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"Si je dois déroger aux nouvelles règles pour sauver la récolte, je le ferai " Les sévères restrictions sur le cuivre suscitent la colère des vignerons bios
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Lutte contre le mildiou
"Si je dois déroger aux nouvelles règles pour sauver la récolte, je le ferai " Les sévères restrictions sur le cuivre suscitent la colère des vignerons bios

L’interdiction d’une vingtaine de produits cupriques et les sévères restrictions d’utilisation pour deux spécialités réhomologuées ne passent pas chez les vignerons bios. Certains envisagent de ne pas se soumettre aux nouvelles règles.
Par Ingrid Proust Le 24 octobre 2025
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Vigne traitée au cuivre - crédit photo : Christelle Stef (photo d'archive)
«

 Une cabale contre la viticulture bio ». « C’est délirant ». « Des pouvoirs publics hors sol », « Si on voulait tuer la filière bio on ne s’y prendrait pas autrement » Les vignerons bios que nous avons interrogés expriment tous ou presque leur choc et leur indignation après la décision prise mi-juillet par l’Anses de ne réhomologuer aucun des produits cupriques qu’elle était chargée de réexaminer, sauf deux mais avec de sévères restrictions d’emploi.

« L’Anses a rendu publiques ses décisions pendant les vacances. Beaucoup ne l’ont su qu’à la rentrée », dénonce Jean-François Roit Lévêque, responsable vigne du Clos des Quarterons à St-Nicolas-de-Bourgueil (Indre-et-Loire) et également vigneron. Très vite, l’information circule sur les réseaux sociaux. « J’ai vu des posts sur Facebook de collègues qui relayaient des articles de Vitisphere et d’autres médias », indique Jérémy Rouanet, qui gère le domaine Montcélèbre à Cesseras (Hérault).

"On marche sur la tête"

 « Nous avons été alertés par le syndicat des vignerons bios de Nouvelle-Aquitaine et notre conseillère viticole, s’exclame Jean-Baptiste Duquesne, propriétaire du Château Cazebonne à Saint-Pierre-de-Mons (Gironde). On marche sur la tête en s’en prenant au cuivre : je ne conteste pas sa toxicité à haute dose pour les sols, mais il n’y a pas de résidus dans le vin et c’est un produit sans risque pour le consommateur ».

« On est stupéfait de cette attaque contre le cuivre, alors que le folpel, classé CMR 2, a été réhomologué au niveau européen …Les firmes phytos auraient-elles bâclé leurs dossiers d’homologation car elles ne gagnent plus assez d’argent avec les produits cupriques ? », s’interroge un vigneron de Menetou-Salon (Cher).

 « Les poudres sont toutes supprimées. Or ce sont les produits les plus simples, les plus neutres et les moins chers, peste Jean-François Roit-Lévêque. Faut-il y voir un effet du lobby de l’industrie des phytos ? ».

Sur 22 produits cupriques qu’elle a réexaminés, l’Anses l’Anses n’a réhomologué que Champ Flo Ampli et Héliocuivre, deux hydroxydes. Et leur usage devient sévèrement encadré : dose maximale de 4kg/ha/an, ce qui interdit le lissage, quantité réduite par application, intervalle d’au moins 7 jours entre deux traitements, emploi interdit durant la floraison, ZNT eau et riverains, obligation pour les travailleurs de porter gants dans les vignes traitées jusqu’aux vendanges….

"L'Anses ne se rend pas compte des conséquences..."

« L’Anses ne se rend pas compte des conséquences de la fin du lissage et de l’interdiction d’intervenir pendant 7 jours après un traitement quand on se prend 150 mm de pluie en trois jours comme ce fut le cas en 2024 ! », déplore Jean-Baptiste Duquesne.

Jérémy Rouanet est aussi inquiet, en particulier de la baisse de la dose permise par application qui passe de 3 l/ha à 1 l/ha pour Héliocuivre et de 2 l/ha à 1,3 l/ha pour Champ Flo Ampli. « J’utilise essentiellement de la bouillie bordelaise. Mais quand la pression du mildiou est plus forte, j’emploie du Champ Flo. Si on nous réduit la dose autorisée, on ne va pas y arriver », redoute-t-il.

