u flicage. Voilà ce que beaucoup de vignerons pensent de la facturation électronique qui se met en place en septembre prochain. « On est tracés de tous les côtés », glisse Vincent Daux, propriétaire du domaine de l’Ecette, 18 ha en conventionnel à Rully, en Saône-et-Loire. S’il est au courant du changement qui se prépare, Vincent Daux ne sait pas encore quelle plateforme il adoptera. « Nos organisations professionnelles vont nous informer en temps voulu des solutions disponibles », se rassure-t-il.
En Alsace, Emmanuel Kreiss ne comprend pas le but de cette obligation. « Je reçois déjà mes factures par e-mail et je les dépose dans le bureau numérique que mon centre de gestion m’a ouvert, indique ce coopérateur de la cave de Cleebourg, qui cultive 10 ha de vignes et réalise des prestations sur 16 ha. Je ne lui transfère plus de papier. Il a accès à mon compte et s’il y a une écriture qu’il ne comprend pas, il me contacte. C’est pratique. »
D’après lui, l’argument selon lequel la facturation électronique réunira toutes les factures au même endroit ne tient pas puisque c’est déjà son cas. De plus, il n’en a pas vraiment besoin pour gérer son activité. « Je perçois de l’argent de ma coopérative. En prestation de services, je fais une douzaine de factures par an. C’est facile de budgétiser. J’ai en tête ce que j’ai à payer. Et de prédire : La facturation électronique permettra juste à l’État de nous contrôler et de sanctionner à la moindre erreur. »
En Charente, Jean Pasquet, propriétaire du domaine Pasquet, 15 ha bio à Bellevigne, est plus nuancé. Ce vigneron-négociant a échangé sur le sujet avec l’éditeur de son logiciel de gestion commerciale et de facturation Grand Cru et son comptable. « L’éditeur va rendre son logiciel compatible avec la plateforme de facturation électronique que nous choisirons, sans surcoût, indique-t-il. Et si je passe par la plateforme du comptable, il n’y aura pas de surcoût non plus de son côté. »
Selon ce vigneron, si les factures électroniques s’enregistrent automatiquement dans le logiciel Grand Cru, ce sera un progrès. « Il n’y aura plus de facture perdue et ce sera un gain de temps, explique-t-il. Actuellement, c’est une de mes salariées qui saisit les factures dans notre logiciel de gestion. »
Les plateformes de facturation électronique n’étant pas encore disponibles, nos interlocuteurs se posent beaucoup de questions. « Est-ce qu’on pourra annuler gratuitement une facture erronée ? », interroge Emmanuel Kreiss. « Quand j’achète du raisin, c’est moi qui fais la facture au nom du viticulteur. Cela sera-t-il pris en compte ? », se demande Jean Pasquet. À l’administration d’apporter des réponses.
Alain Dupraz, directeur du pôle expertise comptable et performance de CERFrance explique « À l’origine, cette réforme a pour but de réduire la fraude à la TVA. Depuis, le gouvernement met en avant d’autres avantages : automatiser et simplifier la facturation, faciliter la gestion de la trésorerie. Ainsi, à partir du 1er septembre 2026, les vignerons devront disposer d’un compte sur une plateforme agréée (PA) par l’État afin de recevoir toutes les factures de leurs fournisseurs, que cela soit des bouchons, des prestations de services ou même l’électricité d’EDF. Ensuite, au 1er septembre 2027, ils devront disposer de ce même type d’outil pour émettre des factures électroniques. » « Pour les clients assujettis à la TVA, on parle de factures au format “e-invoicing”, et pour les clients particuliers, non soumis à la TVA, de “e-reporting”. Les plateformes transmettent automatiquement les factures aux acheteurs et les données des factures et des transactions à l’administration fiscale. Actuellement [lundi 1er décembre, ndlr], les plateformes sont en phase de test. Aucune n’est encore sur le marché. »


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