle laisse entendre que le vin proviendrait de ses vignes et bénéficierait du savoir-faire de Jean Guyon » précise la cour d’appel dans son délibéré, pointant une pratique trompeuse avérée pour justice dans un catalogue du distributeur Metro. Mais encore faut-il déterminer les responsabilités de chacun, alors qu’il y a des contradictions dans les déclarations des prévenus. Si Jean Guyon indique qu’il n’a pas été partie prenante dans le processus de création des vins "le Bordeaux de By", Pierre Jean Larraqué déclare que Jean Guyon participait aux assemblages et aux décisions sur le packaging. Mais faute d’éléments du négociant pour prouver l’implication du vigneron*, la juridiction lève la condamnation de première instance : « il n’est pas apporté une preuve suffisante de ce que la SAS La Haute Couture du Vin By Jean Guyon et/ou M. Jean Guyon se soient rendus coupables de l’infraction reprochée. Il y a lieu en conséquence d’entrer en voie de relaxe à leur égard. »


Maître Thierry Lacoste, l’avocat de Jean Guyon, rapport qu’« il n'y a pas eu de recours contre l'arrêt rendu par la cour d'appel : cette décision est donc définitive ». Contactées, les parties civiles, Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) et la Fédération des Grands Vins de Bordeaux (FGVB), n’ont pas donné suite.
* : Si Jean Guyon a participé à une vidéo promotionnelle Metro, « il n'est pas établi qu’il ait su et validé la présentation qui en sera retirée pour assurer la commercialisation du vin devenu "le Bordeaux de By" » estime la cour d'appel.