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es goûts moisis terreux concernent bien des vignobles de la moitié nord de la France et sont plus ou moins présents selon les millésimes. Des mesures de prévention au vignoble permettent de diminuer les risques et plusieurs procédés curatifs sont possibles. 
L'effeuillage est une des mesure prophylactique pour limiter le risque de goût moisi-terreux, selon l'Ifv (© IFV - Marc Raynal) « Terre », « moisi », « terre humide », voire « betterave rouge », tels sont les descripteurs associés à la présence de la géosmine, la principale molécule responsable des déviations aromatiques de type « GMT » dans les vins, avec « l’IPMP » et le « MIB ». Les goûts moisis-terreux sont surtout rencontrés par les viticulteurs de la moitié nord de la France et leur fréquence semble avoir augmenté depuis 2001.
Les goûts moisis terreux sont produits par la prolifération de micro-organismes à l’intérieur des grappes à maturité. Les moisissures du genre Penicillium, notamment Penicillium expansum, semblent le plus souvent responsables. Mais la géosmine peut être produite par de seules souches Penicillium ou par Penicillium allié à Botrytis Cinerea. Certains cépages apparaissent plus sensibles que d’autres aux goûts moisis terreux, comme le gamay, le sauvignon ou le chenin. Des conditions climatiques avec des pluies abondantes, une forte hygrométrie et des températures estivales entre 25° et 30° favorisent l’émergence de ces problèmes. De même, les sols gardant leur excédent en eau, la conduite du vignoble favorisant la vigueur de la vigne, l’entassement des grappes ou un déséquilibre des populations fongiques du raisin font aussi accroître les risques.
Les mesures de prévention au vignoble passent donc par la maîtrise de la vigueur et du rendement, l’aération des grappes, l’effeuillage, l’ébourgeonnage, un palissage soigné. Il convient également de lutter contre les vers de la grappe et bien sûr contre la pourriture grise et d’éviter le travail du sol après la véraison. L’Ifv (Institut français de la vigne et du vin) conseille par ailleurs d’éviter la surmaturité des grappes.
Ces mesures de prophylaxie sont essentielles tant le pouvoir de nuisance des goûts moisis-terreux est grand. 0,1% de grappes à odeur terreuse suffisent pour donner 100 ng/L de géosmine, sachant que la molécule est détectable à faible concentration (entre 20 et 50 ng/L). Certaines grappes peuvent sembler saines à l’œil nu mais peuvent être contaminées. D’où l’importance de prélever des grappes avant la vendange, d’en inspecter l’intérieur, de les sentir et le cas échéant de faire un tri négatif.
Si le problème est détecté sur une parcelle, il est conseillé de renoncer à la vendange mécanique et d’opérer un tri drastique après vendanges manuelles, en veillant à ne pas triturer les raisins car les jus peuvent être contaminants.
L’arme du charbon œnologique Au chai, il n’est guère possible de masquer la géosmine par dilution en assemblage. Et la capacité de détection de la géosmine est en outre variable selon les dégustateurs. L’Ifv conseille en vinification en rouge une macération préfermentaire à chaud suivie d’un pressurage direct et de limiter le temps de macération, les remontages et les pigeages. En blanc, l’Institut préconise de séparer les jus d’égouttage des jus de presse.
Des traitements curatifs existent. La géosmine étant soluble dans les graisses, les traitements au lait entier ou à l’huile de pépins de raisins sont possibles, la deuxième solution paraissant plus efficace sans pour autant être la panacée. Mais le traitement le plus pratiqué et donnant le plus de résultats est le recours au charbon œnologique, désormais autorisé pour la décontamination.