A la tête du domaine familial de la Grange Neuve à Pomport (Dordogne), Anthony Castaing fustige également ces nouvelles conditions d’emploi. « Elles sont aussi drastiques que pour des produits conventionnels. J’espère que l’Anses va autoriser des aménagements. Ou bien il faudra tricher, mais ce n’est pas mon objectif, nous sommes déjà sous l’œil de l’administration. »

Des ZNT "injustes"

Pour Jean-François Roit-Lévêque, les nouvelles ZNT eau et riverains sur les hydroxydes sont injustes. « Pourquoi en imposer alors qu’en bio nous sommes les moins pollueurs et que le cuivre est un oligo-élément essentiel à la vie ? ». Vigneron à Traenheim (Bas-Rhin), Nathan Muller approuve en revanche ces conditions renforcées : « Il faut tenir compte des riverains et de la santé, cela ne peut que nous faire une bonne publicité dans un contexte commercial difficile ». Il précise n’être pas confronté de fortes pressions mildiou, même en 2024.

Bien moins conciliant, un vigneron du Bordelais prévient : « je ne respecterai pas les obligations concernant Champ Flo et Heliocuivre . Jérémy Rouanet n’est pas loin de lui emboîter le pas. « On trouvera des solutions pour sauver la récolte, dit-il. Si je dois déroger aux nouvelles règles, notamment sur la cadence de 7 jours, je le ferai. Si je dois sortir du bio, je le ferai. Mon métier je le fais du mieux possible. Je ne me laisserai pas dicter ce que je dois faire par des gens qui ne connaissent pas la viticulture bio ».

"Les prix vont augmenter"

Après les coupes sombres de l’Anses, il reste encore une vingtaine de spécialités cupriques, dont 15 en attente d’être réevaluées par l’Italie, notamment la bouillie bordelaise RSR. « Faudra-t-il se fournir en Italie ? », se demande Jean-François Roit-Lévêque qui prévoit de faire des stocks de produits non-réhomologués mais pourront encore être utilisées en 2026. « J’en ai parlé avec mon distributeur : il faut s’attendre à de la spéculation, les prix vont augmenter », envisage-t-il.

Anthony Castaing est du même avis : « La hausse des prix est risque bien réel puisque les deux hydroxydes sont désormais en quasi monopole. Mais faire des stocks implique de bloquer de la trésorerie alors que la situation économique est difficile ».

Choqués mais pas résignés, les bios sont prêts à se battre pour amener l’Anses à revenir sur ses décisions. « Il va falloir se bouger d’ici les prochaines semaines », insiste Anthony Castaing. « Ces décisions s’inscrivent dans période déjà très difficile. Elles vont faire du bruit, ce n’est que le début. Les vignerons bios pourraient descendre dans la rue », souligne Jean-François Roit Lévêque qui espère voir l’Anses engager des études sur la toxicité réelle du cuivre. 

La mobilisation s’engage

Prise de cours par ces mesures publiées en plein été, la filière bio mijote sa riposte. « Nous préparons un courrier pour contester les décisions de l’Anses que nous adresserons aux pouvoirs publics et aux élus. Il émane de toute la filière bio avec le soutien de l’Itab et de l’IFV et il pourra être repris par des organisations non-bios. Car nous sommes tous dans le même bateau », déclare Sébastien David, président de France Vin Bio, la tête encore tout à ses vinifications. Pour leur part, Les Vignerons indépendants et la Fdsea 37 ont déjà publié des communiqués soulignant que l’Anses met en péril la viticulture biologique. « Nous avons été contactés par des présidents d’ODG inquiets. Nous avons porté le sujet à la Confédération des vignerons et vigneronne du Val de Loire, qui a pris position. Nous sensibilisons aussi nos parlementaires », ajoute Christophe Deschamps, co-président de Loire Vin Bio.

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